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DSK : pendez-le haut et court !

Publié le 11 novembre 2011 par Variae

Il n’est pas si courant de voir quelqu’un passer, en quelques mois, du statut de messie politique à celui de monstre de foire honni. C’est précisément ce qui arrive à DSK. Chaque chapitre de ses mésaventures judiciaro-médiatiques lui a ôté une nouvelle phalange de défenseurs, jusqu’à le laisser aujourd’hui, les primaires et le dénouement de l’affaire Banon étant passés par là, épluché jusqu’à l’os. Avec comme symbole de sa situation cette photo dont usent et abusent avec gourmandise les journaux, où on le voit avec une barbe blanche, l’air d’un pauvre hère un peu paumé.

 

DSK : pendez-le haut et court !

A bien des égards, cet opprobre n’est pas beaucoup plus rationnel que le culte qu’on lui vouait il y a peu. Il y a trois choses différentes : les questions judiciaires (accusations de viol, et maintenant de relations inappropriées avec une entreprise), la question de ses mœurs (apparemment libertines), et la question politique (Et s’il s’était présenté comme candidat du PS ? Et pourquoi personne n’a rien dit ? Etc.). Elles n’appellent ni le même type d’interrogations, ni le même type de réponses. Pourtant, elles se trouvent aujourd’hui mêlées – chez ceux qui s’intéressent encore à lui – dans une hargne un peu frénétique qui confine à l’acharnement, et qui semble, à leurs yeux, tout justifier. Comme si, par ses actes, DSK s’était mis de fait dans une zone hors du droit, où tous les principes habituels cessent de fonctionner.

L’ancien directeur du FMI est dans la position du paria tellement détesté que le premier lâche venu qui, profitant de sa faiblesse, lève la main sur lui, peut encore se prévaloir de la morale pour justifier et valoriser son geste. C’est un peu à cette image que j’ai pensé en découvrant un très instructif éditorial de Serge Raffy dans le NouvelObs, dans la bien nommée rubrique « Coup de sang ».

Qu’est-ce qui fait donc bouillir le sang du bon Serge ? Que « certains de [ses] confrères se parent du manteau de l’éthique » pour refuser de publier les SMS de DSK révélés par Libération, certains relatifs, donc, à ses escapades libertines, et d’autres évoquant des personnalités du Parti socialiste, sans lien avec ces affaires de mœurs . Leur respect de l’intime, si c’est bien cela qui les meut, est ici hors de propos, explique Raffy, car on est dans le registre de « l’action judiciaire ». Qu’il existe justement des juges qui sont en train d’enquêter, et que rien ne soit établi ni jugé, ne semble pas perturber outre mesure l’éditorialiste du NouvelObs ; quant au concept de secret de l’instruction, il ne semble tout simplement pas avoir de traduction dans sa langue. Non, débarrassons-nous de nos pudeurs mal placées : les Français ont le droit de savoir.

Le droit de savoir quoi ? C’est là que le papier atteint des sommets de jésuitisme. « L’opinion est en droit de savoir jusqu’où cet homme, qui a failli devenir Président, était capable d’aller pour satisfaire ses pulsions.». Superbe exemple de raisonnement contrefactuel, ou, pour parler plus trivialement, de « si ma tante en avait, elle serait mon oncle ».

Le fait est que DSK ne risque plus de devenir Président, et qu’il n’a même pas risqué de devenir candidat socialiste, d’ailleurs. Le fait est que le PS a désigné un candidat et que la vie politique de DSK, si elle n’est pas terminée, a pris un sérieux coup d’arrêt. Pourquoi donc aller solliciter une réalité alternative, un futur qui n’aura pas lieu, pour justifier le chapardage et la diffusion de pièces à conviction révélant des pans de la vie d’un homme qui, si ça se trouve, n’auront même pas de qualification judiciaire ? Et pourquoi ne pas plutôt se demander pourquoi ces informations sont fuitées maintenant, alors le PS, justement, a quitté la case DSK, a un candidat, et que Nicolas Sarkozy est politiquement au plus mal, avec une autre affaire hôtelière contre lui ?

« Cette curiosité n’a rien à voir avec le voyeurisme, mais elle touche à l’intérêt national.  ». Mais si, Serge Raffy, cette curiosité a tout à voir avec le voyeurisme malsain qui suinte des affaires DSK depuis leur début en mai dernier. Avec ce puritanisme de prêtre lubrique, qui se déchaîne en chaire contre les turpitudes de la chair, pour mieux pouvoir en parler à loisir et sous toutes les coutures. A la rigueur, je veux bien vous laisser le bénéfice du doute. Peut-être êtes-vous tellement moralement dégouté par DSK que vous perdez toute raison quand vous parlez de lui. Ou alors, comme Libération, comme tous les autres, vous parlez jusqu’à plus soif de ce qui, en fait, vous fascine, et de ce que vous savez être vendeur, avec des ficelles éprouvées par la presse à scandale.

Un peu de courage et d’honnêteté, est-ce trop demander ? Je décerne quant à moi cette double palme à Slate, qui met les deux pieds dans le plat avec un article – sur DSK – intitulé « Comment organiser une partouze? », et qui entre le détail de cet art trop peu connu. Les pure players, toujours un coup d’avance sur la vieille presse.

Romain Pigenel


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