Un ministre dérape, en public, devant des députés. Il accuse l'opposition d'avoir indûment gagné les élections il y a 14
ans.
A quelques centaines de kilomètres de là, Nicolas Sarkozy dérapait lui aussi, preuve que la campagne est lancée. L'attaque du
candidat Nicolas était un cran plus frontale contre François Hollande. Le Monarque n'osait toujours pas s'avouer candidat même s'il ne pense qu'à cela. Mais il ne cachait plus son mépris contre
l'opposant.
Faute d'idées, de bilan et de programmes, le Churchill de la dernière heure n'avait que mépris et arrogance.
François Baroin dérape
Mardi après-midi, François Baroin, ministre de l'Economie, a perdu ses nerfs. Pire, c'était à l'Assemblée nationale lors de
la traditionnelle séance des questions au gouvernement. Ces moments, par ailleurs télévisés, sont toujours chahutés. Mais le ministre de l'économie a complètement lâché prise accusant la gauche,
pêle-mêle, d'avoir pris le pouvoir « par effraction » en 1997, puis de démagogie en
tous genres.
Ce dérapage contredisait des mois d'efforts où l'on tente de convaincre de la sérénité de nos gouvernants. Mercredi, le petit ministre, sans doute gêné de sa ridicule perte de sang-froid de la veille,
refusa toute excuse. « Hier c'était hier. Il y a des joutes politiques, il y en a eu d'autres par le passé, il y en aura d'autres. Aujourd'hui, je remercie pour sa hauteur de vues Jean-Marc
Ayrault à qui je vais m'efforcer de répondre sur le fond en soulignant les points d'accord et de désaccord dans un esprit de responsabilité partagée ».
Son ancien collègue Patrick Devedjian, président UMP
du conseil général des fameuses Hauts-de-Seine, commenta sobrement: « C'est un mot regrettable (...) Je considère que le terme est inapproprié ».
Incident lors de la séance des questions au... par LCP
Sarkozy aussi
En déplacement à Strasbourg, Nicolas Sarkozy est également sorti de son rôle mardi 8 novembre. On venait justement
d'apprendre comment il avait perdu lui aussi ses nerfs contre les premiers
ministres Papandréou et Netanyahou.
Faute d'arguments, Sarkozy méprise. Triste sire.
On le croyait président-travailleur, tout occupé à sauver son Triple A, et donc indifférent à la « petite »
politique quotidienne. En Grèce puis en Italie, les « marchés », leurs traders et les agences de notation ont eu la peau de Georges Papandréou (vendredi) puis de Silvio Berlusconi
(mardi)
On le croyait si détaché du brouhaha politicien, si indifférent à sa propre réélection, que l'on fut tout surpris de
constater ce mardi 8 novembre combien la candidature de François Hollande l'agace, le perturbe, le gêne. Il n'est officiellement pas candidat, mais ça le démange gravement de pouvoir en
découdre...
A en croire le Figaro, Nicolas Sarkozy a d'abord chargé Hollande en privé,
devant ses fidèles, lors de sa fameuse réunion de pilotage UMPiste à l'Elysée chaque mardi matin. Courageux mais pas téméraire, notre Monarque ! Jamais d'attaque publique et directe. Il préfère
la confidence qu'on répète, l'aparté qu'on relaye, la réunion faussement publique que les participants pourront commenter aux journalistes ensuite. Pourra-t-on au moins, l'an prochain, décompter
les jus d'orange, café et croissants offerts généreusement par la Présidence de la République à l'UMP une quarantaine de mardi matins par an des frais de campagne du candidat Nicolas ? Pas si
sûr...
Ce mardi donc, Sarkozy a encore tonné contre Hollande: « Hollande
est déjà président. C'est une bonne chose pour nous car ça va finir par agacer les Français.» La veille déjà, il s'était emporté en privé contre la
proposition de François Hollande de réduire le salaire présidentiel de 30%: « Quelle hypocrisie! Hollande est bien content que j'aie fait le travail ». Un conseiller anonyme du
président - on devine Franck Louvrier - expliquait à un journaliste du Figaro que « Baisser le salaire, c'était refocaliser le débat sur la rémunération du président, et faire un cadeau à
l'opposition sur un sujet qui lui a beaucoup nuit. (...) C'était un message très ambigu qui pouvait effrayer les Français. Si on baisse les salaires du président et du premier
ministre, cela peut vouloir dire qu'on le fera bientôt pour tous les autres ».
Sarkozy s'est montré si mordant parce que sa cote remonte dans les sondages, ce smêmes études d'opinion que lui communique sa
cellule « Enquêtes » animée par Patrick Buisson et Pierre Giacometti à l'Elysée. Les Echos, ce mercredi, publiait un sondage réalisé
lundi et mardi auprès de 1006 adultes. Et les nouvelles étaient très bonnes: la cote de popularité du Monarque remonte ! Plus de 9 points en un mois ! Quelque 40% des sondés déclaraient avoir
confiance en Nicolas Sarkozy. Il retrouvait sa cote de février 2010. En réalité, sa progression s'est réalisée principalement chez les sympathisants de droite (+8 points).
