Entretien avec LE chef boulanger historique du CFA BPF : Monsieur Bernard Comboroure

Publié le 17 novembre 2011 par Cfabpf
Monsieur Bernard COMBOROURE
Formateur boulanger au CFA BPF de 1996 à 2002
Bonjour Monsieur Bernard Comboroure !

Comment vas tu ? Ca fait plaisir de te revoir en boulanger, j’ai appris que tu étais de retour dans la formation, plus précisément au CFA de Livron dans la Drôme. Te voilà donc de retour chez toi dans ta région, dans ta très belle région même… Et donc de retour dans la formation. Cela te manquait de former de futurs jeunes boulangers ?


Oui, j’avais le souhait de revenir dans la formation. Et mêmepour tout dire : à l’INBP. Mais la vie personnelle est aussi à prendre en compte. Surtout lorsqu’on devient grands-parents et que 800 km nous séparent les uns des autres.

Donc si ce n’est l’INBP, où aurais-je envie d’enseigner ?

Dans ma région d’origine où je suis revenu bien sur !

Et « la cerise sur le gâteau » (si je puis dire), serait bien sur le « CFA de ma vie professionnelle » :

-celui qui m’a formé à son ouverture en 1975, comme pré-apprenti et apprenti pâtissier puis apprenti boulanger,

-celui qui a formé mes apprentis boulangers lorsque j’étais patron,

-celui pour lequel j’ai été jury d’examen pendant 8 ans,

-et surtout, celui qui m’a donné l’envie de transmettre mon savoir.

Et me voilà donc à mon nouveau poste depuis cette rentrée 2011.

Tu as donc réalisé une belle boucle.

Alors racontes moi un peu ton parcours depuis que tu as quitté le CFA BPF, il y a maintenant 8 ans. Beaucoup d’anciens de tes élèves (dont je suis d’ailleurs) me posent la question !!!

Nous sommes partis de Rouen avec Evelyne pour aider notre fille et notre gendre à réaliser leur rêve : acheter un restaurant à la montagne.

Il était situé à La Norma, station de ski en Savoie dans la vallée de la Maurienne.

Une bonne expérience dans le monde de la restauration.

Je suis passé du service à la cuisine avec beaucoup de bonheur et j’ai beaucoup appris.

On avait prévu d’y rester 4 ans et ce fut 5 années en Savoie.

L'équipe de La Norma !

Bernard et Evelyne avec leur fille et leur gendre

Ensuite, comme je l’ai déjà dit, je pensais revenir vers la formation.

J’ai alors postulé dans plusieurs CFA de ma région sans réponses positives.

C’est alors que s’est présentée à moi la possibilité de devenir commercial en meunerie.

Mon cousin est Chef meunier à la Minoterie TARASCON à Avignon et ils cherchaient un technico-commercialpour démarcher le Vaucluse.

C’était parti pour un nouveau métier qui me permettait de remettre les pieds dans un fournil. Youpi !

Pendant 3 ans, j’ai « tourné » sur le Vaucluse et le sud de la Drôme pour vendre de la farine.

Expérience très enrichissante car j’ai beaucoup appris au contact des Artisans.

J’ai vu des choses très intéressantes que je conseillerai sans problème et d’autres : à ne surtout pas faire.

J’avais un portefeuille d’une cinquantaine de clients, plus environ 160 boulangers que je démarchais 1 à 3 fois par an.

Je prenais régulièrement la « casquette » de technicien boulanger pour faire des démos ou donner des conseils.

J’ai également passé beaucoup de temps dans le moulin. Là aussi j’ai appris plein de choses que je ne demande qu’à transmettre.

Puis un jour j’ai appris que le CFA de la Drôme cherchait un formateur boulanger alors…

Bref, pour ceux qui me connaissent, je vous laisse imaginer tout ce que je vais pouvoir raconter à mes apprentis…

Restaurant de Bernard à la Norma

Comme on peut le constater tu as touché un peu à tout, restauration, meunerie, formation. Qu’as tu retenu de ces différents métiers et lequel t’a apporté le plus de satisfaction personnelle, pourquoi ?


Bien qu’ayant des connaissances en traiteur,la restauration m’a permis de découvrir le métier de cuisinier,avec ses techniques de fabrication et de cuissons et surtout « ses coups de feux ».

J’ai aussi beaucoup apprécié mon passage « au service ». Devinez pourquoi ?

Quant à la meunerie, elle m’a permis de mieux connaitre le blé, cette céréale si importante pour nous.

De mieux comprendre certaines réactions de nos farines en boulangerie.

J’ai également appris à vendre de la farine et à transmettre certaines de mes connaissances à des Artisans.

Mais la formation est vraiment ce qui me plait le plus. J’aime la boulangerie/pâtisserie et pour moi, le Métier le plus intéressant et celui de transmettre de ce que j’aime. Quand je suis dans un labo avec des élèves, qu’ils sont intéressés et qu’ils font de beaux produits je suis Heureux.

Je rappelle que tu étais le formateur en boulangerie du CFA BPF de 1996 à 2003, je crois. Tu as donc connu le tout début du CFA BPF.

Cette année le CFA BPF fête ses 15 ans… C’était quand même une aventure au début, car cette formation était vraiment nouvelle, innovante et atypique.

Raconte nous un peu le démarrage de ce projet et son évolution, comment es-tu arrivé formateur au CFA BPF, comment as-tu ressenti ces premières années qui devaient être passionnantes, quels souvenirs en as-tu 15 ans après ?

Je suis arrivé à l’INBP en Sept 94 comme stagiaire au BP/BM boulanger.

J’ai suivi les 6 mois de formation et à l’issue de ce stage, Luc BOULET alors responsable pédagogique m’a proposé de former les apprentis du CFA BPF dont la 1ère session devait démarrée en Sept 96.

