Charlie Hebdo a été victime d'un attentat le 2 novembre, à la veille de la diffusion de son dernier numéro, Charia Hebdo, dont la publication avait été largement annoncée. Charlie-Hebdo avait déjà été menacé il y a quelques années à propos de "l'affaire des caricatures". Il ne semble pas que le journal bénéficiait avant-hier d'une protection policière.
La classe politique française tout entière, les associations, les intellectuels condamnent cette atteinte à la liberté d'expression. Cette magnifique unanimité est réconfortante. ACOR SOS Racisme joint évidemment son indignation à toutes celles qui se sont exprimées.
Mais la défense des droits humains ne peut être saucissonnée. Si l'un d'entre eux est attaqué tous sont menacés.
A l'heure où aucune revendication n'était formulée pourquoi tant de prises de parole suggèrent-elles une évidente piste musulmane?
A dessein nous n'avons pas pris cet exemple sur la droite de l'échiquier politique:
"Jean-Luc Mélenchon, le candidat du Front de gauche à la présidentielle, a qualifié jeudi 3 novembre de "répugnant" l'incendie dont a été victime Charlie Hebdo, dans l'hypothèse où serait confirmé son caractère criminel. "Si c'est un incendie volontaire, c'est tout à fait répugnant, je veux dire ma sympathie mon affection à l'équipe de Charlie Hebdo, je suis sûr que le journal va trouver la force en lui de rebondir", a déclaré le député européen sur Europe 1.
Il a appelé les auditeurs et le public à "avoir la discipline intellectuelle de ne pas confondre une poignée d'imbéciles, d'abrutis qui seront rudement châtiés, je l'espère, avec la masse de nos compatriotes musulmans qui pratiquent leur foi en toute tranquillité".
Interrogé sur l'aspect provocateur de l'édition de Charlie rebaptisé "Charia Hebdo" avec comme rédacteur en chef "Mahomet", Jean-Luc Mélenchon a répondu: "Si on doit commencer à mettre une entrave à la liberté d'expression, on met le doigt dans un engrenage dont on ne sait pas comment on sortira". "Charlie assume ses choix éditoriaux, c'est la loi de la liberté de la presse. Le délit de blasphème n'existe pas pour la raison que le blasphème n'existe pas, nous sommes ici la République française, c'est cette loi là qui s'applique" (...) Le Figaro, 2 novembre 2011.
L'auteur de l'attentat, qui qu'il soit, musulman ou pas, attente à la liberté d'expression et son auteur doit être jugé.
Pourquoi donc s’empresser d’affirmer que «la masse des musulmans» ne saurait se voir reprocher un acte que personne n’a revendiqué et dont on ne sait pas si son auteur se réclame de l’islam ?
Certes, une dizaine années d’informations orientées attribue automatiquement tout attentat à un musulman. Mais pourquoi le porte-parole d’une nouvelle gauche ne s’est-il pas limité à répéter cette évidence pénale que quelle que soit la cause ou la communauté dont se revendique un délinquant il est le seul responsable de son délit ?
Et ce d’autant plus que ce responsable politique s’était déjà lourdement trompé et dans les mêmes termes. Après l’attentat commis par l’extrémiste de droite Breivik il avait dans des termes très voisins déjà condamné des «actes de barbarie (qui) soulignent l'abjection des fanatismes religieux de tous bords». «Toutes les religions connaissent un vague d'intégrisme», mais pour autant «dans aucun cas [...] il ne faut imputer le crime à tous les croyants».
Karl Grünberg ACOR Association romande Contre le Racisme