Quand je comptabilise – via le nombre de tags – mes centres d’intérêts sur ce blog, la lecture de polars vient en 7ème position, après la vie de mes petits-enfants, la cuisine, les travaux manuels, le cinéma, les voyages, ma maison à la campagne. Un classement éclairant sur mes habitudes de vie. Et je ne m’étonne donc pas qu’aujourd’hui un livre vendu sur cinq et un roman sur quatre soient des polars.
Car c’est une bien agréable lecture de divertissement, d’évasion, « qui ne prend pas la tête » mais permet aussi de se plonger dans la réalité sociale la plus actuelle. Lire un ouvrage d’Elizabeth George vous en apprend davantage sur les quartiers pauvres de Londres que n’importe quelle étude sociologique. Même remarque pour Andrea Camilleri et la Sicile d’aujourd’hui, la Venise de Donna Leon, l'Islande d'Arnaldur Indridason, ou la Marseille du début du siècle de Jean Contrucci.
D'éminents sociologues prétendent que ce type d’ouvrages correspondrait à des lecteurs portés sur le goût pour le réel et le concret, qui ne se racontent pas d’histoires sur le monde social. Lire un polar serait lire le vrai. Mais on peut aussi penser que ces histoires à faire dresser les cheveux sur la tête correspondent au plaisir que nous éprouvions, enfants, à écouter les contes de fées, où on se faisait peur à l’évocation de Barbe-Bleue (serial killer pédophile), du petit Chaperon rouge (une histoire de viol) ou du petit Poucet (que ses parents vont perdre dans les bois). Adultes, nous jouons encore à nous faire peur en plongeant dans les antres de la nuit et en cherchant le frisson à la vue d’un cadavre tout frais sous la lumière glauque d’un réverbère …Tandis que le monde autour de nous fourmille d’horreurs bien plus terrifiantes.
Le polar devient tendance. 70% de ses adeptes sont des femmes, ce qui est après tout légitime, puisqu'elles comptent parmi les auteurs majeurs du genre. La diversité et la qualité s’améliorent. On constate avec le temps une montée en gamme de son lectorat : plus jeune, plus féminin, plus diplômé. Ce n’est plus un genre destiné aux classes populaires friandes de romans de gare. Pour une fois, l’ouverture s’est faite de bas en haut. Pour moi, un plaisir de découverte entre deux ouvrages un peu plus sérieux. La frontière entre le « noir » et le « blanc » s’estompe désormais : par exemple, comment qualifier les romans d’Arturo Perez-Reverte ? Et comment inciter les jeunes à la lecture si ce n'est en leur donnant à déchiffrer un polar, qu'ils voudront lire jusqu'au bout ?Car ce qui importe, c’est la qualité d’écriture, la richesse psychologique des personnages récurrents, l’ambiance plus encore que l’intrigue, la justesse de la traduction souvent, le style toujours.
Alors, gloire à Chandler, Simenon, Camilleri, Contrucci (en bas), Vargas (en haut), Wentworth, Leon, Vasquez-Montalban, Cornwell, George, Indridason, Coben, Mankell et tous les autres que je n’ai pas encore découverts …
Et vous mes chers lecteurs, aimez-vous les polars ?