Entre temps, on m’a proposé de travailler à l’INBP, mais avec un groupe de sourd muets du Centre de l’Enfance de Canteleu que j’ai formé à la boulangerie.

Ca m’a laissé le temps de préparer les cours pour le CFA BPF. C’était très intéressant car il fallait adapter les cours CAP boulanger habituellement dispensés en 2 ans,au niveau post BAC des futurs jeunes apprentis dont la formation allait se dérouler sur 1 an seulement.

Luc BOULET m’a beaucoup aidé. C’était une première.Nous étions pilotes en la matière.

Puis vint la première session : 9 jeunes dont Laurent GUILBAUD.

Rapidement nous nous sommes rendu compte que cette formation avait son intérêt.

Les jeunes venus de leur plein gré se former étaient motivés. Les contraintes du métier ne leur faisaient pas peur. Ce qu’ils voyaient c’était les débouchés possibles après leur formation.

Pour les entreprises qui les accueillaient, la crainte que ces jeunes avec la tête bien pleine aient deux mains gauches s’est vite dissipée.

Une première session qui s’est bien passée avec de bons résultats.

Satisfaction générale :

-le contenu et le niveau des cours correspondaient aux attentes des jeunes,

-motivation des jeunes en entreprise

La deuxième session s’est rapidement remplie. C’était parti.

1 ère promo du CFA BPF - 1996/97

Avec le recul, penses tu que cette formation est toujours adapté au marché du travail actuel en boulangerie, a t-on toujours besoin de boulanger/pâtissier issu du CFA BPF ?


Je pense qu’elle est bien adaptée car la boulangerie de demain demandera non seulement d’avoir de très bonnes compétences professionnelles, mais aussi des compétences intellectuelles.

Le métier s’estprofessionnalisé.

Les jeunes apprentis CFA BPF viennent à l’INBP avec un niveau déjà bon, une motivation et souvent un projet d’avenir. Au CFA ils ont un programme relativement complet dans le domaine professionnel qui leurs donnent les armes pour être bons en entreprise et plus tard pour réaliser leurs projets. Cette formation doit être améliorée par de l’expérience. Elle sera acquise en passant dans plusieurs entreprises et si possible dans différentes régions.

Les concours sont également un moyen d’échange de connaissances et de progression importante.

Je n’oublie pas qu’avant d’enseigner au CFA BPF tu étais artisan boulanger, propriétaire de 2 boulangeries pendant (15 ans ???).

Quel(s) conseil(s) de vieux routard peux-tu donner à ces jeunes qui se lancent dans l’installation en boulangerie ou qui hésitent encore?

Il y a quelques décennies, il suffisait de faire des bons produits pour acquérir en quelques années une bonne réputation, une bonne clientèle et de modestes revenus.

Aujourd’hui la professionnalisation de la Boulangerie amenée par un nouveau type de magasins « franchisés » a amener une autre concurrence. Ils sont bien situés, ils ont du parking, ils font du marketing, ils savent bien vendre mais ils ont un point faible : le suivi de Qualité : ils manquent de professionnels à la production.

Pour les jeunes souhaitant s’installer aujourd’hui il faut être bon techniquement.

Bien maitriser les panifications longues et le travail avec des farines de Traditions et Biologiques.

Il faut être rigoureux et constant. Il faut former son personnel, avec l’aide des CFA, et le respecter car le point faible de beaucoup d’entreprise et le personnel de fabrication mais aussi de vente.

Il devra être Boulanger,Pâtissier, Traiteur.

Il faudra régulièrement innover en amenant de nouveaux produits qui susciteront l’intérêt de vos clients.

S’il fait attention à ces règles, il a toutes les chances de réussir dans sa vie qu’Artisan Boulanger.

Je crois beaucoup dans l’avenir de la nouvelle génération de BOULANGER

Raconte nous un ou deux « bons » souvenirs marquants que tu as vécu avec le CFA BPF et qui te viennent immédiatement à l’esprit ?

Les bons souvenirs sont nombreux :

La passion et les projets des jeunes.

Les visites en entreprise et les Boulangers satisfaits des Apprentis du CFA BPF.

Des courriers et des mails venant de toutes les latitudes.

Le plaisir des jeunes en démonstration devant un groupe de jeunes allemands à Ansbach, Hanovre ouCracovie, les démos dans les salons.

Les nombreuses réussites de carrières après la formation

Le titre de Boris PORTOLAN et Thomas MARIE au concours "Un des meilleurs ouvriers de France" (MOF).

Pour les anciens du CFA BPF, on se rappelle tous de ta femme Evelyne, qui au tout début s’occupait de l’aspect administratif du CFA (inscriptions, etc…), que devient-elle ?

Elle travaille à la Maison de l’Industrie à Valence.

Eh oui, elle a tourné sa veste. Passer de l’artisanat à l’industrie…

Plus exactement, elle est gestionnaire administrative à l’ADEFIM Drôme-Ardèche qui est un organisme équivalent au FAF dans la boulangerie. Elle gère les dossiers de formation des salariés des entreprises de la métallurgie du sud Ardèche.

Le mot de la fin :

En choisissant la Boulangerie vous avez opterpour un métier offrant de belles perspectives d’Avenir.

C’est un Métier passion.

Il est très prenant et demande beaucoup de concessions. Il ne peut pas être fait à moitié.

Il permet les voyages, l’aventure.

Il permet l’installation, être son propre patron.

Il permet l’innovation,

Et il vous amènera beaucoup de Plaisir.

Merci Bernard de cet entretien très sympa, cela plaisir je pense aux anciens de tes apprentis d'avoir des nouvelles de ta part. A bientôt ! Laurent