Dimanche dernier, les Genevois refusaient la gratuité des transports publics, notamment par manque de solution de financement.
Le mardi qui suivait, le conseil administratif de la Ville de Genève confirmait la volonté du maire Patrice Mugny d’étudier la mise en place d’un péage urbain aux abords de la capitale du bout du lac ; mais rien n’a été dit à propos des montants récoltés par un tel instrument de régulation de la circulation citadine.
Ce qui étonne le plus, c’est que personne, à part deux élus lausannois – Evelyne Knecht et moi-même – n’a eu l’idée de coupler les deux mesures – péage urbain et gratuité des transports publics – afin d’offrir une alternative aux automobilistes et d’éviter que les montants récoltés ne soient affectés à des mesures anti-sociales comme les baisses d’impôts ou anti-écologiques comme le finacement de nouvelles routes.
Explications par un petit retour en arrière grâce à cet article écrit pour Pages de gauche en juin 2006.
«Il est à présent évident que l’émission de gaz à effet de serre, associée à l’industrialisation et à la croissance économique, (…) provoque un réchauffement climatique à un rythme insoutenable». C’est ce que déclarait Tony Blair en commentant un rapport sur les risques de changement climatique dans The Independant du 30 janvier dernier!
En Suisse, et dans les pays industrialisés de manière générale, la délocalisation des industries polluantes dans les pays en voie de développement fait que c’est désormais le trafic motorisé qui constitue la principale source de pollution en milieu urbain. Les récents records de particules fines à Lausanne sont là pour l’illustrer. Si l’on désire protéger la population des villes, il faut donc limiter le trafic automobile qui, à cause de l’explosion du trafic et malgré les progrès techniques des moteurs, devient le premier responsable de la pollution de l’air. De toute manière l’approche du fameux «oil peak» et ses conséquences conduiront les automobilistes et les autorités à envisager des solutions permettant de se déplacer en roulant moins. Enfin, et ce n’est pas le moindre des maux, la voiture en ville est une source de nuisances multiples: bruit, accidents, surfaces colonisées donc confisquées aux habitants.
D’un autre côté, la vie «moderne» impose de plus en plus souvent une grande mobilité, c’est ainsi que l’on constate que les gens se déplacent de moins en moins à pied ou en transports publics et de plus en plus en voiture. Il est donc temps de renverser la vapeur et de prévoir une solution écologique et sociale «radicale» aux problèmes de mobilité urbaine. Pour les popistes «rouges-verts», une solution qui mérite d’être sérieusement étudiée est le financement de la gratuité des transports publics par un péage urbain. L’objectif du couplage péage urbain et transports publics gratuits est triple: diminuer drastiquement les nuisances et la pollution en ville par une baisse de trafic, offrir à l’automobiliste une alternative crédible et, finalement, couper l’herbe sous le pied de ceux qui rêvent déjà d’affecter les produits d’un éventuel péage urbain à une baisse des impôts, et ainsi de faire payer la route à ceux qui l’utilisent.
A ceux qui déclarent cette proposition irréalisable, irréaliste ou utopique, qu’ils y regardent à deux fois avant de juger: les Londoniens se déclarent à 70 % favorables au péage introduit en 2003, les habitants de Châteauroux (Fr) sont 20 % plus nombreux à utiliser les transports publics et leur fréquentation a augmenté de 76 % depuis qu’ils sont gratuits alors que la gratuité de ceux de Hasselt (Be) a permis d’accroître leur fréquentation de 800 % et que les commerçants sont ravis de voir leur chiffre d’affaires augmenter grâce à la tranquillisation de la ville.
On le voit bien, il est possible que le couplage de deux solutions, dogmatiques pour certains, destinées à faire reculer le trafic et la pollution urbains soit la solution pragmatique de demain.
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