A l'occasion de la Journée Internationale pour l'élimination de la violence contre les femmes, le 25 novembre, Be a décidé d'inviter Tristane Banon à s'exprimer au travers d'une lettre ouverte.
Une lettre ouverte, qu'IL ne lira certainement pas mais qui m'a laissé sans voix.
Pouvoir parler de sujets légers puis de sujet forts, c'est la force de Be et c'est pour ça qu'on se reconnait dans ce magazine.
Lettre ouverte de Tristane Banon :
"Deux cent huit femmes sont violées chaque jour en France. Elles sont violées, puis elles se taisent. Ou presque. Seules douze d’entre elles oseront parler, et seuls quatre présumés violeurs seront “embêtés”.
“Embêtés”, pas plus, c’est de ça dont on parle.
Aujourd’hui, il est plus facile de prouver un téléchargement illégal que de démontrer un viol. A chacun d’entirer les conclusions qui s’imposent ! Si la comparaison prête à rire, elle n’est pas vraiment drôle. Pas plus de quatre hommes inquiétés, car rares sont ceux à prendre au sérieux la parole de la victime.
Elle sera instable, allumeuse, salope, catin, provocatrice, trop grande, trop petite, trop belle, trop moche, trop inconnue, trop noire, trop blonde, trop étrangère, trop menteuse, trop pas assez. Lui, le violeur, l’agresseur, le harceleur, il mentira. Souvent, tout le temps, mais qu’importe. Lui, on l’excusera, souvent, tout le temps, mais qu’importe. Non, il importejustement : nous sommesen 2011 ! Depuis le 11février 2003, je suis l’une d’entre elles. Silencieuse. Rien de grave, il n’y apas mort d’homme !
Le 5 juillet dernier, j’ai décidé d’être l’une des douze femmes qui ont, ce jour-là, porté plainte. Idiote réveillée trop tard, comme tant d’autres. J’ai vécu les mêmes humiliations, les mêmes critiques, les mêmes jugements, les mêmes dénigrements, les mêmes déstabilisations, les mêmes pressions, le même discrédit... Peut-être un peu plus fort, sûrement un peu plus violemment, parce que c’était Lui. Mais finalement, je suis une parmi douze, douze sur deux cent huit.
J’entends bien que je ne suis pas la représentante idéale. Il n’y a pas de représentante idéale, pas de quoi être fière.
Seulement voilà, pas de quoi avoir honte non plus. Pas de quoi secacher, juste dénoncer. La honte, elle, est pour l’autre : l’agresseur, le violeur. La honte n’est paspour nous. C’est son problème, qu’il se débrouille avec. C’est ce qu’il faut revendiquer : le droit de porter la tête haute, en même temps que la plainte".
Tristane Banon
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Tristane Banon en couverture de Be, canon ou canon les Bees?