Hideout

Par Lonesloane

De Masasumi Kakizaki – Éditions « Ki-oon » – One shot.

Une île paradisiaque, le soleil, la plage… Un couple qui semble en perdition mais qui cherche à se donner une éventuelle seconde chance, recoller les morceaux en quelque sorte, repartir sur de nouvelles bases, peut-être plus sereines… Enfin c’est ce que les premières pages de « Hideout » laissent entendre au lecteur. Mais très rapidement on comprendra que le malaise est bien plus profond, que la situation n’a pas réellement d’issues et que le but de ce séjour pour Seiichi n’est autre que de se débarrasser de sa compagne Miki. Et c’est armé d’une clé à molettes, sous une pluie battante, que ce dernier décide de passer à l’acte…

Mais comme toujours dans ce genre de situation, rien ne doit se passer comme prévu. Au prix d’une lutte acharnée, Miki parviendra à s’échapper des griffes de son compagnon pour se réfugier dans une étrange et sinistre grotte, qui, bien évidemment, ne laisse rien présager des bon pour la suite des évènements. Il semble que la notion d’espoir n’ai pas sa place dans ce genre « d’aventure », parfois, le pire que l’on puisse imaginer n’est que bien peu de chose comparé à l’ignominie et à la rage qui sommeil au plus profond de certain d’entre nous…

« Si je regrette d’avoir tenté de la tuer ? Pas une seconde ! Cette harpie a gâché ma vie…Si je l’avais maintenant devant moi, je la tuerais sans la moindre hésitation. Avec le recul, je n’ai qu’un seul regret… Avoir continué à la poursuivre… J’aurais du revenir sur mes pas… Je n’aurai pas dû y pénétrer… C’était une erreur de m’aventurer dans cette grotte… »

« Cette grotte » n’est que la minuscule entrée d’un immense complexe labyrinthique aux multiples pièges, dont les couloirs mènent invariablement vers des pièces infectes qui semblent toutes avoir été occupées, à un moment ou a un autre, par de malchanceux « aventuriers » égarés…  Pour aiguiser encore un peu plus ce sentiment d’oppression et d’angoisse qui se dégage à chaque instant, d’étranges bruits, un peu comme des mouvements furtifs que l’on percevrait dans l’obscurité, viennent troubler le silence morbide qui semble habiter ces lieux… Il va sans dire que le lecteur intrigué découvrira dans la foulée l’atroce réalité, l’insoupçonnable monstruosité tapie dans l’ombre… Que la traque commence…

Le lecteur n’aura alors plus d’autre solution que de se laisser porter par un scénario aux multiples rebondissements, vif et nerveux, qui force à imaginer, presque vivre, en tout cas ressentir, une horreur qui suinte à chaque page. C’est poisseux et sale, ça colle aux doigts et il est bien difficile de relever son nez du livre avant d’avoir tourné la dernière page de ce sombre récit. Le tout étant merveilleusement bien mis en image par un Masasumi Kakizaki qui nous dévoile juste le nécessaire sans jamais abuser de détails inutiles. La forme narrative est également terriblement bien sentie, alors que l’on s’englue petit à petit dans une histoire des plus sordide, le passé des personnages est révélé sous forme de flash-back nerveux et plus ou moins rattachés à des éléments de l’action présente, un peu comme des « fenêtres » dans le récit qui permettent au lecteur de reprendre son souffle. Enfin, comme pour relever encore un peu plus l’intérêt de l’ouvrage, Kakizaki nous offre un final aussi inattendu qu’efficace…

J’ai passé un très bon moment en compagnie de « Hideout », un « one shot » divertissant à souhait, admirablement bien construit qui saura en intriguer plus d’un. Sans être une perle rare de la bande dessinée, et même si le scénario reste très classique dans son genre, ça fonctionne malgré tout vraiment bien. Inquiétant et sauvage, le récit a cette capacité d’engloutir le lecteur dès les premières pages, et de l’emmener au plus profond d’un monde mutilé qu’on ne souhaiterai pas voir exister dans notre réalité… et pourtant…