Limbo est un jeu vidéo sorti en juillet 2010. Développé par le studio danois PlayDead, il allie plateformes en 2D et réflexion. Nous y incarnons un jeune garçon muet qui doit progresser à travers les limbes malgré de très nombreux pièges. La mort est au rendez-vous et elle est créative, pleine de surprises et délicieusement sadique. Die & Retry.
Aucun pouvoir, aucune arme ou aptitude spéciale ici. Notre héros peut marcher, sauter, s’accrocher, actionner des mécanismes et c’est tout. Le poids et la gravité sont pris en compte donnant parfois lieu à des énigmes retorses. Ce gameplay oldschool et réduit à sa plus simple expression semble connaître regain de popularité dans les studios indépendants.
C’est Braid qui ouvrit le bal en 2008. A l’heure des jeux blockbusters, il proposait des graphismes cartoonesques et un gameplay simple mais intelligent. S’engouffrèrent dans la brèche Super Meat Boy (2010), implacable die and retry à faire craquer les nerfs les plus solides et Les mésaventures de P.B Winterbottom (2010) qui sur fond de cinéma muet offrait de savoureux casse-têtes.
Les Mésaventures de P.B Winterbottom
Mais contrairement à ses confrères, Limbo se démarque par des partis-pris radicaux: pas de textes, pas de voix, pas de barre de vie, aucune indication à l’écran, aucune cinématique. L’histoire se déroule comme un fil d’Ariane, fluide et ténu. La progression de gauche à droite n’est pas systématique, il faut parfois savoir revenir en arrière pour mieux avancer.
Avancer oui mais où?
Car les limbes sont loin d’être accueillantes. Les monstres arachnides y règnent, des cadavres jonchent le sol, chaque pas peut être le dernier. Jouant sur les nuances de gris, les atmosphères brumeuses, les arrières plans successifs, l’univers du jeu emprunte autant à F.W. Murnau qu’à Tim Burton. A la nature cruelle succède une ville fantôme. Les ombres chinoises pourraient évoquer une version cauchemardesque et tourmentée d’un film de Michel Ocelot. Le tout souligné par une ambiance sonore ciselée, oppressante et minimale.
« Utilisé d’abord à des fins religieuses (évoquer l’âme des morts) et d’exorcisme, [le théâtre d'ombres] est rapidement devenu une forme particulièrement séduisante de spectacle populaire, mettant en scène aussi bien de grands poèmes épiques que des satires politiques ou grivoises. »
(Wikipédia – Le théâtre d’ombres)
Nosferatu – Murnau
L’innocence de l’enfance mise à mal par une série d’épreuves terrifiantes et éprouvantes. La sombre forêt, les pièges, les monstres tapis dans le noir. Difficile de ne pas penser au Petit Poucet ou au Petit Chaperon Rouge. Limbo serait donc un conte horrifique? Avec un peu plus d’optimisme, nous pourrions presque y voir un parcours initiatique, une épopée symbolique. Ou comment passer de l’âge tendre à l’âge adulte.
La version officielle parle d’un jeune garçon parti chercher sa soeur dans les limbes. Est-elle morte? Est-elle une Eurydice des temps modernes? Est-ce un hommage à toutes ces histoires où il est question de valeureux chevaliers et de princesses à sauver?
A chacun de trouver sa propre réponse…