Versailles intime

Qui n’a jamais rêvé de pousser les portes closes du château de Versailles ? De découvrir les appartements privés des rois, leurs véritables lieux de vie, loin du faste et du décorum des grandes pièces d’apparat ?

Peu de gens le savent mais il est offert au public de voir ce Versailles « caché », dans des conditions bien meilleures que les circuits libres de visite du Château. Grâce au programme « Versailles intime », initié par Diane Drubay de Buzzeum, j’ai eu l’opportunité d’effectuer une visite du genre. Guidés par l’historien de l’art Nicolas Jacquet (1), nous sommes une vingtaine à avoir découvert les Petits Appartements du Roi et les cabinets de travail voisins, les appartements privés des favorites : la Marquise de Pompadour et la Comtesse Du Barry, et la Chapelle royale.

Les Petits Appartements du Roi, également appelés appartements intérieurs du Roi, se répartissent autour de la cour des Cerfs. Dissimulés derrière les vastes enfilades des Grands Appartements qui constituent la partie publique du palais, ils étaient réservés à la vie intime des souverains. En dehors de la famille et du service, seuls quelques rares invités de marque y étaient admis. De par leurs dimensions restreintes et leur fragilité, ils ne se prêtent guère à l’accueil du public, à l’exception des groupes en visites guidées (2). Parmi ces pièces de vie, nous avons notamment vu le somptueux cabinet de garde-robe de Louis XVI, dans lequel le roi se rendait chaque matin aux aurores pour travailler au calme; le cabinet des bains (muni de deux baignoires car le roi recevait pendant sa toilette !); la salle des cuves, située au dessus du cabinet des bains, qui alimentait les baignoires en eau chaude; l’atelier où Louis XVI se livrait à des expériences de physique-chimie et à la pratique de la menuiserie, de la serrurerie et de l’horlogerie; et le cabinet de la cassette, où Louis XVI tenait les registres de ses comptes privés.

C’est tout autour de ces appartements intimes, à la façon d’un hôtel particulier inaccessible aux regards indiscrets, que Louis XV avait installé ses favorites. Les appartements de Madame de Pompadour, comme beaucoup des autres pièces du Château, ont été reconstitués, avec des meubles provenant d’autres demeures. Ils bénéficient d’une vue magnifique sur le parterre du Nord et la forêt de Marly. Outre la garde-robe de la Marquise, les six chambres et anti-chambres, cabinets et salons, la pièce la plus insolite se situe sans doute un étage au dessus : il s’agit de la minuscule chambre de Madame du Hausset, femme de chambre de la Pompadour, dont la hauteur sous plafond ne dépasse guère 1m75… Aussi exiguë que fut cette pièce, Madame du Hausset faisait toutefois partie des « bien logés », par opposition aux « mal logés », les fameux « galopins » qui devaient tous les jours faire l’aller retour entre la ville et le Château.

Les appartements de Madame Du Barry, qui ont été rénovés récemment, dégagent un certain charme et une impression de confort. Du mobilier XVIIIème siècle ayant appartenu à la Comtesse vient agrémenter les septs pièces de cette suite aux ornements raffinés. Détail amusant, caché derrière une porte du salon d’angle, on peut apercevoir un minuscule réduit dans lequel Louis XV faisait réchauffer son café. C’est dire s’il était à son aise chez sa maîtresse…

Nous avons poursuivi notre visite avec la Chapelle Royale. Attenants à ce lieu de culte se trouvent la sacristie où les musiciens venaient ranger leurs affaires et l’oratoire privé de Madame de Pompadour, d’où cette dernière pouvait assister aux offices religieux sans se mêler à la cour mais tout en restant vue d’elle. Un procédé aussi ingénieux que sournois ! Pour clore le parcours, nous avons traversé une partie de la Galerie de pierre et du sublime musée de l’Histoire de France, aménagé sous Louis Philippe, après la Révolution.