La loi a créé une présomption de responsabilité du représentant légal de la société lorsque la carte grise est établie au nom de la personne morale.
Mais de quelle responsabilité s’agit-il exactement ?
- Le dirigeant de société peut-il se voir retirer des points pour des infractions qu’il n’a pas commises ?
- Le dirigeant de société est-il redevable des amendes pour des infractions qui auraient été commises par des cadres ou des salariés de la société ?
La thématique des véhicules de fonction est une thématique récurrente tant les entreprises qui possèdent plusieurs véhicules immatriculés à leur nom sont nombreuses. D’où l’intérêt de s’arrêter un peu sur ces questions afin de mettre de l’ordre dans les esprits.
Rappel
Rappelons tout d’abord que le Code de la route a créé trois types de responsabilité :
- la responsabilité du conducteur du véhicule qui est nécessairement une personne physique ;
- la responsabilité du titulaire de la carte grise (certificat d’immatriculation) qui peut être soit une personne physique soit une personne morale ;
- la responsabilité du représentant légal (le dirigeant) d’une société ou d’une association personne morale.
S’agissant des deux dernières hypothèses on parle d’une présomption de responsabilité fondée sur le principe du propriétaire-payeur lui-même fondé sur un pari, souvent erroné, selon lequel le propriétaire du véhicule est aussi celui qui conduit le véhicule.
Si le postulat est parfois erroné pour les personnes physiques, il l’est encore plus souvent pour les sociétés qui mettent à disposition des salariés de l’entreprise des véhicules de société.
Retrait des points ou paiement de l’amende ?
Les poursuites seront engagées contre le représentant légal de la société lorsque l’infraction au Code de la route a été constatée, à distance, sans interception du véhicule.
C’est le cas par exemple du véhicule qui se fait flasher pour un excès de vitesse.
En effet, le système étant automatisé, les procès-verbaux de contravention sont dans ce cas systématiquement établis au nom du titulaire de la carte grise (certificat d’immatriculation), peu importe que cette personne soit, au moment du flash, le véritable conducteur du véhicule.
Le représentant légal de la société à qui appartient le véhicule verra alors sa responsabilité pécuniaire (responsabilité non pénale) engagée sans que les points puissent lui être retirés de son permis de conduire (responsabilité pénale).
Si toutefois des points étaient illégalement retirés sur le permis de conduire du dirigeant pour des contraventions qu’il n’a pas commise, il faudrait alors formuler une demande gracieuse au ministère de l’intérieur en exposant la situation puis le cas échéant saisir le Tribunal administratif d’un recours pour excès de pouvoir en demandant l’annulation de la décision de retrait de points.
En effet, ce n’est que lorsque le dirigeant de l’entreprise est personnellement poursuivi comme conducteur du véhicule qui appartient par hypothèse à la société que les points correspondant à la contravention au code de la route pourront lui être retirés de son permis de conduire.
Il est donc utile de connaître ses droits avant de se rendre aux services de police ou de gendarmerie en cas de convocation.
En effet, le but de la convocation est le plus souvent de savoir comment libeller les poursuites en fonction des déclarations qui seront consignées sur procès-verbal : au nom du représentant légal si le conducteur du véhicule immatriculé au nom de la société ne peut être identifié sur la photo et qu’aucun salarié n’est dénoncé, au nom du dirigeant s’il apparaît sur la photo qu’il était bien au volant du véhicule ou encore au nom du salarié dénoncé.
Comment s’exonérer ?
Au contraire des articles L121-1 et L121-3 alinéa 1 du Code de la route qui permettent aux personnes physiques de s’exonérer de leur responsabilité pénale (retrait de points) en démontrant notamment qu’elles ne sont pas l’auteur de l’infraction sans avoir à dénoncer qui que ce soit, l’article L121-2 du même Code restreint pour le représentant légal les moyens de s’exonérer de sa responsabilité pécuniaire en ne lui permettant que de démontrer un cas de force majeure ou, dit le texte, de fournir les éléments permettant d’identifier l’auteur véritable de l’infraction.
La jurisprudence en a tiré des conséquences pratiques.
Ainsi, seul le représentant légal de la société est redevable de l’amende de sorte qu’aucune délégation de pouvoir à un salarié de l’entreprise ne saurait l’exonérer de sa responsabilité (en ce sens Cass. crim. 13 octobre 2010, Bull. crim. n°159).
En outre, le fait que le représentant de la personne morale ait changé postérieurement à la commission des faits n’est pas un moyen d’échapper à sa responsabilité, peu important les circonstances postérieures à l’infraction (en ce sens Cass. crim. 2 septembre 2010, Bull. crim. 2010, n°219).
Précisons enfin que lorsque le véhicule est loué à un tiers, l’article L121-3 alinéa 4 du Code de la route dispose que la responsabilité pécuniaire incombe au locataire, qu’il s’agisse d’ailleurs d’une personne morale ou d’une personne physique.
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