RUSSIE – Le journaliste Andreï Soldatov décrypte les mécanismes de l’autoritarisme…
Pas facile de comprendre les mutations d’un pays qui vit son histoire à 100 km/heure. C’est pourtant ce à quoi Andreï Soldatov a décidé de se consacrer, expliquant simplement qu’«aujourd’hui, pour [lui], le travail, c’est tout».
A 36 ans, il vient de publier avec Irina Borogan, sa compagne, Les Héritiers du KGB. Enquête sur les nouveaux boyards (François Bourin Editeur). Un ouvrage qui décrit avec minutie la montée en puissance, depuis la fin des années 1990 du Service fédéral de sécurité (FSB, ex-KGB), dans l’appareil d’Etat russe.
D’abord paru aux Etats-Unis en septembre 2010, il est sorti depuis en Russie, où, malgré diverses tentatives d’obstruction, il fait un tabac. Ce succès n’étonne pas le journaliste qui voit monter chez ses concitoyens un sentiment de malaise depuis que Vladimir Poutine, actuel Premier ministre, mais aussi ancien président de 2000 à 2008, a annoncé en septembre dernier son intention de briguer la présidence à la suite de Dmitri Medvedev.
La démocratie confisquée
Nul doute qu’il sera réélu. Mais, parmi les étudiants, ce probable retour au Kremlin passe mal. «La jeunesse est lasse de ne pas se voir d’avenir dans ce pays où le pouvoir est totalement confisqué», observe Soldatov. Le FSB, hydre sans tête, mise en place aux seules fins d’un petit nombre soucieux de capter les immenses richesses du pays, n’aura donc pas totalement réussi son entreprise de destruction de tout «espace de réflexion, de dialogue».
Une première victoire pour Soldatov, qui continue de penser que la démocratie mérite qu’on travaille à sa défense. Même si cela lui vaut d’être licencié de toutes les rédactions où il passe. D’où lui vient cet entêtement? Peut-être de ce souvenir qu’il dit vivace: la chute de l’URSS en 1991, alors qu’il a 16 ans.
Fils d’une médecin et d’un ingénieur, il a fréquenté l’école française, et a sans doute envie de participer à la construction de ce nouveau Far West que s’apprête à devenir la Russie. Las, l’arrivée au pouvoir en 1999 d’un obscur fonctionnaire du KGB répondant au nom de Poutine va mettre un terme à l’expérience de la démocratie. Mais rien ne dit que le pays n’y aura jamais droit.
Celui qui n’aimait pas les espions russes – 20minutes.fr.