Comment virer une femme syndiquée de retour de congé maternité :
Au boulot n°45
« Je suis en mesure de vous donner un certain nombre de préconisations destinées à permettre d’atteindre l’objectif de procéder au licenciement de la salariée dont nous avons parlé lors de notre dernier entretien ». Ainsi commence la lettre d’un avocat au patron d’une société de Bourse, pour lui expliquer comment se débarrasser d’une femme de retour de congé maternité, par ailleurs salariée protégée.
« Compte tenu des difficultés à obtenir de l’inspection du travail l’autorisation de licenciement d’une salariée protégée, adressez d’abord des courriel, lettre d’alerte ou de « recadrage » à la salariée. (…) Surtout n’évoquez pas son absence pour congé de maternité. (…) Préparez le terrain par une relative accumulation de faits fautifs à son retour. Puisque le motif économique est a priori à exclure, soulignez ses insuffisances à son poste de « gestionnaire administratif ». Contrôlez quotidiennement l’exécution de ses tâches pour mieux stigmatiser par écrit (courriel, note de service et autres) tout manquement, toute manifestation d’insuffisance, toute absence ou retard. Faites-le de façon proportionnée en prenant soin de garder toute preuve écrite matérialisant la réalité des faits. Je vous conseille de contrôler strictement ses horaires, un ou quelques retards ne sont pas suffisants, mais leur réitération pourrait opportunément constituer un motif de licenciement, ou compléter celui-ci. (…) Dans l’hypothèse d’un licenciement motivé par une insuffisance et/ou une incompétence professionnelle, les juridictions apprécient que l’employeur ait mis en place un ou plusieurs plans d’action dit « d’amélioration des performances » sur quelques semaines voire quelques mois, si vous avez le temps.Cela montre votre bonne volonté et ses carences. La doctrine et la jurisprudence sont plus sévères dans l’appréciation des motifs de licenciement lorsqu’il s’agit de salariés protégés, elles accordent du crédit aux évaluations professionnelles a fortiori si elles ont été contradictoires et cosignées par le personnel. Trouvez des témoins contre elle parmi le personnel. Relevez les erreurs sur ses derniers travaux. Montrez qu’elle n’a pas été capable de répondre dans un délai normal à un certain nombre de demandes, cristallisez sur une faute précise, significative. (…) Sachez que l’inspection du travail dispose d’un pouvoir d’investigation très important dont elle ne se prive pas d’user, je confirme me tenir à votre disposition pour un rendez-vous avec les « encadrants » de la salariée afin de les préparer à l’enquête contradictoire qui sera menée par l’inspecteur ».
Gérard Filoche