Ca y est, la confrontation tant attendu Tristane Banon-DSK a eu lieu. DSK en est sorti tout sourire sans dire un mot, quant à Tristane Banon, elle s'est exprimée jeudi soir sur TF1, le visage triste et défait. Et quoiqu'on en ait très peu parlé dans les médias, le tout politique ose lui tirer son chapeau. On sentait l'émotion de cette jeune femme qui disait encore il y a quelques temps " moi, je rase les murs, [pendant que] cet homme est accueilli en héros par mon pays ". Et pourtant, si l'on compare les deux interventions qui ont eu lieu à quelques jours d'intervalle, on voit dans quel camp l'honnêteté se trouve. Face au jeu d'acteur sur-préparé de DSK dont personne n'a été dupe, répondait une honnête et triste franchise d'une femme meurtrie et blessée. Que l'accusation soit vraie ou fausse, là n'est (presque) pas la question. Nous avons vu d'un côté un homme qui ne semblait rien regretter, dur derrière son masque, et de l'autre une femme dont la vie a été ravagée. D'un côté, nous avions l'ancien directeur du FMI, favori des présidentielles françaises, qui exagérait ouvertement et devant 12,5 millions de Français, le contenu d'un rapport et de l'autre une romancière qui osait rétablir la vérité.
Car Tristane Banon, quand elle déclare que DSK a " menti ", ou du moins exagéré, le contenu du rapport du procureur, Tristane dit vrai. Le tout politique aussi est allé lire ce rapport du procureur et en anglais, s'il vous plaît, afin d'avoir la version originale.
Personne ne le disait, aucun média n'a osé le mettre en valeur (à part l'émission C dans l'air sur "la légèreté de Dominique" qui mérite "bravo" et "hourra". Des extraits de l'émission sont encore visible sur http://www.france5.fr/c-dans-l-air/videos/33954): DSK a légèrement, si l'on peut dire, modifié la réalité en sa faveur. Et voici quelques exemples de contre-vérité que Monsieur Strauss-Kahn s'est permis de brandir avec force :
- DSK sur TF1 : " le rapport du procureur dit quoi ? (...) il dit : Nafissatou Diallo a menti sur tout. (...) Elle a menti sur les faits. " Rapport du procureur : "En bref, la plaignante a donné des versions changeantes et inégales des évènements entourant l'agression présumée, et en conséquence, nous ne pouvons pas être suffisamment certains de ce qui s'est réellement passé le 14 mai 2011 et quelle version de ces faits la plaignante donnerait au procès. (...) Dans pratiquement chaque entretien essentiel avec le procureur, malgré les encouragements à être simplement honnête, elle n'a pas été honnête, de manière signifiante ou insignifiante, la plupart des fois sur des faits afférant à son passé et quelques fois sur les circonstances de l'incident lui-même. (...) Elle a donné au procureur et au grand jury des versions de son actoin juste après la rencontre avec l'accusé qu'elle admet désormais comme étant fausse."
- DSK sur TF1 : " [Ce que le procureur dit, c'est] : " Puisqu'il n'y a plus aucune accusation qui tienne, ni preuve matérielle, ni déclaration crédible, alors on ne peut que renoncer " " Rapport du procureur : "la nature et le nombre des mensonges de la plaignante nous laissent incapable de créditer sa version des évènements au-delà d'un doute raisonnable, quelque puisse être la vérité sur la rencontre entre la plaignante et l'accusé. Si nous ne la croyons pas au-delà d'un doute raisonnable, nous ne pouvons demander à un tribunal de le faire."
Et une note, qu'on a facilement occultée, vient encore préciser la pensée du procureur : "Ce propos explicite les fondements de notre demande de non-lieu. Il ne prétend pas faire de conclusions factuelles. Plutôt, nous n'avons simplement plus de certitude, au-delà d'un doute raisonnable, que l'accusé est coupable."
En un mot, DSK n'est pas blanchi et il ne le sera jamais. Le procureur insiste à de nombreuses reprises sur le "doute raisonnable" qui reste dans cette affaire. Et ce doute, DSK ne pourra jamais sans défaire, car il reste aussi dans l'esprit des Français.
Quant à Nafissatou Diallo, le procureur ne dit pas "qu'elle a menti sur tout". Elle a menti sur son passé, ce qui, soit dit en passant, n'a aucun rapport avec l'affaire en question, et sur ce qui s'est passé après et peut-être avant l'agression en elle-même. Mais ce qui s'est réellement passé dans la suite 2806, personne ne le sait sauf la plaignante et l'accusé. Quant au procureur, il n'en sait rien, pas plus qu'un autre, et il met un non-lieu, parce qu'un simple"doute" profite naturellement à l'accusé ce qui est bien normal dans un pays démocratique et de présomption d'innocence. Est-ce pour autant un blanchiment? Non.
Que ce soit Tristane Banon, accusatrice elle aussi, de DSK, qui ait à dire ces choses simples alors que tous les journalistes ont lu le rapport du procureur, pose encore des questions sur les liens entre les médias et le pouvoir. Les journalistes ont pour rôle de défendre la vérité, non de la cacher. Si les médias sont le 4e pouvoir, ils se doivent d'être un pouvoir indépendant et honnête.
Quant à DSK, que va-t-il devenir après cette affaire? Il a dit qu'il avait consacré toute sa vie à la vie publique et certainement a-t-il envie de revenir. Homme politique? Peut-être le redeviendra-t-il mais pas avant longtemps. Economiste? En ermite encore pendant quelques temps. Comédien? En ce domaine, une longue et brillante carrière lui est certainement assurée!