Bel-Ami de Maupassant (5/12)

Publié le 10 novembre 2011 par Sheumas

   Bel-Ami s’enivre des femmes comme les femmes s’enivrent de lui. Il est la chimère de toutes les femmes qui se contemplent dans son image. La tension est telle qu’il ne cesse de tendre vers un absolu de lui-même à travers tous les miroirs qu’il croise. Vers la fin, suprême ironie, certaines lui trouvent une ressemblance avec le Christ d’un tableau exposé chez Walter. Ainsi, dans l’espace de ce roman dont il est le héros éponyme, l’idole des femmes parvient-il à échapper, pour un temps, à l’angoisse de la dissolution des êtres dans le temps.

   Mais rien n’échappe à la lucidité implacable du romancier et l’angoisse de la finitude, du vide et du néant, envahit la narration. Dès la seconde partie, Forestier meurt dans d’atroces souffrances et Duroy a du mal par la suite à ne pas être une sorte de « double » du défunt dont il a pris la femme, la place, la fortune et les pantoufles.

   L’un de ses confrères du journal, Norbert de Varennes l’avait, au début de son ascension, invité à un minimum d’inquiétude face à cette « aventure » de la vie qui n’est qu’un chemin : témoin son discours particulièrement sinistre, et dont on se souvient quand Georges Du Roy du Cantel a atteint le sommet, avant la descente inévitable désormais... Terrible discours de Norbert de Varennes qui illustre le penchant sombre de Maupassant et que je publie en trois fois dans les articles à suivre.