C’est un fait : la maison Hollande est en train de s’écrouler comme un château de cartes. On appelle ce phénomène
: "ségolénisation". Rien n’est toutefois perdu. Les pompiers arriveront-ils à temps avant l’élection ?
Ah, les sondages, la belle affaire !
Parmi les dernières livraisons, l’un (LH2) qui donnerait le 20 novembre 2011 au premier tour 30% à François Hollande (au lieu de
39% !) et 29% à Nicolas Sarkozy (au lieu de 24%). Le tout à 3% près. Qui l'aurait cru il y a un mois ? L’autre sorti de BVA le 22 novembre 2011 donnerait Hollande à 32%
et Sarkozy à 27% avec un chute de 7% pour Hollande. Les deux donneraient au second tour 58% pour Hollande et 42% pour Sarkozy.
Bref, que ce soit heureux ou malheureux, nul ne peut contester que la popularité de François Hollande chute vertigineusement depuis le 16 octobre 2011, date de sa consécration comme candidat des
socialistes.
C’est d’ailleurs amusant : il en viendra toujours certains à ergoter sur le bien-fondé desdits sondages ; ils n’ont pas forcément tort mais
pourquoi n’ont-ils donc pas ergoté avant, quand François Hollande était si haut dans ces mêmes sondages ?
Les plus malhonnêtes invoqueront même les "médias mainstream", détenus par les puissances de l’argent qui défendent Nicolas Sarkozy mais qui n’ont pas
été capables pendant deux ans de redresser sa courbe d’impopularité record sous la Ve République.
Étrange façon que se taire quand ça arrange et contester quand ça dérange.
Comme toujours, ce qui compte dans les sondages, ce ne sont pas les pourcentages dans l’absolu mais en relatif. En clair, la dérivée. La pente. La
tendance d’un mois sur l’autre. Parce qu’on sait que les sondages d’un même institut sont faits avec le même procédé, avec les mêmes corrections magiques.
Or, maintenant, c’est clair, la tendance est à la baisse pour François Hollande et à la hausse pour Nicolas Sarkozy. Cela ne prédit rien sur l’issue de l’élection présidentielle, dont François Hollande est encore largement le favori, mais cela
indique des tendances qui sont probablement les dernières avant le cœur de la campagne présidentielle, à savoir à partir de début janvier 2012.
Les raisons de cette chute ? Il y a déjà l’effet mécanique de la primaire socialiste qui a
monopolisé les médias pendant un mois et qui a donc surévalué le candidat socialiste. Il est donc normal que cette prime médiatique s’évapore. Tout comme la victoire de la gauche au Sénat.
Mais il n’y a pas que cela. Il y a depuis un mois un grand nombre de gaffes, erreurs, boulettes et maladresses de la part du camp Hollande, et
probablement la première est d’avoir nommé une équipe de campagne pléthorique et donc, pas en état de réagir rapidement et d’apporter une dynamique de réplique efficace et cohérente face aux tirs
commandés par Jean-François Copé (qui est rudement efficace dans ce sport). Tant qu'il désignera des Jack
Lang pour aller débattre avec ses concurrents, il risque de ne pas être très bien représenté, ni de donner une image d'homme moderne.
Parmi les mauvais points, un véritable flottement sur les intentions de François Hollande pour sa politique énergétique. Veut-il en finir avec le
nucléaire ? Cherche-t-il à ruser pour obtenir à la fois l’adhésion des anti-nucléaire et des pro-nucléaire ? Sait-il trancher autrement que sur un EPR sans MOX (ce qui ne signifie plus
grand chose) ? Y a-t-il une réelle compétence pour prendre des décisions qui pèseront sur une ou deux générations de Français ? Le dernier a-t-il toujours raison ?
Au-delà du nucléaire, c’est l’accord entre les Verts et le PS
qui mérite d’être pointé du doigt. Pourquoi le PS donne-t-il autant de circonscriptions législatives (soixante !) à un parti qui va avoir bien du mal à atteindre le seuil de 5% à
l’élection présidentielle ? Quel est son intérêt ?
