Si vous n'avez pas lu ma dernière chronique dans The Pariser, petite séance de rattrapage :
Un incident majeur s’est produit la semaine passée mais les médias l’ont très peu relayé.
Pourtant il illustre une situation inédite à Paris qui confirme que le luxe, c’est l’inaccessible.
L’incident est le feu qui s’est propagé au premier étage du salon de thé Ladurée sur les Champs Elysées, m’empêchant une nouvelle fois d’acquérir le précieux gâteau aux amandes.
Nulle idée de vous conter ici la difficulté de garder la coque du macaron aussi lisse que la peau d’un nouveau né mais bien de l’impossibilité de s’approvisionner en cette précieuse pâtisserie.
Pour nos lecteurs provinciaux, cette situation pourrait se comparer à la fracture numérique rencontrée dans nos campagnes isolées, où l’accès internet ressemble encore à l’écran du minitel qui s’affichait ligne à ligne, pixel par pixel…
La situation que je vais vous décrire est sans doute encore plus grave. Je prends pour exemple mon dernier périple shopping dans Paris, dans un des quartiers les plus richement dotés et pas une balade Porte de Saint Ouen un dimanche après midi car mon exemple tomberait à l’eau, sauf si je vous parlais de Kebab, non, il s’agit ici d’un périple du Marché Saint Honoré à la Place de la Madeleine, en passant par le Faubourg Saint Honoré.
Il est 15h et l’envie de m’offrir un de ces gâteaux rond et granuleux, au coeur fondant, se fait sentir, en pleine virée shopping.-sans doute le manque de sucre.
Première hésitation : la foule des grands jours se presse dans la boutique exiguë. Je passe mon chemin et me dirige vers Pierre Hermé, plus légitime en la matière. Malheureusement, la boutique ouverte sur la rue avec sa grande façade vitrée m’incite à me retenir d’entrer, tant le nombre de clients à l’intérieur me fait penser à une rame de métro bondée un jour de grève. Sauf à attendre un « incident voyageur », ma patience est limitée.
Direction la rue Royale et la boutique Ladurée : la situation s’empire car la foule n’est plus seulement dans la boutique mais aussi dans la rue… une queue interminable qui ressemble comme deux gouttes d’eau à celle des premiers jours des soldes Hermès.
Mon coeur palpite et la panique s’empare de moi. La situation s’aggrave et je me dirige prestement vers la boutique Fauchon de la Place de la Madeleine, également envahie d’une horde de touristes, représentant l’équivalent de deux à trois autocars.
Mon estomac grommelle et mes jambes flageolent.
Je décide d’accélérer le pas et de rejoindre la Maison du Chocolat, boulevard des Italiens qui vient juste de vendre son dernier macaron. J’exprime alors un dernier souhait : déguster une tarte au chocolat, la spécialité maison. Le coup de grâce est porté : rupture de stock depuis le début d’après midi.
Mon cerveau, altéré par l’hypoglycémie, dans un dernier sursaut de conscience, m’ordonne de me rendre aux Grands Magasins fourbus en stands… Mais le Lafayette Maison et son stand Pierre Hermé, le Lafayette Gourmet et sa vitrine Dalloyau, le café Pouchkine ou les trois stands Ladurée du Printemps, sont là encore tous sans exception envahis et pratiquement sold out : décidément, le macaron se vend à Paris aussi vite qu’un billet de concert de Lady Gaga ou de Madonna.
Las et désabusé, les jambes en coton, l’estomac criant famine et le moral en berne comme un soufflé au fromage raté, il ne me reste plus qu’à m’offrir dans la rue une crêpe chaude alourdie de Nutella pour calmer mon désespoir et jurer que le week-end prochain, cette quête du Graal sera ma priorité avant toute autre chose.