« Longtemps je me suis douchée de longues heures. »
C’est ce qu’Emilia, protagoniste de Bonsaï, deuxième film du réalisateur chilien Cristian Jimenez, aurait pu raconter dans sa vieillesse, si vieillesse il y eut.
Car le film révèle rapidement que la longue liane d’Emilia rompra plus vite sous le poids de la vie que Julio, le placide roseau.
Huit ans après leur idylle à la faculté, idylle pendant laquelle ils lisent au lit des chefs d’œuvre de la littérature, ils se sont perdus de vue.
Julio s’escrime à transmettre son goût des humanités à des jeunes bourgeoises, lors de cours particuliers et accorde beaucoup d’attention à son bonsaï. Moins peut-être à Blanca, sa voisine, traductrice, avec qui il entretient une liaison, essentiellement physique. Mais il n’ose lui avouer que l’auteur célèbre dont il aurait pu dactylographier le roman lui a préféré des petites mains moins chères. Empêtré dans ses mensonges, il achète des cahiers semblables à ceux utilisés par l’auteur renommé et se met en tête d’écrire lui-même un roman. Il s’inspire fortement de son histoire avec Emilia, de leur complicité amoureuse et littéraire et décrit jusqu’aux trèfles qu’il lui avait offerts pour son anniversaire, trèfles qui n’ont pas porté chance à leur amour et qui comme lui s’est flétri.
Julio croise par hasard l’ancienne colocataire d’Emilia : elle lui donne le numéro de téléphone de son amour de jeunesse. Il essaie de l’appeler mais raccroche sans se douter que la prochaine fois qu’il en trouvera le courage, Emilia se sera inscrite définitivement parmi les abonnés absents.
Au cours de leurs rendez-vous ancrés dans le prosaïque, Blanca lit les cahiers et aide Julio à les transcrire. Elle trouve le texte moins bon que les précédents du prétendu auteur et critique sans le savoir les souvenirs de Julio, écrivain en herbe qui peine à séparer le bon grain de l’ivraie.
Le film va et vient entre l’âge d’or étudiant et l’âge terni adulte. Il s’autorise des fantaisies comme celle-consistant à suivre Julio sur son vélo, minuscule dans le flot de circulation de la ville et à le repérer au moyen d’une flèche.
La pluie rythme le film, tant dans le son que par les images, reflet de la météo de la ville choisie pour le tournage. Mais parfois la douche se substitue à la pluie, comme dans cette scène irréelle et fantaisiste où l’héroïne porte à ses lèvres une tasse de thé alors que l’eau issue du pommeau de la douche coule et dégouline le long de son corps.
Des plans de l’introduction incluent de grands arbres, comme une forêt qui cache dans un premier temps les jeunes pousses fanées, tout ce qui n’a su croitre, s’élever, puiser de la sève dans la terre pour aller chatouiller les cieux.
Et malgré ce constant insidieux et quasi permanent d’échec, la mélancolie reste douce, douce-amère.
Cet hybride d’amour, de littérature et de botanique qui refuse d’être transplanté dans un terreau mature et se complaît dans l’argile séchée du temps de la presque innocence perdu à jamais ne pouvait que me séduire et me toucher.
L’omniprésence de Proust imposait une madeleine, la chlorophylle une couleur verte tant soit peu naturelle et l’ombre du bonzaï, une touche de délicatesse naturelle incarnée à la perfection par le thé matcha, écho à l’attachement des protagonistes pour ce breuvage.
J’ai emprunté la recette des madeleines à Sofi la gourmande
http://sofilagourmande.canalblog.com/archives/2008/08/26/10193553.html
Et je dois dire qu’en ayant pas mal roulé ma bosse (warf, ouarf) au pays enchanté de la madeleine, j’avais rarement obtenu rebondi aussi replet.
Ingrédients :
- 225 g de farine
- 175 g de sucre
- 100 g de beurre fondu
- 1 paquet de levure en poudre
- 4 œufs
- 1 c. à soupe de pâte à pistache
Pour la coque délicate
-100 g de chocolat blanc
- une pincée (ou plus selon le goût) de thé matcha
Préchauffer le four à 240°C.
Battre les œufs entiers et le sucre. Ajoutez la farine et la levure tamisée ensemble, puis le beurre fondu. Et enfin la pâte à pistache de façon à obtenir un appareil bien homogène. Verser une grosse cuillère à soupe de pâte dans chaque alvéole du moule à madeleine.
Enfourner 4 min à 240°C puis baisser le four à 180°C en continuant la cuisson pendant 4 min.
Démouler les madeleines.
Faire fondre le chocolat saupoudré de thé matcha avec un peu d’eau au four à micro-ondes.
Une fois le chocolat fondu, verser dans les empreintes à madeleine en essayant d’obtenir une fine couche, remettre les madeleines et bien appuyer.
Réserver au moins une heure dans le réfrigérateur.
Déguster en essayant de retrouver le goût des belles et bonnes choses.