A l’instar des habitants des Iles d’Aran, situées à l’extrême ouest de l’Irlande, qui parlent un anglais imprégné de gaëlique, la traductrice offre un texte français avec un lexique élaboré et une syntaxe très bousculée qui donne de la musicalité aux dialogues qui roulent dans la bouche des comédiens.
On intègre très vite la formulation pourtant particulière remplaçant par exemple un « si c’était» par « même ce serait ».
La langue est au service de la légende, fantastique, recueillie par Synge au cours d’un de ses voyages. Le point de départ est le supposé meurtre du père. Mais écoutons avec attention Christy Mahon (Thomas Durand) : « J’ai juste levé ma bêche, lui d’un bloc a croulé devant moi comme un sac vide sans ouf (…) je l’ai enterré après ».
Le récit exalte les habitués du troquet et le jeune homme devient un sujet d’admiration dont toutes les femmes tombent amoureuses. Pour elles tuer son père signifie qu’il en a du cœur à vendre … et chacune a décidé de le gagner.
Le décor est un espace qui n’est ni intérieur ni extérieur, propice à réveiller l’Irlande intérieure de chaque spectateur, en suggérant toutes les facettes de ce pays, rural et tourbeux, ses débits de boissons, ses villages en fêtes.
Pas de doute que le spectateur soit baladé dans cette histoire qui, comme le dit le personnage de Susan (Isabelle Cagnat) est du tonnerre et qui est interprété par une troupe d’acteurs tous également formidables.
Le baladin du Monde occidental de John M. Synge,
Mise en scène d’Elisabeth Chailloux
Au Théâtre des Quartiers d’Ivry du 3 au 30 novembre
Puis le 6 décembre à La Piscine de Chatenay-Malabry (92) et les 11 et 12 janvier à Fontenay-sous-Bois dans le cadre de Fontenay en Scènes.