Les éditions La presse
304 pages
Résumé:
Meurtrie par une relation sans issue et lasse de la canicule, une jeune femme quitte Montréal et traverse le pays pour s’établir à Yellowknife. Tout ce qui l'attend au nord du soixantième parallèle, c'est un nouvel emploi, et l'hiver. Pour réécrire son histoire, les paysages vastes et glacés du Grand Nord forment une parfaite page blanche. Peu à peu, déroutée mais fascinée par ce qu'elle découvre, elle comprend qu'elle n'est pas la seule à chercher au coeur de la nuit polaire, un avenir plus lumineux.
Mon commentaire:
Un livre qui commence par "Je déteste l'été" ne peut que me plaire. Et c'est le cas avec ce récit qui raconte le départ d'une jeune femme vers Yellowknife. Là-bas l'attend une toute autre vie. Yellowknife c'est le froid, qui peut être parfois mortel, la neige qui dure et qui dure, les difficultés d'approvisionnement, la chaleur des cafés et des bars où se retrouver entre amis. J'ai tout de suite aimé la narratrice de cette histoire qui vit l'été de la même façon que moi: en espérant l'hiver.
À Montréal, dans la chaleur de l'été, sa relation bat de l'aile. Une offre d'emploi est affichée à l'interne: un poste pour Yellowknife. Elle postule sur un coup de tête et se voit offrir le travail. Huit jours de voiture, une arrivée dépaysante et son installation chez une famille de l'endroit changeront littéralement sa vie. Elle se fait des amis, un amoureux.
Elle reconsidère sa vie, son travail, sa façon de percevoir la vie. Elle en est d'ailleurs à un tournant, où elle doit faire des choix et décider de ce qu'elle veut vraiment. Tranquillement, elle apprivoise le Nord et à travers ses yeux qui découvrent, nous voyons la façon dont les gens vivent là-bas, le pont de glace, l'approvisionnement, le mode de vie au quotidien, l'arrivée des beaux jours, les habitants. À travers différentes anecdotes, elle nous raconte le Nord, son Nord, comme elle le perçoit et de la façon dont elle le vit. Les différences entre les gens originaires de la place (où ceux qui s'y sont installés voilà des années) et les nouveaux venus est palpable. La relation entre eux deux est parfois complexe. J'ai aimé également qu'il ne s'agisse pas d'une histoire légère. Le résumé peut en donner l'impression, mais c'est un roman qui pose beaucoup de questions, qui jette un regard nouveau sur un mode de vie, sur un lieu et qui aborde différents sujets comme le travail, le voyage et même, les pensionnats indiens pendant la Commission de vérité et de Réconciliation que la narratrice doit couvrir dans le cadre de son travail de journaliste. Certains passages sont touchants.
J'ai beaucoup aimé la construction de ce roman qui n'est pas du tout linéaire. L'histoire se crée sous nos yeux comme un patchwork, des petits morceaux de vie ici et là collés ensemble. Il y a des sauts constants entre les souvenirs, le présent et le passé. On nous parle parfois d'événements qui n'auront lieu que plus loin dans l'histoire, et notre intérêt est sans cesse titillé, mais je n'ai pas trouvé que c'était mélangeant. J'ai plutôt apprécié cette narration originale qui donne du mouvement au récit. Plusieurs expressions ou bouts de dialogues sont en anglais, mais ça donne un effet réaliste aux relations et c'est toujours court, rien de compliqué même pour quelqu'un qui ne lit pas vraiment l'anglais.
La saison froide est un roman sur l'attrait du froid, sur la fuite et sur les questionnements. Faisons-nous les bons choix? Est-ce que le changement de vie change véritablement les choses? Un récit qui présente une réflexion sur le départ, le voyage, le changement et surtout, la liberté.
Une excellente lecture que j'ai vraiment apprécié. Une belle découverte!
Quelques extraits:
"Je déteste l'été. Dès mon enfance dans le smog de la ville, j'ai détesté l'été. Les cuisses collées sur des balançoires en bois, les jambes pendants au bord des piscines bondées d'où montaient des odeurs d'urine et de chlore ou encore pieds nus sur des trottoirs brûlants, j'ai détesté l'été. J'ai détesté ma peau brûlée, détesté la dureté du soleil. L'été, ça sent la poussière et l'asphalte fondu et ça colle à la peau comme une sangsue. Nulle part on ne peut échapper à l'été: ni dehors, où des cieux immobiles nous prennent dans des filets de lumière crue, ni dans les maisons, où on étouffe, ni même dans la moiteur des nuits." p.7
"Est-ce qu'on se perd, est-ce qu'on perd un peu de soi, quand on part?" p.157