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Venezuela : l’opposition à Chávez peine à se construire

Publié le 14 novembre 2011 par Copeau @Contrepoints

Les Vénézuéliens méritent une réelle opposition à Chávez, capable de promettre le retour à un régime de droit démocratique et la fin de la dépendance à l’État. Malheureusement, ça ne semble pas être le cas.

Par Juan Carlos Hidalgo (*), depuis les États-Unis
Article publié en collaboration avec le Cato Institute

Le Venezuela entre en pleine campagne avec six candidats en lice pour l’investiture de la Coalition pour l’unité démocratique (MUD est l’acronyme espagnol), le mouvement d’opposition qui va nommer un candidat unique pour faire face à Hugo Chávez, lors de l’élection présidentielle en Octobre 2012 [1]. Le premier MUD aura lieu le 12 Février.

Primero Justicia : l’histoire qui bégaie

Venezuela : l’opposition à Chávez peine à se construire

Henrique Capriles Radonski

Après 13 années de régime socialiste qui ont paralysé l’économie du Venezuela et ont même créé une pénurie de carburant dans un pays sud-américain riche en pétrole, on pouvait s’attendre à ce que les candidats de l’opposition fassent d’audacieuses propositions à rebours des politiques étatistes de Hugo Chávez qui ont échoué. Malheureusement, ça ne semble pas être le cas.

Regardons, par exemple, du côté de Primero Justicia (Justice d’abord), le parti dont le candidat, Henrique Capriles Radonski, est leader dans les sondages. Capriles est peu loquace sur le modèle économique qu’il souhaite favoriser. Ses déclarations se limitent à des généralités telles que « la seule chose qui m’obsède est que le Venezuela fasse des progrès. » En tant que gouverneur de l’État de Miranda, Capriles aime comparer sa démarche à celle de l’ancien président brésilien Lula da Silva: une gestion macro-économique appropriée, complétée par de généreux programmes sociaux.

Toutefois, le programme de Primero Justicia semble être un peu plus précis dans sa façon d’envisager le rôle du gouvernement dans la société. Il prétend défendre un « État social-humaniste » à mi chemin entre « l’État social bureaucratique qui, de façon monopolistique, rend les services sociaux inefficaces » et « le minimaliste État néo-libéral qui renonce à ses responsabilités sociales. » Il en est de même concernant le modèle économique défendu par Primero Justicia : le programme affirme qu’il « se dresse contre l’économie planifiée socialiste et… les tendances libérales qui transforment le marché en un dogme. » En clair, Primero Justicia se voit comme une troisième voie entre « le socialisme du 21e siècle » de Hugo Chávez et ce qu’il considère être le « dogme néolibéral ».

Je crois que le Venezuela a besoin d’une rupture décisive vis-à-vis de l’échec des politiques étatistes du passé, et pas seulement d’une version allégée du socialisme. Néanmoins, un parti social-démocrate moderne est certainement une bien meilleure option pour le pays que Hugo Chávez. Malheureusement, la campagne électorale conduit les responsables de Primero Justicia à promettre davantage d’aides publiques aux Vénézuéliens pour évincer Chávez. Par exemple, le quotidien El Universal a publié une déclaration de Julio Borges, le président de Primero Justicia, dans laquelle il a fustigé Chávez de ne pas dépenser suffisamment pour les programmes sociaux. Il a déclaré que son parti allait utiliser les revenus pétroliers afin de créer un Fonds de sécurité sociale qui fournirait des allocations « pour tous les Vénézuéliens, indépendamment du fait qu’ils aient formellement un emploi ou non, y compris pour les femmes au foyer. »

Tout observateur de l’histoire moderne du Venezuela dirait que « l’histoire se répète ». Pendant de nombreuses décennies, les politiciens vénézuéliens, qu’ils soient au gouvernement ou dans l’opposition, ont vu l’État (et particulièrement, les revenus du pétrole) comme une source infinie de richesses qui a simplement besoin d’être répartie entre tous les Vénézuéliens. Comme l’a récemment revendiqué Borges, « chaque famille pourrait bénéficier de 1,6 milliards de bolivars [approximativement $375.000] si les ressources pétrolières étaient réparties équitablement. »

Henrique Capriles a lancé officiellement sa candidature présidentielle il y a un mois. Les Vénézuéliens ont d’autres préoccupations urgentes en dehors de l’économie qui joueront un rôle majeur dans l’élection de l’année prochaine : la hausse vertigineuse de la criminalité (le Venezuela se place désormais comme le pays le plus violent d’Amérique du Sud) et l’érosion constante des libertés civiles et politiques. Toutefois, Capriles est malavisé de penser qu’il peut battre Chávez en jouant cette carte populiste de la surenchère des subventions publiques accordées aux Vénézuéliens.

