Voici un extrait de leur déclaration.
Une poignée de banques internationales, d’agences d’évaluation, de fonds d’investissement, une concentration mondiale du capital financier sans précédent historique, revendiquent le pouvoir en Europe et dans le monde et se préparent à abolir nos états et notre démocratie, utilisant l’arme de la dette pour mettre en esclavage la population européenne, mettant à la place des démocraties imparfaites que nous avons, la dictature de l’argent et des banques, le pouvoir de l’empire totalitaire de la mondialisation, dont le centre politique est en dehors de l’Europe continentale, malgré la présence de banques européennes puissantes au cœur de l’empire.
Ils ont commencé par la Grèce, l’utilisant comme cobaye, pour se déplacer vers les autres pays de la périphérie européenne, et progressivement vers le centre.
L’espoir de quelques pays européens d’échapper éventuellement prouve que les leaders européens font face à un nouveau « fascisme financier », ne faisant pas mieux quand ils étaient en face de la menace de Hitler dans l’entre-deux- guerres.
Ce n’est pas par accident qu’une grosse partie des media contrôlée par les banques s’attaque à la périphérie européenne, en traitant ces pays de « cochons » et aussi tournant leur campagne médiatique méprisante, sadique, raciste avec les media qu’ils possèdent, pas seulement contre les Grecs, mais aussi contre l’héritage grec et la civilisation grecque antique. Ce choix montre les buts profonds et inavoués de l’idéologie et des valeurs du capital financier, promoteur d’un capitalisme de destruction.
La tentative des media allemands d’humilier des symboles tels que l’Acropole ou la Venus de Milo, monuments qui furent respectés même par les officiers d’Hitler, n’est rien d’autre que l’expression d’un profond mépris affiché par les banquiers qui contrôlent ces media, pas tellement contre les Grecs, mais surtout contre les idées de liberté et de démocratie qui sont nées dans ce pays.
Le monstre financier a produit quatre décades d’exemption de taxe pour le capital, toutes sortes de « libéralisations du marché », une large dérégulation, l’abolition de toutes les barrières aux flux financiers et aux facilités, d’attaques constantes contre l’état, l’acquisition massive des partis et des media, l’appropriation des surplus mondiaux par une poignée de banques vampires de Wall Street.
Maintenant, ce monstre, un véritable « état derrière les états » se révèle vouloir la réalisation d’un « permanent coup d’état » (en français dans le texte) financier et politique, et cela pour plus de quatre décades.
En face de cette attaque, les forces politiques de droite et la social-démocratie semblent compromises après des décades d’entrisme par le capitalisme financier, dont les centres des plus importants sont non-européens.
D’autre part, les syndicats et les mouvements sociaux ne sont pas encore assez forts pour bloquer cette attaque de manière décisive, comme ils l’ont fait à de nombreuses reprises dans le passé. Le nouveau totalitarisme financier cherche à tirer avantage de cette situation de manière à imposer des conditions irréversibles à travers l’Europe.
Il y a un urgent besoin d’une coordination d’action immédiate et d’une coordination transfrontalière par des intellectuels,des gens des arts et des lettres, de mouvements spontanés, de forces sociales et de personnalités qui comprennent l’importance des enjeux; nous avons besoin de créer un front de résistance puissant contre « l’empire totalitaire de la mondialisation » qui est en marche, avant qu’il soit trop tard.
L’Europe ne peut survivre que si elle met en avant une réponse unie contre les marchés, un défi plus important que les leurs, un nouveau « New Deal » européen.
Nous devons stopper immédiatement l’attaque contre la Grèce et les autres pays de l’UE de la périphérie; nous devons arrêter cette politique irresponsable et criminelle d’austérité et de privatisation, qui conduit directement à une crise pire que celle de 1929.
Les dettes publiques doivent être radicalement restructurées dans l’Eurozone, particulièrement aux dépens des géants des banques privées.
Les banques doivent être recontrôlées et le financement de l’économie européenne doit être sous contrôle social, nationale et européen.
Il n’est pas possible de laisser les clés financières de l’Europe dans les mains de banques comme Goldman Sachs, JP Morgan, UBS, la Deutsche Bank, etc… Nous devons bannir les dérives financières incontrôlées, qui sont le fer de lance du capitalisme financier destructeur et créer un véritable développement économique, à la place des profits spéculatifs.
L’architecture actuelle, basée sur le traité de Maastricht et les règles du WTO, a installé en Europe une machine à fabriquer la dette. Nous avons besoin d’un changement radical de tous les traités, la soumission de la BCE au contrôle politique par la population européenne, une « règle d’or » pour un minimum de niveau social, fiscal et environnemental en Europe.
Nous avons un urgent besoin d’un changement de modèle; un retour de la stimulation de la croissance par la stimulation de la demande, via de nouveaux programmes d’investissements européens, une nouvelle réglementation, la taxation et le contrôle du capital international et des flux de facilité, une nouvelle forme douce et raisonnable de protectionnisme dans une Europe indépendante qui serait le protagoniste dans le combat pour une planète multipolaire, démocratique, écologique et sociale.
Nous faisons appel aux forces et aux individus qui partagent ces idées à converger dans un large front d’action européen aussi tôt que possible, de produire un programme de transition européen, de coordonner notre action internationale, de façon à mobiliser les forces du mouvement populaire, de renverser l’actuel équilibre des forces et de vaincre les actuels leaderships historiquement irresponsables de nos pays, de façon à sauver nos populations et nos sociétés avant qu’il ne soit trop tard pour l’Europe.
Mikis Thédorakis et Manolis Glezos
Athènes, octobre 2011