Avant d’entrer dans le vif du sujet, nous tenons à faire part de notre interrogation quant à l’utilité de cette audition et de l’existence même de ce groupe, puisqu’un amendement, déposé par M. Baguet, à une loi, dite Warsmann, en discussion a été voté par le parlement le 12 octobre et qu’il autorise à déroger au Code du travail, en attribuant un repos journalier qui peut être soit supprimé soit réduit sans pouvoir être inférieur à 8h, ces 2 formulations nous semblant contradictoires ce qui prouve un vote sans concertations ni grande réflexion. Les parlementaires et le gouvernement montrent une bien piètre opinion de votre groupe et de ses membres, en faisant semblant de les faire réfléchir alors que la décision est prise. Nous faisons part également de nos inquiétudes quant à la composition du groupe qui laisse la part belle aux administrations et aux employeurs, qui ne comprend aucun représentant des salarié-es. Certes, vous allez recevoir toutes les parties intéressées, mais nous pensons qu’une concertation passe par le travail de toutes les composantes au sein du groupe. Ce fort déséquilibre dans la composition du groupe ne peut que nous rendre très inquiets quant aux recommandations que vous allez retenir.Pour cette audition de 30 minutes sur un sujet aussi vaste, nous avons choisi d’insister sur les 2 éléments que nous trouvons essentiels, et de les faire porter par des acteurs qui les vivent :• La séparation très nette entre le bénévolat (qui n’est pas le sujet de votre groupe) et le travail salarié qui doit s’effectuer dans le cadre des règles du Code du travail.• La réalité du secteur et de la situation des animateurs, et leur positionnement dans une société en pleine évolution qui demande de plus en plus l’intervention de salarié-es formés et qualifiés pour encadrer les jeunes et développer l’éducation populaire. Nous précisons que notre décision de contester le décret mettant en place le CEE, a été imposée par deux évolutions complémentaires qui orchestrent le recul du progrès social et la qualité de l’encadrement des jeunes et des activités qui leur sont offertes :• Nous déplorons une lente dégradation continuelle de la reconnaissance des droits des salarié–es, qui s’est accrue sous la pression de la concurrence pour baisser des tarifs sur le dos du personnel et des appels d’offres passés dans le cadre des Délégations de Service Public. De plus en plus, l’impression de devenir un personnel d’appoint s’est renforcée, incitant à aller devant les Prud’hommes pour faire valoir ses droits.• Nous ne pouvons pas accepter la volonté de tenter de légaliser ce qui est inadmissible par la mise en place du CEE dérogeant au Code du travail, CEE obtenu par des pressions d’un lobby ne supportant plus de perdre systématiquement aux Prud’hommes. Nous dénonçons le CEE qui :- n’accorde qu’un salaire correspondant à seulement 2,2 heures de SMIC par jour, ce qui est mieux que 2 mais ne change rien sur le fond, ne respecte pas le Code du travail et le Smic horaire et laisse la question des salaires en tête des revendications salariales des animateurs. Cette rémunération déjà dérisoire, se voit amputée des cotisations afférentes… alors qu’ils/elles ne bénéficieront pas des prestations liées à ces cotisations puisqu’il faut recevoir 200h de Smic pour bénéficier d’un trimestre de cotisation comptant pour la retraite : comment alors ne pas parler de vol ?- étend la possibilité à toute entreprise quel que soit son statut juridique et notamment aux entreprises à but lucratif (sociétés anonymes, S.A.R.L…) la possibilité d’employer des jeunes dans ces conditions, possibilité naguère réservée aux seules associations à but non lucratif, ce qui étend la précarité,- permet ce type de contrat pour s’occuper des personnes handicapées ayant pourtant besoin d’aide spécialisée et qualifiée… et incite les centres à fermer officiellement pendant l’été et à continuer de fait les activités en remplaçant le personnel qualifié par des personnes en CEE, qui ne touchent pas le Smic et ne sont pas soumises au respect du minimum de repos journalier fixé à 11h. Pourtant ni la charge de travail, ni la qualification requise ne sont compatibles avec le statut « d’animateur occasionnel » comme la loi qualifie ces emplois,- assure vouloir protéger en limitant ce travail à 80 jours par an, mais en se gardant bien de prévoir un décompte centralisé à l’inspection du travail ou dans la délégation locale Jeunesse et Sports, ce qui exclut tout contrôle. Un employeur peut exploiter un-e animateur/trice « occasionnel-le » toute l’année, quasiment chaque mercredi et chaque vacances scolaires, sans lui proposer un vrai travail. Nous n’avons pas hésité un instant à déposer ce recours contre le CEE. Certes, nous sommes collectivement un peu employeurs, par l’intermédiaire des activités mises en place par les CE, mais notre principale raison d’être se situe bien dans la défense des salarié-es et dans le respect de leurs droits. Toutes les organisations syndicales du secteur défendent les salarié-es, vous pourrez le constater sur cette plateforme unitaire de l’ensemble des organisations syndicales, élaborée en 2005 lors des discussions sur la mise en place du CEE. Depuis, nous avons reçu l’appui des associations de parents dont l’enfant, malheureusement, a été gravement blessé ou est décédé suite à un accident provoqué par la fatigue de