Nous voilà donc conviés à assister à un naufrage intellectuel. Il y aura eu l'attaque en règle contre Saint-Freud, démonialisé. Saint-Sartre ? Idem. Réincarnation de Nietzsche, M. Onfray frappe les "idoles" pour faire entendre le creux. Et si nous faisons de l'Onfray sur Onfray ? Saint-Môcquet ? Onfray arrive avec son marteau - sans faucille. Les soldats nazis ont fusillé Guy Môcquet. Michel Onfray ajoute quelques coups de marteau sur le visage de sa mémoire. Ci-dessous, vous trouvez ce texte, au cas où, face à la honte, il disparaîtrait du site officiel. Lisez-le. Il ne s'agit pas d'un récit sur "l'Histoire", mais le copier-coller d'affirmations énoncées dans un ouvrage reprises par Onfray. Il faut dire que, en la matière, Onfray est en train de se spécialiser dans l'Histoire-fiction. Nous avions déjà eu le cas avec son ouvrage-éloge de Charlotte Corday (parce qu'elle a assassiné Marat !). L'auto-proclamé rebelle libertaire fait l'éloge d'une des plus puissantes maisons d'édition françaises, Larousse. Parce que celle-ci est réputée "très sérieuse" au sein d'une collection dirigée par Emmanuel Thiébot, un ami de M. Onfray, "qui fit un temps partie de l’équipe de l’Université Populaire de Caen" (on aura ainsi éviter le syndrome Busnel/Vigan), l'ouvrage est donc implicitement réputé très sérieux. Les maisons d'édition très sérieuses publient des ouvrages très sérieux - CQFD. Avec cette même qualité littéraire, M. Onfray le constate avec toute la simplicité habituelle : "Bravo aux auteurs Jean-Marc Berlière et Franck Liaigre". "Que dit ce livre ? Que Guy Môquet ne fut pas résistant." Pour commencer, les choses sont simples : Guy Môcquet fut-il résistant ? Pour celles et ceux qui ne le savent pas, Guy Môcquet est un adolescent lorsque la Seconde Guerre Mondiale commence (il a 15 ans). Il faut connaître et comprendre le cadre général. Aussi, Onfray continue en ajoutant : "Quand les communistes russes et les nazis signent le pacte germano-soviétique, le PCF obéit à la décision de Staline. Dès lors, le Parti se réjouit de la défaite de juin 40 : selon eux, elle signe l’échec de la démocratie parlementaire, du capitalisme juif, de la bourgeoisie d’affaire. De plus, elle prépare la France à la révolution bolchevique ardemment souhaitée. L’Allemagne peut donc envahir la Pologne, puis la France, l’URSS ne bouge pas, les communistes français approuvent. L’Angleterre décrète un blocus économique contre l’Allemagne nazie, mais l’Union Soviétique laisse transiter sur son territoire les produits qui ravitaillent les nationaux-socialistes. Le PCF ne dit rien. Le 29 septembre 1939, nazis et communistes demandent la fin de la guerre afin que Staline garde les territoires conquis et Hitler les siens". Toute la vulgate anti-communiste qui est celle de l'extrême-droite depuis la guerre est répétée, et sans nuance. Toutes les prétendues "grandes écoles" de la République Française la reprennent dans leurs cours d'Histoire. Et il ne suffit donc pas de parler de 1939, du pacte et du reste pour comprendre sérieusement les évènements, les choix et les actions des hommes de cette période. Avant 1933, les communistes allemands luttent à la fois contre le patronat allemand et contre son bras armé qui défile dans les rues, les Nazis avec leur S.A. Le choix d'Hindenburg d'appeler Hitler à la chancellerie malgré des résultats électoraux insuffisants permet à celui-ci de mettre en place dans les semaines qui suivent la dictature. Contre ? : contre les communistes et les socialistes allemands, qui sont envoyés dès 1933 dans les premiers camps de concentration. Les communistes du monde entier, et notamment ceux qui dirigent l'URSS, savent que les Nazis ne sont pas seulement des adversaires, mais des ennemis, mortels. Les communistes français, le savent, parce que "l'Humanité", ce n'est pas "Le Figaro". Pendant six ans, la "grande presse" française de l'époque (la radio balbutie, sous le contrôle de l'Etat et la télévision n'existe pas) reprend à foison les affirmations d'Hitler sur sa "volonté de paix". Le "miracle économique allemand" est salué par cette presse et par ses éditorialistes, sans préciser que les services secrets français informent les dirigeants de l'Etat français (ce que les journalistes pouvaient eux aussi savoir en faisant un voyage dans ce pays) sur la conversion du budget allemand vers la préparation d'une guerre d'ampleur, puisque, en 1939, 80% du budget est consacré à la production militaire. Pendant