Au MRAC de Sérignan (jusqu’au 26 février), Cécile Bart joue avec la lumière : dans une grande pièce éclairée par la lumière du jour, sans éclairage électrique, elle a construit un dispositif de cadres, de panneaux, de reflets qui font écho aux reflets des fenêtres et des vasistas sur le sol vitrifié. Dans cette réverbération verticale, il faut choisir son point de vue (qui n’est pas unique, comme chez Varini, mais qui génère des expériences différentes selon l’endroit où l’on se place) et regarder paisiblement ces cadres, ces tableaux qui tombent et que leur reflet au sol prolonge et dédouble, ces panneaux qui pourraient coulisser. Dans cette lumière sourde, plombée, au milieu de ces couleurs désaturées, c’est l’expérience même du spectateur qui compte, son vertige, sa perte de repères. En contrepoint de l’expérience de Gabor Ösz, on se retrouve comme piégé entre positif et négatif, entre le réel et son reflet.
Dans l’entrée du Musée, Cécile Bart montre (pour la première fois) des photographies, dont on ne sait parfois si ce sont des images de ses travaux ou des nuages, des reflets ou des surfaces d’étang.
Le MRAC montre aussi les travaux de huit jeunes artistes qui viennent de sortir d’écoles des Beaux-arts de la région (Nîmes, Montpellier et Perpignan) : plus qu’une exposition structurée, c’est une juxtaposition des œuvres de ces artistes, avec des travaux plutôt minimaux et conceptuels, et d’autres plus loquaces. C’est nécessairement inégal ; voici mes quatre favoris (50% du lot): - Cyndie Olivares présente deux pièces simples et éloquentes, un Mikado sauvage fait de branches d’arbre tordues marquées de couleur (comme des signes de GR), œuvre ‘sale’, dense et fragile en tension avec la légère beauté épurée des vraies baguettes de Mikado, et un cube transparent rempli de sachets d’eau eux aussi transparents (un seul, noir, est plein d’encre), pièce minimalissime et pure comme un diamant (Tension de Surface) ci-dessus ;-
Charlette Knoll, outre une piscine qui fuit, signe de son intérêt pour l’accident, a empilé à l’entrée de l’exposition (dont le titre est 'Alerte Météo 2') ces feux clignotants qui donnent l’alarme, qui crient au danger, qui stoppent le visiteur dans son avance ;- Noé Grenier retravaille des images (ici Twin Peaks) pour en ressortir des regards, des tensions, des amorces de drame, en allongeant le temps, en triplant l’écran, en répétant une répétition (de lui aussi une diffraction de Playtime) ;
- Yang Hao Min enfin propose une vidéo énigmatique, La genèse, où une surface ronde (on pense d’abord à un ventre enceint) se trouve peu à peu recouverte de peinture, comme une création du monde.
Par ailleurs, le MRAC présente (jusqu'au 22 janvier) une exposition de Dado avec en particulier un riche et sombre cabinet de dessins, dont ceux-ci, datant des années 50s et récemment retrouvés.Cette photographie de Patrick Faigenbaum montre le Domaine des Orpellières, atelier de Dado dans l’ancienne cave vinicole de Sérignan, un tourbillon
d’objets et de peintures, qui est, semble-t-il, en danger de disparition.Photos 1, 3, 4, 5, 6, 9 et 10 de l'auteur; photos 2, 7 & 8 courtoisie du MRAC. Dado étant représenté par l'ADAGP, la photo de ses dessins sera ôtée du blog à la fin de l'exposition.