3,8/5
Neil Gaiman aime Batman. Sa plume adroite sait parfaitement explorer les tréfonds de l’âme tourmentée du Chevalier noir et il se joue avec une aisance déconcertante des pièges liés à la très longue vie de ce personnage iconique créé par Bob Kane. Un album relié narrant les circonstances de sa mort illustrées par Andy Kubert (reformant le somptueux duo de 1602 concocté pour la concurrence marvellienne) ne pouvait que m’inciter à me replonger dans l’univers caractéristique du Caped Crusader.
Si tu voulais faire respecter la loi, tu serais flic, pas sur les toits avec un masque.
Ca faisait un long moment que je n’avais pas suivi ses exploits. A vrai dire, et contrairement aux séries Marvel, je ne les suis que de loin en loin, au gré d’albums pondus par des maîtres de l’Art. Les argument plaidant en faveur de celui-ci étaient suffisamment probants pour que je me lance.
Ils étaient ma famille et j’étais heureux avec eux. J’apprenais à jouer le rôle du gentleman au service d’un gentleman.
Au final, on reste un peu sur sa faim. Ce double épisode ne révolutionnera nullement la série, n’introduira aucune nouveauté dans les rapports complexes qu’entretiennent les ennemis de Batman avec ce dernier, ni dans la psyché tourmentée de Bruce Wayne. Censé se situer après l’annonce, dans la continuité DC, de la fin du Batman (éliminé par Darkseid), il s’appuie sur le parallèle entre Mort et Recommencement : on y suit en effet la lutte éternelle du « plus grand détective du monde » hissée au rang de cycle mythologique ; les époques s’entremêlent, les souvenirs se fondent et les certitudes éclatent. Les lieux, les décors, les costumes sont mouvants, on passe des ruelles sordides du Gotham d’après-guerre à des intérieurs sobres et lisses. Au travers de toutes les « occurrences » du Batman à travers les décennies, on sent bien une préférence pour la période Neil Adams (cela se sent dans la manière qu’a Kubert de le représenter) malgré les nombreux clins d’œil vers la version « golden age ».
Même si tout ce mal n’était que mensonge, je n’ai guère d’autre choix que de combattre.
Si l’issue du double épisode est radicalement différente, le lecteur de comic-books ne pourra s’empêcher de trouver de forts relents du magistral la Mort de Captain Marvel, notamment dans la manière dont le défunt entretient une discussion avec un être transcendental, et dont les ennemis d’hier viennent témoigner de cette complicité troublante qui les lie à lui.
Si personne ne vous offre jamais de roses, vous finissez par cultiver les vôtres.
Les petites histoires placées sans logique à la suite de ce mini-crossover permettent encore d’explorer le mythe du Dark Knight avec la subtilité récurrente, la finesse et l’élégance qui sont la marque de Gaiman (même lorsqu’il est peu inspiré – comme dans l’épisode Quand une porte ? narrant les « origines secrètes du Sphinx »). On risque d’apprécier Pavane par son côté envoûtant (un mystérieux agent enquête sur la personnalité de Poison Ivy) et la douce ironie de Un monde en noir et blanc.
« Mauvaise herbe » est un nom donné par les humains à une plante dont ils décident qu’elle n’est pas à sa place.
Un bel hommage.
Batman : Whatever happened to the Caped Crusader ?
Deux épisodes des séries Batman et Detective Comics écrits par Neil Gaiman et illustrés par Andy Kubert (2009), suivis de quatre petites histoires de Batman écrites par Neil Gaiman ; éditions Panini comics (2011).
Traduction : Alex Nikolavitch & Khaled Talil.
Résumé : Batman est mort. C’est ainsi. Et nous assistons à ses funérailles auxquelles tous ceux qui l’ont bien connu se convient : Alfred, bien sûr, mais aussi et surtout ses meilleurs ennemis. Chacun d’eux va conter leur rencontre, et aussi les circonstances du décès du Caped Crusader alors que, en arrière-plan, Batman lui-même assiste, ébahi, à sa propre cérémonie funéraire…
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