Les caractères de la politique (3) : le minoritaire irresponsable

Publié le 13 novembre 2011 par Variae

Il s’agite, trépigne, gesticule, se démène, pour agrandir son espace.

 

Il vit à l’ombre d’un grand frère politique plus habitué que lui aux scores à deux chiffres. Il dit que c’est son drame, il sait que c’est sa chance.

Des amis lui ont conseillé, cette fois, non pas de laisser passer son tour pour la présidentielle, mais d’explorer d’autres voies, pour ne pas mettre la famille politique dans laquelle il s’inscrit en danger, vu la gravité du contexte. Il les a traités de faux frères. Le grand frère, quant à lui, lui a proposé de s’associer pour des primaires ouvertes. Il les a balayées pour un prétexte ou pour un autre. Peut-être pas si sûr d’arriver à y surnager. Peut-être pas si sûr de lui, au fond. Il a donc, toutes négociations cessantes, validé son ticket pour le petit tour de manège de mai prochain, sans se faire d’illusions sur le résultat de celui-ci.

Il se plaint de son faible accès aux médias pendant les primaires du grand parti, faisant mine d’oublier qu’il pouvait y prendre part. Il se plaint de son étiquette de petit, oubliant de compter les Français qui ont pris part à ses propres primaires, s’il en a organisées, lui qui dit représenter le peuple. Il joue, surjoue et rejoue de sa relation tyrannique de petit à grand. Le grand ne lui adresse pas la parole ? C’est qu’il le méprise. Il ne place pas les problématiques du petit au centre de son projet ? C’est qu’il n’a aucun égard pour les électeurs de celui-ci. Il lui propose de négocier un accord électoral ? C’est qu’il le prend pour un sordide maquignon, alors qu’il est question d’idées et de principes, pas de places, voyons ! Il ne veut plus négocier aussi facilement un accord électoral ? C’est qu’il est repris par ses sempiternelles tendances hégémoniques, tout pour lui, rien pour les autres !

Alors le minoritaire tempête, éructe, s’invite à l’improviste, claque la porte, pose des ultimatums, insulte, méprise. Le grand est « complètement dépassé par la situation, il ne saura pas y faire face ». C’est un « bisounours » qui incarne le « tarif super-minimum de la gauche ». « Vous trouvez raisonnable que le spécialiste de la Corrèze décide de notre avenir énergétique ? ». Mais attention, si jamais il prenait au grand l’idée de commencer à le traiter de la même manière, ou même simplement de tenir le quart du dixième du commencement des mêmes propos, que n’entendrait-on pas ! D’ailleurs, c’est tout simplement inimaginable. Le petit peut tout dire car il est petit, le grand rien, car il est grand. Et gare au grand qui croirait avisé de faire remarquer cette disproportion qui, finalement, confirme bien le petit à sa place de petit.

Il est de bon ton de rappeler au grand qu’il ne pourrait rien sans le petit. Il serait peut-être bon de se rappeler que le petit ne serait pas grand chose sans le grand, sans les accords électoraux bien accueillants les jours de victoire, et sans la caisse de résonance sous forme de punching-ball qu’il lui offre le reste du temps. Rien de mieux que de traiter de tous les noms un grand pour exister médiatiquement, B.A.BA du buzz. Jusqu’à employer les mots de leurs adversaires politiques communs (capitaine de pédalo dans la tempête), au petit et au grand, pour qualifier le grand, au risque de favoriser ces adversaires, et de fragiliser son propre camp, dans une totale irresponsabilité ?

Ce n’est pas pour rien, finalement, que le petit s’appelle petit.

Romain Pigenel

Le portrait de famille des caractères de la politique continue ici.