Sur France 2 le 22 novembre 2011, Eva Joly ne lui est même pas reconnaissante en refusant de dire si elle le
soutiendra au second tour (conséquence immédiate le 23 novembre 2011 : son porte-parole Yannick Jadot démissionne !). Le matin du 23 novembre 2011 sur RTL, Eva Joly récidive mais l'après-midi,
elle est bien obligée de revenir à la raison sur Twitter pour rassurer ses derniers fidèles : « Évidemment au second tour, la gauche et les écolos devront se rassembler. ».
Ouf, la gauche est rassurée !
Il y a aussi flottement sur la crise financière européenne, son absence de répondant lors de la crise grecque puis italienne. Parallèlement, Nicolas Sarkozy a su montrer une certaine "dextérité" dans les relations internationales, en particulier auprès de
l’intransigeante Angela Merkel et du "laudateur" Barack
Obama.
Pire que des flottements, il y a une réelle incohérence dans les rares mesures qu’il a proposées (dont le recrutement de 60 000 fonctionnaires) et tout semble devoir être réécrit à la lumière de la conjoncture
mondiale.
Y a-t-il une réelle unité derrière le candidat François Hollande et où sont donc passés, dans son dispositif, Bertrand Delanoë, Laurent Fabius, Gérard Collomb… et même Arnaud Montebourg ?
Les négociations entre le PS et les Verts ne seraient-elles pas l’occasion d’un mauvais coup fomenté par Martine Aubry à …son ancien rival ?
Durant ces huit derniers mois, François Hollande avait réussi le tour de force de se présenter en homme
neuf, retournant à son avantage le sérieux handicap d’absence d’expérience ministérielle, et en homme solitaire, provincial, indépendant, loin des appareils politiques, lui qui a battu le record de longévité de la direction du Parti socialiste depuis Guy Mollet. Pour cela, Martine Aubry
l’avait considérablement aidé, elle qui avait derrière elle tout le staff du PS.
Plus globalement, la soirée beaucoup trop euphorique du 16
octobre 2011 a été, à mon sens, une catastrophe en communication politique. Elle a laissé entendre qu’un Président socialiste venait d’être élu… ce qui, pour une élection n’ayant que des
candidats socialistes, n’était pas une grande surprise !
Et encore maintenant, François Hollande tombe dans la même erreur que Dominique Strauss-Kahn en avril 2011 (il y a si longtemps !), en considérant comme acquise son élection le 6 mai 2012 et en partageant déjà les "dépouilles". Certains ont même
des droits de préemption : l’hôtel de Lassay (perchoir) à Ségolène Royal, Beauvau à Manuel Valls, Vendôme à Arnaud Montebourg… et pourquoi pas Jean-Marc Ayrault au Ministère des Aéroports régionaux,
histoire de faire preuve d’autorité face aux écologistes ?
Pour l’instant, l’effondrement de François Hollande ne bénéficie qu’à Nicolas Sarkozy, sans laisser beaucoup de trace à Jean-Pierre Chevènement (qui a un léger frémissement au détriment d’Eva Joly), ni à François Bayrou ou Hervé
Morin (qui devrait annoncer officiellement sa candidature le 27 novembre 2011 contre l’appareil du Nouveau centre qu’il préside). Même Marine Le Pen stagne depuis l’été.
Celui qui a le plus à gagner de cette chute reste cependant François Bayrou qui a décidé de rester encore en retrait, pensant qu’une élection
présidentielle ne se gagne qu’à partir de janvier. J’en parlerai un peu plus précisément très bientôt.
Aussi sur le
blog.
Sylvain Rakotoarison (24 novembre
2011)
http://www.rakotoarison.eu
Pour aller plus loin :
François Hollande
consacré…
Hollande et
Bayrou.
Hollande et
Chevènement.
2012,
année particulière.
Jack Lang incapable de défendre les 60 000 fonctionnaires.
60 000 fonctionnaires en plus ?