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Publié le 06 novembre 2011 par Zako
SOURCE: MEDIAPART / Pour comprendre:

Le bombardement de Bouaké, une «bavure manipulée»?

06 NOVEMBRE 2011 | PAR LA RÉDACTION DE MEDIAPART
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Une enquête d'Alexandre François Le 6 novembre 2004, au quatrième jour de l'offensive des troupes de Laurent Gbagbo contre les positions rebelles de Guillaume Soro, deux Sukhoï ivoiriens, pilotés par des mercenaires biélorusses, Barys Smahine et Youri Souchkine, survolent avec leurs copilotes ivoiriens, Patrice Ouei et Ange Gnanduillet, le lycée Descartes de Bouaké où les troupes françaises d'infanterie de marine du colonel Patrick Destremeau ont établi leur quartier général. A leur deuxième passage, ils lâchent leurs roquettes sur l'objectif, tuant neuf militaires français et un civil américain et blessant trente-huit autres soldats. A leur retour à l'aéroport de Yamoussoukro contrôlé par l'armée française, les pilotes se posent sans encombre. Leurs appareils sont détruits par des tirs de missiles français quelques minutes plus tard. Les Biélorusses regagnent Abidjan par la route où ils sont arrêtés avec une douzaine d'autres mercenaires slaves par des militaires du général Poncet, qui commande alors l'opération Licorne. Ils sont interrogés pendant plusieurs jours avant d'être expédiés dans un bus, sans autre forme de procès, au Togo. Là, ils sont interceptés par les autorités du pays qui, pendant deux semaines, les gardent au frais, proposant à la France de les récupérer. Mais Paris n'en veut pas. De guerre lasse, les Togolais les renvoient en Biélorussie. Depuis lors, on a perdu leur trace. Sept ans, jour pour jour, après ce bombardement, l'enquête du Tribunal aux armées de Paris (TAP) est en panne. Et Me Jean Balan, l'avocat de plusieurs familles de victimes, perd patience. « Tout s'est arrêté, s'emporte-t-il, dans une lettre ouverte. Aucun acte de procédure significatif n'a plus été effectué depuis un an et demi. » Me Balan réclame les auditions d'une dizaine de conseillers de Michèle Alliot-Marie, alors ministre de la défense, de l'ex-président ivoirien Laurent Gbagbo, aujourd'hui détenu par les troupes de son rival Alassane Ouattara, et de Robert Montoya, un ex-gendarme élyséen de Mitterrand, soupçonné d'avoir livré à la Côte d'Ivoire les deux avions ayant servi au bombardement, et d'avoir exfiltré les mercenaires biélorusses. Il s'en prend à Alliot-Marie qu'il accuse d'avoir, «dès le début de l'affaire», cherché à «saboter l'action de la justice afin d'éviter, à tout prix, que la vérité ne soit connue». Et conclut par cette grave accusation: «Des éléments du dossier laissent apparaître des pistes plus que troublantes. Par exemple, que le bombardement était voulu afin de créer une situation propice pour se débarrasser de Laurent Gbagbo.» A entendre l'avocat, ce bombardement, où neuf soldats français ont péri, serait à classer dans les dossiers les plus obscurs de la Françafrique. A priori, les faits paraissent pourtant clairs. La quarantaine de témoins, militaires rescapés, interrogés au début de l'instruction par les juges au TAP, sont unanimes pour affirmer que l'attaque était intentionnelle et que les pilotes n'ont pu se tromper de cible après l'avoir survolée à deux reprises. « Les pilotes savaient tout à fait où ils frappaient », affirme un spécialiste de la défense aérienne cité dans le dossier d'instruction. « Le premier Sukhoï était très bas. Je voyais même la tête du pilote qui regardait de droite et de gauche », raconte un autre rescapé interrogé par l'enquête.« L'avion s'est clairement positionné dans l'axe et nous a piqué dessus pour lâcher les roquettes sur les lieux de vie (le foyer) où nous étions tous regroupés. Car nous étions tous à l'ombre pour nous cacher un peu aussi », témoigne un autre survivant. Devant l'attitude visiblement agressive des avions, les militaires français s'étaient mis à l'abri sous des auvents mais aucun d'entre eux ne se trouvait à l'intérieur du foyer visé. Et pour cause, samedi 6 novembre 2004, ce lieu de rencontre et de repos était exceptionnellement fermé pour inventaire. D'où l'étonnement et l'incompréhension de nombreux témoins et cette question: pourquoi les Sukhoï ivoiriens ont-ils visé un bâtiment qui n'avait aucun intérêt stratégique, de surcroît inoccupé ce jour-là ? «Comme si les bâtiments visés devaient être vides à un moment déterminé», note malicieusement l'avocat de la partie civile. D'après un mercenaire français « engagé » aux côtés de l'armée gouvernementale, des officiers ivoiriens auraient été intoxiqués par « une source militaire française » sur la prétendue tenue d'une réunion des chefs rebelles le 6 novembre dans un bâtiment du lycée Descartes, le campement de Licorne à Bouaké. Cette thèse, avancée dans les heures qui avaient suivi l'attaque, a très vite été escamotée. Elle expliquerait pourquoi les mercenaires biélorusses ont visé le foyer avec autant d'acharnement et de précision. Elle pourrait, peut-être, être confirmée par la plus haute autorité ivoirienne de l'époque, Laurent Gbagbo, l'ex-président. A condition que la justice française daigne venir l'interroger dans sa résidence surveillée de Korogho (nord de la Côte d'Ivoire). suite
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