« Montand était un acteur de son époque. Il n'y a pas d'équivalent aujourd'hui. Il est né en 1921, création de l'URSS, et il est mort en 1991, à la chute de l'empire soviétique. L'histoire de Montand dans le XXe siècle est celle de millions de gens. » Ainsi s’exprime Patrick Rotman, son biographe, et l’auteur d’un émouvant et très politique documentaire diffusé hier soir sur France 2.
A moi aussi, il manque. J’ai beaucoup de souvenirs attachés à sa mémoire de chanteur et d’acteur. Le documentaire est remarquable, même par ses omissions. Par exemple, aucune allusion au film-événement « Le salaire de la peur » d’Henri-Georges Clouzot primé à Cannes en 1953. Mais peu importe. C’est surtout l’évocation souvent douloureuse d’un parcours familial et politique que de nombreux français ont aussi connu : l’exaltation des idées communistes, l’embrigadement quasi général de l’élite intellectuelle française autour de Sartre et de ses utopies, la découverte – tardive – des réalités du monde soviétique. Le courage de revenir sur des erreurs et de le proclamer.
Et puis le talent. Un homme hors du commun, d’une élégance absolue malgré ses origines des plus modestes, une éponge sachant tout assimiler – y compris un accent américain tout à fait acceptable - un bourreau de travail de chaque jour, une montagne de séduction auprès des femmes les plus belles du monde comme Marilyn…et, cependant sa fidélité à son épouse, Simone Signoret, malgré son autodestruction alcoolique. Les images « volées » de ses inlassables répétitions, le rappel de ses triomphes au Metropolitan Opera de New York ou au théâtre Tchaikovski de Moscou témoignent de sa popularité.
Et puis ses complices, auteurs, paroliers, accompagnateurs et pygmalions : Edith Piaf, Jacques Prévert, Joseph Kosma, Francis Lemarque, Henri Crolla, Bob Castella, Serge Reggiani …un monde qui a bercé ma jeunesse. Il fut un temps où je connaissais par cœur toutes les chansons de Montand et de Charles Aznavour ….
Travailleur intense, séducteur infaillible, homme de doutes et de modestie, mais cabot tout de même….oserais-je dire que Montand me fait aussi tellement penser à mon père ?
Un documentaire à voir et à revoir. Ce n’est pas si fréquent sur notre télévision soumise aux lois de l’audience souveraine !