Lieu commun.
Formule rebattue, vidée de son sens.
Lorsqu'on entend parler de tarte à la crème, on imagine de suite les batailles où la tarte fidèlement
accompagnée de sa crème vole à travers la pièce (scènes fréquentes dans les anciens films burlesques), ou les entartages du sieur Noël
Godin, Belge de son état et entarteur invétéré.
Mais reconnaissez que le lien avec un lieu commun n'est pas du tout évident à imaginer. Et c'est normal, car
ce n'est pas là qu'il est.
Connaissez-vous le jeu du
corbillon ?
Certainement pas, car il est complètement passé de mode. Mais à l'époque de Molière, lorsqu'il était en
vogue, c'était un jeu où il fallait répondre à une question en citant le plus grand nombre d'objets se terminant par 'on', donc rimant avec corbillon.
Un premier élément de l'histoire se trouve dans "L'école des femmes" où Arnolphe explique que la femme idéale doit être d'une si grande ignorance, qu'au jeu du corbillon, elle doit
répondre "tarte à la crème" à la question "qu'y met-on ?".
On peut parfaitement être ou ne pas être d'accord avec cette vision de la femme idéale, mais il n'y a jusque
là rien qui explique réellement l'origine de notre expression.
Sauf qu'ensuite, dans "La critique de l'école des femmes", Molière, dans un court dialogue entre le Marquis,
Dorante, Elise et Uranie, réussit à leur faire prononcer plus de dix fois "tarte à la crème" .
Dans cet effet comique de répétition la "tarte à la crème" est une locution dont les interlocuteurs se
repaissent de façon stérile, croyant qu'elle donne plus de poids à leur discours.
C'est de ces répliques que vient le sens de formule creuse, de lieu commun qu'a notre expression.
Mais pourquoi une tarte à la crème au lieu d'un ornithorynque ou d'un fox à poil dur, me
direz-vous ?
Eh bien cela vient probablement de l'habitude qu'avaient les spectateurs de l'époque de lancer des pommes
cuites ou des tartes aux pommes (et à la crème) sur les acteurs lorsqu'ils étaient mécontents.
Et il faut bien reconnaître que jeter des ornithorynques sur des mauvais acteurs, ça a toujours été moins
facile à faire que jeter des tartes à la crème.
Source http://www.expressio.fr