Quelle serait la place de Delitoon sur le marché de la BD numérique ?Après cinq ans de réflexion, Delitoon serait un des outils qui vient accompagner les éditeurs et les auteurs dans cette démarche de création et d’approche d’un lectorat. Aujourd’hui je souhaite de plus en plus marier le papier et le digital, sans les opposer, en mettant au cœur de la création l’auteur et le travailéditorial.
Qu’apporteriez-vous de plus ?Avec Delitoon, je souhaite associer des maisons d’édition et surtout des individus, des éditeurs qui ont envie de dialoguer avec ces nouveaux auteurs et de jouer au coaching à l’intérieur du site. L’obsession actuelle des maisons d’édition est la sauvegarde de leurpré carré, leurs marges, leur économie pour le bien de tous. Mais on en oublie le monde numérique qui est très large et qui peut demain nous submerger. Toutes les nouvelles générations vivent aujourd’hui sur Internet et Facebook. Il faut être présent au bon endroit pour dialoguer et partager leur langue. Il faut faire des sauts générationnels dans ses équipes pour aborder ce media. L’objectif de Delitoon est d’être au cœur du système.
Quelle place occupe la BD actuellement sur Internet ?Nous vivons dans un monde d’écrans et la bande dessinée n’y a pas encore trouvé sa place. Aujourd’hui avec Internet, consciemment ou inconsciemment, chacun d’entre nous « programme » son quotidien : lire un mail ou une actualité, voir un blog ou une vidéo. Si voir et partager une vidéo est évident,lire et partager une BD n’arrive que rarement, faute de programmes... On partage peut-être le goût pour une BD mais pas l’objet numérique. La BD est écrasée dans cet ensemble médiatique et peine à s’y installer en dehors de petites expériences dépassant rarement le cercle des amis.
Comment modifier cette situation ?Il faut donc faire sa place dans cet univers médiatique et programmer des événements de bande dessinée, les apporter dans le format numérique, ne plus se soucier de la technologie en cherchant à inventer un nouveau format numérique, mais en imposant la narration classique de la bande dessinée. Il faudrait offrir 5 minutes de bonheur de lecture par jour. J’observe sur Delitoon que les gens viennent et reviennent quotidiennement et passent 10 minutes à lire, ce qui n’est pas mal du tout. L’objectif est d’en faire non seulement ce lieu d’exploration, mais aussi de communication pour les éditeurs papier. Ils doivent y venir pour diffuser, et faire découvrir leurs œuvres.
Quel sera le modèle économique de Delitoon ?Il est très objectivement en construction. Il est écrit et va être mis en place mais il est susceptible d’évoluer. En fait, personne ne connaît le modèle et il n’y a sans doute pas un modèle unique mais un ensemble de modèles. La solution est probablement d’attacher un certain nombre de modèles côte à côte.
Avec pour premier modèle la publicité ?Oui, elle accompagne le contenu à lire. J’espère qu’à la manière d’Allociné sur le cinéma, cette publicité communiquera essentiellement sur la bande dessinée. On travaille pour le moment avec une régie généraliste et on cherche une régie plus spécifique pour trouver des formats plus intelligents, adaptés à la bande dessinée, et pour correspondre aux budgets des éditeurs qui ne sont pas importants, mais qui, mis bout à bout, font une économie réelle. Il s’agit de capter cette économie et la rendre rentable, en proposant à un lectorat acquis une communication qui va les informer et renforcer leurs envies d’acheter.
Le deuxième modèle sera-t-il une partie payante ?Oui. Au premier chef, ce sera la vente d’albums papiers. En partenariat avec Amazon une librairie a été ouverte. Elle se concentre sur les BD proposées sur Delitoon, mais s’ouvre aussi sur l’ensemble du catalogue proposé par les éditeurs sur Amazon, en papier dans un premier temps et numérique dans un temps prochain. A terme, j’espère aussi un partenariat avec Izneo pour la lecture de BD en format numérique dans le site Internet, mais cela nécessite une adaptation technologique pour automatiser la mise en ligne du catalogue sur Delitoon. Pour le moment le marché n’est pas encore assez installé pour décider qu’Izneo sera la voie royale. C’est la voie incontournable puisqu’ils ont le catalogue de tous les éditeurs, mais sur le plan technologique et de partenarial, ce n’est pas encore prêt.Propos recueillis par Manuel F. Picaud en octobre et novembre2011
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