six ans, les dirigeants de l'URSS qui ont des amis et des espions en Allemagne reçoivent des preuves multiples sur cette préparation. Ils savent que les dirigeants nazis sont farouchement anti-communistes (les communistes allemands sont emprisonnés !), et qu'Hitler a expliqué dans "Mein Kampf" que les Allemands doivent conquérir à l'est un "espace vital". Et l'Est, c'est eux. Aussi, pendant ces années les Soviétiques font savoir aux Français qu'ils souhaitent signer un accord militaire afin de tenir en tenaille l'Allemagne nazie. Mais voilà : les dirigeants, politiques, militaires, refusent. DANS LE MEME TEMPS, la République Espagnole est abandonnée par les pays d'Europe de l'Ouest, alors que les Soviétiques soutiennent comme ils le peuvent les Républicains face aux fascistes franquistes eux soutenus activement par l'Italie mussolinienne et l'Allemagne nazie. C'est la guerre civile en Espagne, et dans cette guerre nazis et communistes s'opposent, à mort. DANS LE MEME TEMPS, ces mêmes pays d'Europe de l'Ouest décident de renier leurs engagements à l'égard de la Tchécoslovaquie, avec la signature des accords de Munich, auxquels l'URSS ne participe pas. Avec l'annexion de l'Autriche en mars 1938, la chute de la République espagnole en avril, ces accords de septembre 38 permettent à l'Allemagne nazie de contrôler un immense territoire au coeur de l'Europe, qui lui assure de nouveaux moyens matériels, la soumission de millions d'hommes (ah, les nazis autrichiens...). Pour les dirigeants soviétiques, les pays d'Europe de l'Ouest ont choisi : plutôt Hitler que Staline. Un certain nombre de dirigeants européens pensaient que avec la guerre qui allait inévitablement arriver, les Allemands s'engageraient d'abord et essentiellement dans une guerre contre l'Union Soviétique. Si cela avait été le cas, on peut penser que ces pays n'auraient pas bougé le petit doigt, ou auraient pu soutenir cette guerre "contre le communisme international". Mais voilà : le soldat Hitler avait désigné trois ennemis pour l'Allemagne : les Juifs, le communisme... et la France. Aussi, lorsque la guerre est déclarée en septembre 1939, tous les communistes français savent que la France est en guerre avec un ennemi mortel (les députés communistes votent le 2 septembre les crédits de guerre !), le nazisme qui s'est emparé de l'Allemagne et qui ne se confond pas avec l'Allemagne. Car bien des Allemands furent les premiers à être des anti-nazis : les communistes, socialistes, mais aussi les anarchistes, des chrétiens, des intellectuels. Des soldats allemands furent enrolés de force, contre leur volonté et pour ceux qui occupèrent la France, certains ont fait le choix, magnifique, d'aider la Résistance française ou de la rejoindre, malgré la menace de la capture et de la condamnation pour trahison. Il y avait des nazis allemands, il y eut des nazis français, comme anglais, hongrois, etc, il y avait des résistants anti-nazis, allemands, il y eut des résistants français, etc. Mais l'anti-communisme que M. Onfray relaie (consciemment ou inconsciemment ?) était déjà et aussi celui des élites françaises pendant les années 30 au point que la majorité politique avec Daladier profite de la déclaration de guerre pour décider la "dissolution du parti" fin septembre; en janvier 1940, tous les élus et députés communistes sont déchus de leur mandat, et en avril 40, un ministre SFIO fait adopter un décret qui interdit la propagande communiste. Il faut dire que, depuis 1938-1939, les Cagoulards de l'extrême-droite, pilotés par la Synarchie, ont investi les Ministères. Et, comme par hasard, en un mois et demi, les armées françaises, malgré la lutte héroïques des soldats, sont réputées "défaites" par les armées allemandes. Dès avant la mise en place du régime pétainiste, la République dirigée par une coalition de centre-droit (et techniquement pilotée dans les Ministères par des membres de l'extrême-droite cagoularde) avec quelques membres, minoritaires, de gauche, criminalise l'activité communiste. Et c'est dans ce cadre que Guy Môcquet diffuse ses "papillons" et tracts dans Paris entre juin (qui voit l'arrivée de l'armée de terre allemande dans Paris) et octobre. Il est arrêté le 13 octobre 1940 par "trois inspecteurs de police française de la Brigade spéciale de répression anticommuniste (BS)" ! et emprisonné à Fresnes.
Que disait les communistes le 1er septembre 1939 au Président de la chambre des députés Edouard Herriot ?
