Une serveuse qui ne s'appelle pas vraiment Marylin, un chanteur solo qui n'aime pas les solos, un match plutôt pourri sur écrans géants, des pintes de red à 4$. Gomeux finit par arriver. Le match a la mansuétude de se terminer avant qu'on se pende aux machines-à-coke. Au bout d'une demi-heure de karaoke professionnel, on annonce la première partie, qui tout de même, arrive après le début, mais on s'en tape. Marylin fait semblant d'être amoureuse de toute la salle, se gave de pourboires, charme la moitié de la ville, il fait très chaud, les camions de pompiers hurlent à la lune tout autour du petit bar, c'est son cul, ou nos ventres, qui brûlent ? Le match perdu fait place à la débâcle des Alouettes, qui eux, ne connaissent pas la défaite, mais plutôt la campagne de Russie, un 11 septembre footballistique, mais on s'en fout, parce que cette première partie qui se tient plus tard que la deuxième est assurée par un tout petit Mexicain d'Acapulco, Pablo, Manolo, Osvaldo ou Pedro-Juan, j'ai oublié. Tout ça pour dire que celui-là descend de scène, s'avance vers le public, tient le micro à un mètre de ses lèvres et : mehhiiiii-cooo… VLAM ! Un vrai de vrai chanteur. Cinq vieilles ouvrières fatiguées et flapies y vont de danses en lignes plus ou moins désynchronisées. Elles sont dignes et belles, d'une certaine façon. Pendant ce temps, les écrans montrent des types à demi-nus, affalés l'un contre l'autre, tellement à bout de souffle qu'ils ne savent plus se boxer. Le plus vieux des deux prend les tapes sur le nez sans réagir. L'autre s'arrête et ahane. Reprend l'initiative. Et pif, pif, pof. Le sang coule partout. J'essuie la bière ambrée sur le comptoir à l'aide d'une serviette de papier immaculé. Trop c'est trop. Gom propose qu'on s'éjecte. Je prends mon gros chandail vert. Tellement hurlé les chœurs que je suis aphone ce matin. Ça tombe bien, je suis seul.© Éric McComber