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Il est très mal vu de critiquer l’usage du référendum, au prétexte que la consultation du peuple est l’expression la plus emblématique de la démocratie. Pourtant, l’usage de ce mode de consultation comme arme politique pour éviter de prendre ses responsabilités est un dérapage condamnable. Ce que vient de faire Papandréou est, non seulement un pied de nez aux pays de la zone euro, mais aussi une façon de ne pas prendre ses responsabilités. C’est un peu comme s’il mettait en marche la stratégie du « moi ou le chaos ». Faire appel au référendum en étant assuré d’une réponse négative, quelle que soit la question posée, est un moyen détourné de résoudre un problème de politique intérieure. Il est connu que les citoyens ne répondent jamais à la question posée mais pour ou contre celui qui l’a posée. Dans le cas présent, la réponse est nécessairement négative compte tenu du rejet unanime du gouvernement grec, comme le montrent les manifestations quasi révolutionnaires. Le peuple grec est dans la rue. Comment pourrait-il aujourd’hui donner un accord à ce qu’il refuse depuis des mois ? Si la question porte sur l’acceptation du plan européen d’austérité, la réponse négative est la seule possible. L’incertitude n’existe que si la seule question posée porte sur la sortie éventuelle de la Grèce de la zone euro. Les Grecs peuvent, en effet, hésiter ayant bénéficié, pendant des années, de centaines de millions d’Euros versés par le contribuable européen pour faciliter l’insertion de leur pays dans l’Europe. Aujourd’hui, la remise de dette acceptée par l’Europe représente un cadeau de 100 Milliards d’Euros qui viennent s’ajouter aux 130 milliards d’Euros d’aide promise dans les différents plans proposés par la communauté européenne. Ils connaissent donc tout le bénéfice qu’ils peuvent tirer de leur maintien dans la zone euro. Mais ce maintien ne peut se faire sans que cessent les pratiques fiscales et économiques absurdes nationales et il est normal et logique que les Européens, qui payent pour éponger une partie de la dette grecque, demandent des garanties sur ce point. L’aveuglement, volontaire ou non, qu’ils ont manifesté lors de l’entrée de la Grèce dans la zone euro, n’est plus de mise. En effet, comment comprendre que la Commission européenne ne se soit pas aperçu que l’économie grecque ne fonctionnait que grâce à un laxisme fiscal touchant à la caricature, les seuls vrais acteurs économiques que sont les armateurs étant exemptés d’impôts ou délocalisés dans un paradis fiscal, le travail au noir étant un sport national, le paiement des prestations se faisant en argent liquide pour échapper à tout contrôle et à la TVA, les fonctionnaires étant en nombre pléthorique, le budget militaire étant hypertrophié sans raison, l’impôt foncier impossible à prélever faute de l’existence d’un cadastre crédible, etc, etc … sans parler des dépenses somptuaires faites lors des derniers jeux olympiques qui n’ont fait que creuser encore un peu plus la dette nationale devenue abyssale (plus de 130% du PIB grec). Ce référendum permet à 11 millions de grecs de mettre en danger 320 millions d’européens. Le peuple grec devrait prendre en considération le comportement des Irlandais et des Portugais qui supportent avec dignité les efforts de rigueur demandés par l’Europe. Ajoutons qu’il est saugrenu que le successeur de J.C. Trichet à la tête de la BCE soit un ancien consultant de Goldman Sachs, responsable du truquage des comptes de la Grèce lors de sa candidature à l’entrée dans la zone euro !Espérons que, comme cela s’est produit à chaque fois, cette crise va accélérer l’intégration européenne, du moins dans la zone euro et que les responsables politiques y regarderont à deux fois avant d’élargir l’Europe aux Balkans !