"Monsieur le Président,
La France va se trouver incessamment en présence de propositions de paix, et à la seule pensée que la paix prochaine pourra être possible, une immense espérance soulève le peuple de notre pays qu'angoisse la perspective d'une guerre longue qui ensevelirait les trésors de la culture humaine sous des monceaux de ruines et coûterait la vie à des millions d'hommes, de femmes et d'enfants confondus dans le massacre. A peine a-t-on parlé de ces propositions de paix, dues aux initiatives diplomatiques de l'U. R. S. S., qu'une presse dirigée a répondu avec ensemble : Non ! Est-il possible que des propositions de paix puissent être rejetées avant même d'être connues et sans que la représentation nationale et souveraine ait été consultée? Nous ne le pensons pas quant a nous, et nous vous demandons, en tant que Président de la Chambre, d'intervenir auprès des Pouvoirs Publics pour demander : que le Parlement soit appelé à délibérer en séance publique sur le problème de la paix ; que les parlementaires aux Armées puissent prendre part aux délibérations sur cette question capitale, d'où dépend la vie ou la mort de millions de Français. Chaque Français veut la paix, car il sent qu'une guerre de longue durée serait terrible pour notre pays et compromettrait à la fois son avenir et ses libertés démocratiques. II faut empêcher qu'on puisse rejeter a priori des propositions de paix, et nous conduire, par cela même, a l'aventure et aux pires catastrophes. Nous voulons de toutes nos forces une paix juste et durable .et nous pensons qu'on peut l'obtenir rapidement, car en face des fauteurs de guerre impérialistes et de l'Allemagne hitlérienne en proie à des contradictions internes, il y a la puissance de l'Union soviétique qui peut permettre la réalisation d'une politique de sécurité collective susceptible d'assurer la paix et la sauvegarde de l'indépendance de la France. Voila pourquoi nous avons conscience de servir les intérêts de notre pays en demandant que les propositions de paix qui vont être faites à la France soient examinées avec la volonté d'établir au plus vite une paix juste, loyale et durable, que du fond de leur cœur souhaitent tous nos concitoyens."
Florimond Bonte écrit ceci en septembre 1939 : et pas lors des accords de Munich vendus par Daladier comme nécessaires pour la paix (Bonte souhaite en septembre 1939 la paix GRACE à un accord avec l'Union Soviétique et sa puissance), et pas en mai-juin 1940, alors que ce qu'il annonce est en train de se passer ("une guerre de longue durée serait terrible pour notre pays et compromettrait à la fois son avenir et ses libertés démocratiques", et nous conduire, par cela même, a l'aventure et aux pires catastrophes), mais parce que la guerre est décrétée, et malgré le fait que le 2 septembre les députés communistes votent les crédits de guerre, les communistes sont déclarés comme traîtres, et la chasse aux communistes si appréciée par les nazis se met en place dès 39-40 ! Oui, parce qu'il était Internationaliste, Guy Môcquet pouvait écrire et dire dans un tract "les soldats allemands sont vos frères", non pas en tant que SOLDATS ALLEMANDS, mais en tant de citoyens allemands enrolés souvent de force pour faire la guerre à des Français pour lesquels certains de ses soldats avaient de l'amitié, de la sympathie. Contre le nazisme, le pétainisme et contre "des magnats d'industrie (Schneider, De Wendel, Michelin, Mercier, ...), tous, qu'ils soient Juifs, catholiques, protestants ou francs-maçons, par esprit de lucre, par haine de la classe ouvrière," qui "ont trahi notre pays et l'ont contraint à subir l'occupation étrangère", Guy Môcquet a pris, avec ses modestes moyens, tous les risques. Arrêté, il a été intégré par les nazis à une liste de 62 communistes « pour éviter de laisser fusiller cinquante bons Français » selon la déclaration et volonté de Pierre Pucheu qui s'étonnera d'être accusé et fusillé par un pouvoir de la Résistance en Algérie. M. Onfray ne s'arrête pas là dans l'ignominie et l'incompétence historique puisqu'il ignore les faits de héros de la Résistance comme Georges Guingouin (dont il faut lire l'exhortation à ses camarades en août 1940 !). Les héritiers des magnats d'industrie peuvent se frotter les mains de s'être trouvé un nouveau colporteur de leurs arguments par lesquels ils défendent des collaborateurs patentés et accusent des résistants trop méconnus par les Français malgré des preuves innombrables de leurs actions, de leur courage.
