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Les ToiZéMoi fêtent leur divorce

Par Gjouin @GilbertJouin
Les ToiZéMoi fêtent leur divorce
Théâtre des Variétés
7, boulevard Montmartre
75002 Paris
Tel : 01 42 33 09 92
Métro : Grands Boulevards
One-couple show écrit par Marie Blanche et Alain Chapuis
Mise en scène de Jacques Décombe
Musique d’Alexandre Sabbah
Avec Marie Blanche et Alain Chapuis
Le sujet : Camille et Simon ont la joie de vous faire part de leur divorce. Ce soir, ils donnent une réception avec traiteur, orchestre et confettis pour célébrer… leur séparation ! Leurs parents, leurs amis sont là pour immortaliser ce grand jour… A travers l’histoire de Camille et Simon touchés par la « septénite », la fameuse crise des sept ans, Marie et Alain nous font vivre les petites lâchetés et les gros malentendus des couples modernes.
Mon avis : Quelle incongruité que ces deux là, Marie Blanche et Alain Chapuis, alias les ToiZéMoi, ne soient pas plus connus du grand public. Je les avais découverts en 2004 au Théâtre de Dix Heures, revus dans leur deuxième spectacle, Noces de Plomb et, à chaque fois, je me suis vraiment régalé devant leur inventivité, leur fantaisie, leur joie de vivre et, il faut le dire, leur talent de comédiens protéiformes. Pour moi, leur duo est du niveau de celui créé naguère par Pierre Palmade et Michèle Laroque, mais en moins vachard et cynique.
Certains pisse-froid vont encore me reprocher mon enthousiasme et pourtant, il existe et il est loin d’être béat. Je ne suis pas si bon public que d’aucuns le prétendent. Est-ce de ma faute si, conséquence plutôt heureuse d’une loi des séries, j’ai vu en un mois des comédies d’une grande qualité : Les Conjoints, Mon meilleur copain, Les Bonobos, Les Bodin’s et hier soir, les ToiZéMoi. Je ne pratique pas l’angélisme. Quand je m’amuse, je le dis, je le clame. J'estime sans arrogance aucune que c'est une mission d'utilité publique. En plus, limite introverti, je ne suis pas en public un garçon des plus exubérants. Hier, j’avoue, il m’est souvent arrivé de ne plus me contrôler et de glousser de plaisir. Assez parlé de moi, je m’efface devant Marie et Alain et, surtout, devant leurs personnages…
Or donc, Camille et Simon, qui ne font rien comme tout le monde, ont décidé après sept ans de vie commune (pas si commune que cela d’ailleurs, nous le vérifierons par la suite), sept ans de « recherche de l’harmonie conjugale », de se désunir devant nous pour le meilleur et pour le rire. Alors, pour fêter l’événement, ils ont convié la famille, les amis et des proches… Fidèles à leur schéma habituel, ils vont interpréter, en plus de leurs propres rôles, une douzaine de personnages. Oui, douze, je les ai comptés. Une sacrée performance. Ces intervenants ne sont évidemment pas choisis au hasard. Ils sont tous particulièrement gratinés. Vont ainsi défiler pour notre bonheur l’aumônier qui les avait mariés, flanqué de sa complice Sœur Marie Cropette, Jean-Norbert le maître-queux un tantinet « précieux » qui officie en cuisine, Jennifer, la filleule qui, avec l’ingénuité de ses 6 ans ½ va leur déclamer un poème, Marie-Claire, l’amie psy qui va s’efforcer d’analyser leur couple, puis son collègue Jean-Luc, québécois libidineux qui ne cherche qu’à tenter sa chance, Geoffroy, le copain bobo de l’Aquagym, flanqué de son épouse, Ghislaine, d’une vulgarité telle qu’elle mériterait que l’on invente pour elle le féminin de beauf, la jeune femme qui, suite à un quiproquo, transforme un entretien d’embauche en proposition de débauche, Malika, la femme de ménage rebeu érudite mais qui prend l’accent pour ne pas créer d’embarras, Jean-Jacques, le ch’ti copain de régiment qui dispute à sa femme Carole la palme de la connerie… Sans compter que le sémillant et frétillant Jean-Norbert, de plus en plus taché et de plus en plus pompette, va faire irruption encore deux fois, ça en fait du monde !
Camille et Simon abordent cette soirée de fête en parfaite symbiose. L’harmonie qu’ils n’ont pas trouvée durant sept ans, ils vont la connaître l’espace de cette soirée. Jusque dans leurs vêtements d’ailleurs. Camille porte une robe noire à parements rouges et Simon un costume noir avec une cravate rouge. C’est classe et très joli à voir. Après s’être adressés à nous, public, comme si nous étions les invités privilégiés de leur fiesta, ils vont donc faire appel à ces fameux témoins précités. Aussitôt, la pièce va passer en mode majeur et adopter un rythme effréné. Ce sont vraiment deux super comédiens, capables des pires clowneries (n’est-ce pas Alain ?) comme des scènes d’un humour plus subtil, plus raffiné. Ils savent aussi être coquins sans être jamais vulgaires. Ce spectacle est très écrit, intelligent, émaillé de très bons jeux de mots et de grands moments de comédie (par exemple cette parodie de Rabbi Jacob à laquelle se livre Simon). Il émane surtout d’eux une formidable complicité. Ils cherchent à tout moment à se surprendre, réussissant parfois à en perdre le fil de leur texte suite à une improvisation inattendue. Sont-elles feintes ou écrites ? On ne sait pas et on ne veut pas le savoir. En tout cas, elles sont remarquablement jouées. Et, en plus, chose qui ne gâte rien, ils sont tous deux beaux à voir. Ils sont heureux de partager la scène et, c’est évident, ils nous aiment.
Ils réussissent même sous le biais de la comédie à faire passer un message qui doit donner à réfléchir à tout un chacun : dans un couple, il faut se parler ! Le manque de dialogue peut faire naître des incompréhensions rédhibitoires. Ils le découvrent eux-mêmes, devant nous, à leurs dépens. Du coup leur décision de divorce vacille dangereusement car ils se retrouvent face à un être très différent de celui ou celle dont il/elle voulait se séparer. On peut fortement subodorer que le mot « fin » ne sera pas encore écrit cette fois pour les ToiZéMoi car l’amour a ses raisons que l’érosion ignore. Et c’est tant mieux pour nous.
Sincèrement, si vous voulez passer un bon moment, partager une heure et quart de rire avec deux comédiens généreux et talentueux, précipitez-vous au petit théâtre des Variétés.

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