Le keynésianisme n’est plus là où on l’attend le plus. Ainsi, les politiques des États-Unis sont plus keynésiennes que celles menées dans certains pays d’Europe, comme l’Allemagne. Pour autant, cela ne veut pas dire que l’Allemagne est un modèle à suivre.
Par Daniel J. Mitchell (*), depuis Washington D.C., États-Unis
Article publié en collaboration avec le Cato Institute
L’un de mes contradicteurs n’était pas d’accord et affirmait que j’avais tort. Selon lui, l’Allemagne s’en sort mieux dans la crise actuelle par l’action d’un keynésianisme fort, aux moyens de stabilisateurs automatiques résultant de dépenses publiques importantes. Cette contradiction était exprimée avec une telle certitude que je me demandais si je n’étais pas dans l’erreur.
Bien sûr, nous avions tous les deux raison sur le fait que l’Allemagne fait mieux. Dans les dernières années, sa croissance annuelle a été d’environ 3,5% tandis que celle des États-Unis n’a pas dépassé 3%.
Mais qui avait raison sur la question clé de savoir si l’Allemagne était plus keynésienne? Au départ, j’étais un peu réticent à l’idée de compulser les chiffres. Mais ensuite je me suis motivé après avoir lu l’excellente étude consacrée aux réformes allemandes qui ont dopé la croissance du pays, réalisée par Véronique de Rugy du Mercatus Center et publiée dans la National Review.
Alors j’ai consulté les données concernant les dépenses annuelles des gouvernements américain et allemand et j’ai découvert que j’avais raison (quel choc). Comme le montre le graphique ci-dessous, le fardeau des dépenses publiques a augmenté plus rapidement aux États-Unis, que vous preniez 2007 ou 2008 comme année de référence.
Pour m’assurer que la comparaison était juste, j’ai découpé les chiffres de toutes les manières possibles. Mais les résultats sont restés les mêmes, que l’on se réfère aux dépenses publiques d’État et/ou locales, que les dépenses du TARP (Troubled Asset Relief Program) ait été inclues, quelle que soit l’année de référence sélectionnée, ou que l’on s’attache à la croissance annuelle des dépenses ou aux augmentations sur plusieurs années.
Dans chaque cas, le poids de la dépense publique augmente plus rapidement aux États-Unis qu’en Allemagne et ce, de 2007 à 2011.
Pour autant, cela ne veut pas dire que l’Allemagne est un modèle à suivre. Ses dépenses publiques sont beaucoup trop élevées et continuent de croître. Tout ce que nous pouvons dire, c’est que l’Allemagne ne prend pas la mauvaise direction aussi vite que les États-Unis.
Oh, je suppose que nous pouvons aussi dire que j’avais raison et que mon adversaire avait tort. Les États-Unis sont plus keynésiens que l’Allemagne.
Concernant l’Allemagne, j’ai consulté mes archives et je n’ai trouvé qu’un seul billet qui évoquait en bien les politiciens allemands. Dans d’autres articles, j’ai raillé leur modèle fiscale qui taxe les prostitués, je me suis moqué d’eux quand ils ont perdu les plans du siège de leur agence de renseignement, j’ai ridiculisé l’énergie et les dépenses qu’ils engagent pour taxer le café, et je me suis même moqué de la chancelière prétendument conservatrice lorsqu’elle cherche à lever de nouveaux impôts .
Même si Véronique de Rugy a raison au sujet d’une évolution positive, les Allemands ont encore un long chemin à parcourir.
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(*) Daniel J. Mitchell est Senior Fellow au Cato Institute de Washington, expert dans le domaine des réformes fiscales. C’est un fervent défenseur de la flat tax et d’une concurrence fiscale internationale.
Article originellement titré et publié le 02.11.2011 sur Cato@Liberty, reproduit avec l’aimable autorisation du Cato Institute.
Traduction: David et Raphaël pour Contrepoints.