Le texte de M. Onfray : "Je viens de lire un livre terrible intitulé L’Affaire Guy Môquet sous-titré Enquête sur une mystification officielle publié dans la très sérieuse maison d’édition Larousse dans une collection dirigée par Emmanuel Thiébot qui fit un temps partie de l’équipe de l’Université Populaire de Caen. Bravo aux auteurs Jean-Marc Berlière et Franck Liaigre. Que dit ce livre ? Que Guy Môquet ne fut pas résistant. Thèse sidérante tant elle va contre la mythologie qui fait de ce jeune garçon de seize ans fusillé par les nazis l’emblème de la résistance communiste à l’occupant allemand. Guy Môquet est le fils d’un cheminot qui doit son ascension sociale au Parti Communiste auquel il voue un culte. Quand les communistes russes et les nazis signent le pacte germano-soviétique, le PCF obéit à la décision de Staline. Dès lors, le Parti se réjouit de la défaite de juin 40 : selon eux, elle signe l’échec de la démocratie parlementaire, du capitalisme juif, de la bourgeoisie d’affaire. De plus, elle prépare la France à la révolution bolchevique ardemment souhaitée. L’Allemagne peut donc envahir la Pologne, puis la France, l’URSS ne bouge pas, les communistes français approuvent. L’Angleterre décrète un blocus économique contre l’Allemagne nazie, mais l’Union Soviétique laisse transiter sur son territoire les produits qui ravitaillent les nationaux-socialistes. Le PCF ne dit rien. Le 29 septembre 1939, nazis et communistes demandent la fin de la guerre afin que Staline garde les territoires conquis et Hitler les siens. Les députés communistes envoient une lettre en ce sens à Edouard Herriot, le Président de la Chambre. En cas de refus, la France et l’Angleterre porteront la responsabilité de la guerre qui deviendrait impérialiste ! La France refuse. Le PCF invite alors ses militants au sabotage. Ils ne s’en privent pas et causent la mort de soldats français envoyés au combat avec du matériel qui les lâche en plein milieu de la bataille. Le père de Guy Môquet soutient cette ligne, il est arrêté et emprisonné. Le fils clame haut et fort qu’il reprend le flambeau et continue le combat du père qui, on le voit, n’est pas un combat de résistance, mais de collaboration avec les nazis liés aux staliniens par le pacte. Des tracts sont distribués, voici ce à quoi invite l’un d’entre eux le 27 juillet 1940 : « Les soldats allemands sont vos frères, pactisez, ne vous trompez pas, votre ennemi c’est le grand capital, les trusts de France, d’Angleterre, d’Amérique »… Les tracts distribués par Guy Môquet n’appellent pas à la résistance : ils épargnent les nazis, accablent les capitalistes français, justifient le pacte germano-soviétique, attaquent l’Angleterre et les Anglais, insultent de Gaulle, font de l’URSS le pays de la liberté et de la démocratie. Guy Môquet est arrêté par la police de Vichy le 13 octobre 1940, non pas comme résistant, mais comme communiste stalinien appelant à pactiser avec l’occupant nazi. Il est interrogé, mais pas torturé. Il vit dans le camp sous un régime qui n’est pas concentrationnaire. Le 22 juin 1941, Hitler envahit l’URSS. Fin du pacte germano-soviétique brisé unilatéralement par les nazis. Les communistes changent de stratégie, presque un an après la déclaration de la guerre, ils entrent enfin dans la résistance. Des nazis sont abattus dans les rues. L’occupant organise des représailles et prélève des otages dans les prisons. C’est dans cette configuration que Guy Môquet est fusillé le 22 octobre 1941. Le PCF qui a demandé la reparution de L’Humanité le 20 juin 1940 à l’occupant nazi sous prétexte qu’ils avaient des ennemis communs, (les juifs, les capitalistes, les anglais, la ploutocratie, le parlementarisme, lire le détail dans Juin 40. La négociation secrète de Jean-Pierre Besse et Claude Pennetier), ont eu besoin de se refaire une santé à la Libération – avec l’assentiment du général de Gaulle… Guy Môquet fut un moment idéal dans le dispositif légendaire communiste : ce jeune homme stalinien qui défendait l’union des communistes avec les nazis contre la démocratie parlementaire, autrement dit le contraire de la Résistance, devint la figure emblématique d’une résistance communiste totalement inexistante à cette époque. Il y eut d’autres moments dans cette légende : le PCF fabriqua un faux pour faire croire qu’il avait appelé à la Résistance dès le 10 juillet 1940, « l’appel du 10 juillet » ; il s’intitula « le parti des 75.000 fusillés », alors qu’il y eut au total 4100 fusillés et que tous n’étaient pas communistes ; il présenta fautivement quelques noms de communistes comme résistants de la première heure (Tillion, Guingouin, Havez) alors qu’ils furent de bons soldats du pacte hitléro-stalinien ; etc. « Qu’avez-vous encore contre les communistes ? » me feront savoir nombre de mails ou de courriers que je sais déjà insultants… « Rien ». Rien contre les communistes, mais tout pour l’Histoire. Qu’il s’agisse de Freud et des freudiens, de Sartre et des sartriens, des communistes et de leur saga, le combat contre la légende et les mythes s’effectue moins « contre » que « pour » – en l’occurrence : pour l’histoire. Car le déni de l’histoire constitue et nourrit le nihilisme.