À la tête d’un gouvernement de technocrates, la tâche de Mario Monti, le nouveau premier ministre italien, se présente comme ardue. Une remise à plat radicale du système économique italien et de grands sacrifices seront nécessaires.
Un article d’Open Europe
Mario Monti est donc le nouveau premier ministre italien. C’est au cours de la conférence de presse du 16 novembre (que nous avons suivi sur Twitter @Openeurope) que les noms des personnes formant son cabinet ont été annoncés.Monti a choisi une double casquette puisqu’il sera, à la fois, premier ministre et ministre de l’économie par intérim. Comme prévu, à cause des résistances du parti du premier ministre sortant, Silvio Berlusconi, et du Partito Democratico (parti de centre-gauche), le nouveau gouvernement ne comportera, chose exceptionnelle, aucun politicien. Comme l’avait suggéré un média italien ces derniers jours, le cabinet de Monti sera très réduit, avec seulement douze ministres (précisément onze, plus Monti lui-même, en tant que ministre de l’économie), ainsi que cinq Secrétaires d’État.
Certains ministères-clés (travail, santé, justice et économie) ont été confiés à des intellectuels. Un banquier, Corrado Passera, deviendra le ministre du développement économique, tandis que l’ambassadeur italien aux états-Unis, Giulio Terzi di Santagata, sera en charge du ministère des affaires étrangères. Parmi les postes de Secrétaires d’État, le ministère des affaires européennes a été confié à Enzo Moavero Milanesi, qui fut l’assistant le plus proche de Mario Monti durant les années où ce dernier était à la Commission européenne.
Le nouveau cabinet a prêté serment le 16 novembre après-midi. Durant sa courte conférence de presse un peu plus tôt dans la journée, Monti a refusé de répondre aux questions à propos des actions envisagées par son gouvernement, notamment sur la réforme du système de retraite (la commission européenne a déjà demandé plus d’efforts de la part de l’Italie) et sur l’introduction d’un impôt sur la richesse, comme moyen pour réduire le fardeau fiscal qui pèse sur les salariés et les entreprises. Des détails supplémentaires devaient être disponibles à partir du lendemain, au moment du discours du nouveau premier ministre devant le sénat italien, lors d’un premier vote de confiance.
À n’en pas douter, le cabinet de Super Mario inclut quelques personnes expérimentées. Toutefois, cela ne devrait pas masquer le fait que – de la même manière que le gouvernement d’unité nationale de Lucas Papademos en Grèce – nous examinons un gouvernement non élu, dont les mandats demeurent extrêmement incertains. Il faut considérer le fait qu’il n’y a pas un seul politicien dans le gouvernement italien actuel. Cette composition fait émerger deux questions :
Combien de temps le nouveau gouvernement va-t-il rester en fonction?
C’est une question dont personne ne connaît la réponse. Les partis italiens sont divisés sur le sujet. Bien qu’avant d’accepter la fonction, Monti avait clairement annoncé qu’il « n’accepterait pas » de diriger un gouvernement, qui doit quitter ses fonctions avant 2013, date à laquelle les prochaines échéances électorales sont prévues. À la différence des électeurs grecs, qui savent depuis le début qu’ils seront appelés à élire un nouveau gouvernement en février, les Italiens ignorent si des élections doivent prochainement avoir lieu. Cela pourrait conduire à une situation plutôt inconfortable alors que les citoyens italiens sont appelés, à se serrer davantage la ceinture, par un gouvernement non-élu. Ce dernier qui fut mis en place dans la précipitation et sous le joug des chefs d’États français et allemand ainsi que celui des fonctionnaires non élus de Bruxelles.
Qu’est-ce-que ce gouvernement est précisément censé faire?
Les choses devraient s’éclaircir dans les prochaines heures. Pour l’instant, le parti de Berlusconi a décidé de soutenir le gouvernement dirigé par Monti à la condition qu’il respecte les mesures proposés par Il Cavaliere dans une lettre qu’il avait adressé aux autres leaders européens à la fin du mois d’octobre. Toutefois, les partis centristes et de centre-gauche seraient particulièrement désireux de donner au nouveau gouvernement un mandat plus large, ce qui impliquerait, entre autres, de modifier la loi électorale italienne avant 2013.
Il est nécessaire que ces deux aspects soient rapidement clarifiés. Il se peut que l’Italie prenne des années avant de sortir de l’ornière. Une remise à plat radicale du système économique italien et de grands sacrifices seront nécessaires. Ceux-ci ne pourront se faire qu’avec un gouvernement qui aura reçu un mandat clair de la part du peuple. Sinon, ce que les médias italiens célèbrent aujourd’hui comme un tournant dans l’histoire de leur pays pourrait rapidement se transformer en un mauvais présage pour la démocratie italienne et le futur de l’Europe.
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Sur le web.
Traduction : Florian H. pour Contrepoints.