l’animateur. Cette défense des salarié-es, et le respect de leurs droits, nous semblent incontournables. Si dans un deuxième temps, il s’avérait que cela représente un coût trop important, tous les partenaires concernés devraient se mettre autour d’une table afin que de la concertation naissent des solutions, dans le cadre de la solidarité nationale. Actuellement, déjà, ces séjours ne sont pas facturés au prix réel, des mécanismes d’aide existent et doivent être étendus. Nous refusons de faire l’impasse sur le fait que de plus en plus de structures « de colonies » sont rentrées de plein pied dans le circuit marchand, que de nombreux prestataires vendent leurs activités très cher, et que mal payer le personnel représente un moyen supplémentaire pour ces structures d’accroître leurs bénéfices.Ce chantage au surcoût n’est qu’un exemple souvent mis en avant que nous ne trouvons pas pertinent : avant la pression de la concurrence aux bas-coûts, la plupart des animateurs dormaient car un tour de rôle organisait la surveillance permanente. Ce qui était possible hier sans mettre en péril les centres, devrait l’être aujourd’hui et demain.La défense du statut de salarié-eNous ne parlons pas de bénévolat, que le législateur a écarté à juste titre pour le métier de l’animation. Pour nous, bénévolat signifie absence de rapport hiérarchique, de lien de subordination, de contrainte horaire. Un organisme voulant utiliser les services de bénévoles se doit de leur proposer des perspectives suffisantes pour les attirer.Nous sommes bien dans le cadre d’un travail salarié, devant respecter le minimum légal car il n’existe pas de statut de sous-salarié-e. Imaginerait-on qu’un-e enseignant-e, qu’un-e infirmier‑e, du fait de leur rôle important dans la société, ne soient quasiment pas payés et doivent assurer un service 24h/24 ? Accepter des dérogations au Code du travail, ce serait se lancer dans une spirale infernale de régression des droits et des salaires. La marchandisation du secteur associatif amplifierait une évolution régressive d’une société qui fait maintenant du CDI l’exception alors que l’également il devrait être la règle.Les employé-e-s de centres de vacances et de centres aérés sont des salarié-e-s comme les autres, ils/elles doivent bénéficier des mêmes droits : rémunération, formation, temps de travail…Le Code du travail permet de s’adapter aux contraintes et particularités des différents métiers. Une infirmière ne laisse pas tomber le patient dont elle s’occupe sous prétexte de l’heure de sa fin de service. Un agent de conduite d’un train ou d’un bus ne laisse pas en plan les usagers lorsque son horaire théorique est dépassé. Le Code du travail permet de réduire le temps de repos à 9h, de mettre en place une astreinte notamment de nuit et autorise même (ce que nous contestons, y compris sur le terrain juridique) des heures d’équivalence… à condition que ces dérogations soient encadrées, négociées et décidées dans la branche, avec des mécanismes de compensation qui n’existent pas aujourd’hui.Nous demandons l’application pleine et entière du Code du travail et ne refusons pas une négociation de branche afin de déroger sur quelques points limités accompagnés de compensation. Nous défendons le respect du salaire minimum au SMIC horaire, ce qui n’est plus le cas depuis une circulaire de 1964. Nous revendiquons le repos minimum à 11h, figurant dans une directive européenne sur l’hygiène et la sécurité, car tous ces éléments sont indissociables. Nous soutenons totalement la déclaration des droits de l’homme qui impose à l’État d’assurer le droit aux loisirs, au repos et à un salaire décent permettant de vivre. Le statut de l’animateurL’animateur ne demande pas un emploi 9h-12h et 13h-17h, mais des limites ne permettant pas de faire n’importe quoi, ce dont des organismes ne se privent pas. Le métier d’animateur demande de plus en plus des responsabilités importantes, impose des missions qualifiées qu’il convient de protéger par le respect du Code du travail et de payer normalement pour permettre une vie digne et la préservation de la santé. La professionnalisation s’est accrue par la volonté du législateur qui met en place des politiques de quartier et des acteurs de proximité sur le terrain. Les animateurs souhaitent le développement des centres mais pas au détriment de leurs salaires, de leurs conditions de travail et de la sécurité.Si beaucoup de jeunes acceptent ce boulot au salaire dérisoire, c’est pour se constituer une expérience professionnelle, un CV, mais ce n’est pas une raison justifiant un salaire au rabais. Ce très bas salaire ne permet pas aux jeunes issus des catégories les moins favorisées, d’accepter un tel travail, ce qui représente une discrimination inadmissible.Une réflexion sur l’animation s’impose car les « colonies » ont changé et il s’agit de plus en plus maintenant de faire par exemple le tour des parcs d’attraction en faisant dormir les « animateurs/trices » dans le bus 4 à 5 heures par jour. Le statut de l’animateur reste à élaborer afin de lui permettre, dans de bonnes conditions, de conserver une attention permanente pendant ses heures de travail.
Communiqué syndical : Contrat d’engagement éducatif
11 10 21 : Texte de l’intervention du SUD lors de l’Audience
Pétition en ligne ici http://www.petitionduweb.com/Petition_animation_les_salaries_et_le_public_en_danger-10252.html