Magazine Photos

François TEYSSANDIER (France).

Par Ananda

De tes mains tu bâtis ta maison contre la paroi abrupte du ciel, avec pour murs chacun de tes mots et pour solives chacune de tes pensées.

Tu deviendras cette cendre ailée que des mains familières répandront au matin parmi les premiers mots naissant de la terre.

Tu n'as que ton souffle pour attiser chaque jour l'âtre incandescent et silencieux du langage.

La maison morte retient tous les songes anciens des miroirs.

Les mots que tu prononces ont l'éclat des pierres sur ta langue.

Tu éprouves de tes pieds nus la charnelle fraîcheur du ruisseau qui s'obstine à rejoindre le ciel.

La vie n'est que la représentation fictive d'une réalité qui fuit sans cesse le réel.

Tu voudrais que la lumière des mots éblouisse l'œil du soleil.

Temps circulaire qui déploie ses labyrinthes abstraits dans la mémoire des mots.

Ces frêles murets de voix lointaines, et toutes ces fenêtres ouvertes à l'improviste par le vent.

Le soleil flamboie dans ton œil comme un oiseau peint sur le roc.

D'où vient cette voix qui capture la lumière à chacun des mots qu'elle prononce?

La pluie oblique cingle les vagues, le vent relie ciel et mer par brusque réfraction de la lumière sur les couleurs bleu gris qui surgissent de l'horizon.

Allonge-toi sur cette pierre de lune qui garde encore en elle la chaleur d'autres corps inconnus, et endors-toi au creux des dernières couleurs du soir.

Lumière flexible et rasante qui rebondit sans bruit sur les tuiles bleues de la mer.

Le silence dresse autour de toi de si hauts murs de ténèbres qu'il te faut l'éclair pour les abattre.

Jardin empli de voix et de couleurs qui s'égare dans la lumière du matin pour rejoindre en silence l'ombre oblique de ton corps.

Poème qui s'écrit dans le silence des mots, sépulture des voix et des songes.

Ta voix élargit la brèche qui s'ouvre dans le jour comme une blessure à vif sous tes pieds nus.

Pour ne pas affronter le vent les arbres s'enfoncent dans la terre, pour assouvir ta soif le soleil devient un puits de fraîcheur au cœur des pierres.

Tu t'étonnes que le miroir puisse réfléchir tant de profondeur et d'espace sur une surface aussi plane, toi qui n'as guère plus d'épaisseur qu'un rai de lumière se faufilant entre deux brins d'herbe.

Tu implores le soleil de ne pas foudroyer les grands ifs des cimetières.

Rêves lunaires ou terrestres que le temps grave dans le silex friable des mots.

Les mots glissent de l'ombre vers la lumière, comme un lent désir de givre se déploie vers l'ardente blessure du feu.

François Teyssandier


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Ananda 2760 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Dossier Paperblog

Magazines