Magazine Culture
Éditions Michel Lafon 19 euros251 pages
Présentation de l'éditeur:
Il s’appelait Tristan, il avait trois cents ans, il avait connu toute la gamme des passions humaines. Une tempête vient de l’abattre, et c’est une nouvelle vie qui commence pour lui.
Planté sous Louis XV, ce poirier nous entraîne à la poursuite du terrible secret de ses origines. Des guerres de religion à la Révolution française, de l’affaire Dreyfus à l’Occupation, il revit les drames et les bonheurs dont il a été le témoin, le symbole ou la cause.
Mais, s’il est prisonnier de sa mémoire, il n’en reste pas moins lié au présent, à travers ce qui reste de lui : des racines, des bûches, une statue de femme sculptée dans son bois, et les deux êtres qui ont commencé à s’aimer grâce à lui…
Comment « fonctionne » un arbre ? De quoi se compose sa conscience, de quelle manière agit-il sur son environnement ? Son récit posthume nous fait voir le monde, la nature et les hommes d’une manière nouvelle, par le biais d’une pensée végétale qui évolue au rythme d’un véritable suspense.
Captivant, drôle et poignant, Le Journal intime d’un arbre apporte une réponse inédite à une question universelle : quelle est, pour un arbre comme pour un être humain, la meilleure façon de ne pas mourir ?
L'avis de Phooka:
Oui je sais, vous êtes surpris ! Ce n'est pas mon style de lecture habituel.Oui mais voilà, souvent j'écoute les chroniques littéraires à la radio et un jour, coincée dans un bouchon j'ai entendu une émission avec Didier Van Cauwelaert à propos de ce roman. Et la façon dont ce monsieur parlait de son livre et surtout de son arbre m'a touchée. J'ai vraiment adoré l'écouter et j'ai eu soudain terriblement envie de découvrir ce roman, si loin de mes lectures habituelles. Sans doute, parce que moi aussi je suis sensible au bois et aux arbres et que je me suis souvenue de "mon" poirier tombé lui aussi au champ d'honneur des tempêtes ...
Ici le poirier en question est tri-centenaire. Il a été planté sous Louis XV et il en a vu des choses en 300 ans ! Il était beau , majestueux, il avait résisté à la fameuse tempête du siècle. Et c'est un petit coup de vent de rien du tout qui l'a abattu, juste au moment où il allait être classé parmi les arbres du patrimoine. Tragédie .. Son propriétaire, le docteur Lannes est effondré lorsqu'il apprend l'évènement car il l'aime comme son fils. Son fils, justement abattu lui aussi par les allemands à la fin de la deuxième guerre mondiale. Abattu sous ce poirier qui conserve en son aubier la balle tel un morceau de l'âme de l'enfant. Le poirier a lui aussi une âme, ou ce qui s'en approche le plus du côté du monde végétal et il raconte ...
Il raconte tout ce qu'il a vu, tout ce qu'il a vécu en 300 ans. Depuis les amoureux sous ses branches jusqu'à la sorcière brûlée avec son bois mort. Sa vision "végétale" du monde des humains. Mais même sa vision est déformée car au contact des hommes, la conscience du poirier s'est un peu humanisée. Et puis il se demande si, ou comment, il va disparaître. Ses bûches seront-elles brûlées dans la cheminée, réchauffera-t’il une dernière fois les hommes? Une petite voisine, gamine très étrange s'il en est, va lui trouver un autre futur. Elle va sculpter un petit morceau de ce poirier et transporter ainsi sa conscience dans un autre monde.
J'ai adoré suivre l'histoire de Tristan, ce poirier, philosophe à ses heures. J'y ai cru, je m'y suis plongée corps et âme et je me suis vraiment régalée de ce récit. Mon seul bémol concerne la vision du futur. A un moment, la sculpture-Tristan traverse les âges et il voit notre futur. Cette partie m'a beaucoup moins plu, même si certains passages sont intéressants, mais fort heureusement elle est mineure par rapport au passé et à l'histoire de Tristan. Et cette histoire est passionnante. Il a vécu "la petite histoire qui fait la grande Histoire" et sa vision des choses est pleine d'humour, de compréhension et de non-compréhension, une vision décalée pleine de poésie aussi. On se laisse emporter par son histoire et on en ressort ravi!
Le tout est servi par une écriture superbe, fluide et qui ne prend jamais les devants. Je ne sais pas comment dire ça. L'écriture est au service de la mémoire de Tristan et non l'inverse. Elle rend son récit encore plus crédible, plus humain. On a vraiment l'impression de lire les pensées de cet arbre majestueux, mais non dénué d'humour (si dédaigneux vis à vis d'espèces moins nobles tel les arbres à papier ...ceux qui vont permettre d'éditer ce roman par exemple ! :))
Un livre un peu hors du temps, et contemporain à la fois. De la poésie, de la philosophie ..vu par un arbre. C'est un souffle de fraîcheur et de verdure dans une lecture. Ce roman apporte en tout cas beaucoup de plaisir et je ne peux que vous conseiller de vous y plonger.