Les Vénézuéliens méritent une réelle solution alternative à Chávez. Ils méritent non seulement un candidat capable de promettre le retour à un régime de droit démocratique, mais aussi quelqu’un qui s’engage à briser la dépendance à l’égard de l’État. L’élection en Octobre 2012 devrait offrir d’autres perspectives que de désigner un distributeur-en-chef au Palais de Miraflores.

María Corina Machado: la bouffée d’air frais

Si une bonne partie de l’opposition au Venezuela semble déterminée à maintenir le modèle économique installé par Hugo Chavez qui favorise la dépendance des gens à l’égard de l’État, il y a une exception remarquable dans le domaine des candidats à la présidentielle : la député María Corina Machado [2].

Venezuela : l’opposition à Chávez peine à se construire

María Corina Machado

Le 11 octobre 2011, lors d’un rassemblement dans un quartier ouvrier de Caracas, et entourée par des vendeurs ambulants sans licence, des femmes propriétaires de petites entreprises et de jeunes partisans, Machado a lancé son programme politique nommé «capitalisme populaire», en vertu duquel, dit-elle, « le Venezuela va abandonner le modèle des droits sociaux afin de construire la vraie prospérité pour ses citoyens. » C’est une véritable bouffée d’air frais au sein du discours politique vénézuélien qui souligne habituellement le rôle central de l’État dans la redistribution des richesses pétrolières du pays. En fait, le simple emploi du terme «capitalisme» est extrêmement audacieux dans une nation où les idées du libre marché ont été systématiquement dénigrées par le président Chávez et ses acolytes pendant plus d’une décennie.

Dans son discours, Machado a attaqué le socialisme en tant que modèle perpétuant la pauvreté par l’humiliation du peuple et la création d’un lien de dépendance. A contrario, elle a expliqué que son programme était fondé sur la confiance dans la capacité créatrice de l’individu. Concernant le rôle de l’État, Machado a déclaré qu’il doit fournir un cadre juridique qui stimule l’entrepreneuriat et élimine les obstacles réglementaires en vue de permettre aux gens de l’économie informelle – tels que les vendeurs ambulants à qui elle s’adressait – de rejoindre l’économie formelle. Elle a également offert une solide défense de la propriété privée : « si vous n’avez pas la possibilité d’être le propriétaire du fruit de votre travail, alors vous ne possédez pas votre travail et donc vous n’êtes pas libre », s’est-elle exclamée.

Bien qu’étant élue à l’Assemblée nationale l’année dernière avec le plus grand nombre de voix pour tous le Venezuela, il est peu probable que Machado puisse gagner l’investiture de la Coalition pour l’unité démocratique. Cependant, son attachement aux idées du libre marché est le bienvenu au sein de l’opposition, parmi d’autres candidats qui semblent davantage intéressés à perpétuer la culture des droits sociaux au Venezuela.

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Assemblage de deux articles publiés sur Cato@Liberty :
Traduction : Raphaël Marfaux pour Contrepoints.

(*) Juan Carlos Hidalgo est coordinateur de projet pour l’Amérique latine au Center for Global Liberty and Prosperity. Auparavant, il était directeur pour l’Amérique latine de l’International Policy Network. Régulièrement, il publie des articles ou fait des interventions télévisées dans les médias latino-américains ou états-uniens.

Notes :

[1] NdT : Le gouverneur de l’État de Miranda (nord), Henrique Capriles, est donné comme favori, suivi selon les sondages par l’ancien maire d’un des cinq districts de Caracas, Leopoldo Lopez, le gouverneur de l’État de Zulia (ouest), Pablo Perez, et derrière, la député Maria Corina Machado. Enfin viennent l’ancien syndicaliste Pablo Medina et l’ex-ambassadeur Diego Arria (Source : AFP).

[2] Machado s’est exprimée sur l’échec de la politique sociale au Venezuela lors d’un Forum sur les politiques organisé par le Cato Institute il y a deux ans. Elle a également enregistré un podcast pour le Cato Institute sur la répression menée par Hugo Chavez contre la dissidence politique.


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