Sarkozy, du mensonge au mépris
Un peu plus tard, après quelques minutes d'hélicoptère militaire ou de jet présidentiel, le même vrai candidat parlait en
public, dans le grand amphithéâtre de l'université de Strasbourg. « Mais cette fois, stature présidentielle oblige, le chef de l'État n'a pas prononcé une seule fois le nom de Hollande.»
note avec amusement la journaliste du Figaro. L'assistance était sage, 400 étudiants avec lesquels notre Monarque « échangeait ».
En arrivant dans la salle, entre deux rictus involontaires de
remerciements pour les applaudissements évidemment polis, Sarkozy s'excusa pour son (traditionnel) retard. Un Président, ça sait se faire attendre, même si ça ne travaille pas beaucoup (car ce
mardi, l'agenda officiel de Nicolas était particulièrement allégé comme souvent). Comme pour mieux insister sur le poids des responsabilités qui pèsent sur lui, Nicolas Sarkozy commença par
fermer les yeux (gros plan), et se pincer le haut du nez avec deux doigts, genre je-suis-crevé-excusez-moi.
On souriait.
Ensuite, le candidat livra ses leçons. Il fustigea le « candidat à la candidature ». L'expression témoignait d'un
agacement extrême de la part du Monarque. Hollande est candidat désigné par des primaires réussies. Mais à l'Elysée, faute de bilan à défendre et de programme à proposer, on a décidé de rabaisser
l'opposant. Il faut le « minorer » coûte que coûte. On appelle cela le « syndrome de la talonnette ».
Quelques étudiants avaient été désignés pour poser les questions préparées. Le Monarque put répéter les mêmes
arguments.
1. « un lycéen sur deux vivra plus de cent ans. » Tiens, on a déjà entendu l'argument. Il nous l'avait dit le 8 mars
dernier, à Beignon dans le Morbihan, mais aussi le 21 octobre à Bonneval en Eure-et-Loir, le 4 novembre à Troyes dans l’Aube, et même le 25 janvier à Saint-Nazaire. C'est juste faux. « conviction rabâchée n'est pas vérité » expliquait un confrère blogueur, citant l'efficace rubrique
Desintox de Libération. A l'époque, ces derniers rappelaient que «cette «croyance» trouve son origine dans un malentendu » qui date de 2001. Elle ne repose sur aucune réalité
scientifique, mais, ce mardi à Strasbourg, aucun étudiant présent dans l'hémicycle n'avait visiblement l"autorisation d'expliquer à Nicolas Sarkozy qu'il racontait... n'importe quoi.
2. Le plan de rigueur ? «Il a été annoncé par le premier ministre mais je le soutiens !» Sarkozy faisait de
l'humour.
3. « Si d'autres ont des solutions, qu'on en débatte. Les Français choisiront ». Comment débattre avec un Président
qui ... refuse le débat puisqu'il n'est ni candidat ni ouvert à autre chose qu'à des monologues encadrés.
4. «On me disait que ce pays éruptif ne pouvait pas être réformé ! Les gens sont intelligents. Ils font la
différence entre les discours de vérité et autre chose.» Mais qu'a-t-il réformé ? Les retraites, dont il est contraint d'accélérer la dégradation car son plan « définitif » d'il y a
un an ne produit pas les économies nécessaires ? L'allègement de l'ISF, qui coûta 2 milliards d'euros au budget de l'Etat l'an passé ? Sa politique immobilière, qu'il a finalement intégralement
détricotée en un mandat ?
5. Toujours contre Hollande, mais sans le citer, Sarkozy a taclé sur tout éventuel moratoire sur la construction de nouvelles
centrales nucléaires: « Ça veut dire quoi ? Qu'on arrête de construire des centrales plus sûres pour garder les vieilles ? C'est fort, hein, comme idée !» Nouveau
dérapage. Pourrait-on expliquer à notre Monarque que les EPR coûtent si cher et sont si peu sécurisés qu'aucun - répétons- aucun n'est en service nulle part dans le monde quelque 5 ans après les
premiers travaux.
6. Toujours méprisant, le Monarque s'est aussi agacé sur une mesure, une seule: «On va embaucher 60.000 enseignants,
c'est 500 millions d'euros par an multipliés par cinq. Depuis quand embauche-t-on un fonctionnaire pour cinq ans ? C'est niveau master pour découvrir ça ! » Nicolas Sarkozy a
mis 4 ans pour découvrir que les 500 milliards d'euros- 500 milliards d'euros!!- de dette publique supplémentaire de son mandat étaient finalement un souci.
Ami sarkozyste, seras-tu aussi méprisant ?