Magazine Cinéma
En 1985, Spielberg nous pondait sa Couleur Pourpre sur le même sujet (la ségrégation d’hommes et femmes noirs, le racisme). Qu’est-ce que Tate Taylor, avec l’adaptation du best seller de sa meilleure copine Kathryn Stockett (The Help), avait donc de plus, en 2011, à nous offrir ? Pas grand-chose, certes. Et pourtant, on vous le dit tout net : le film est franchement génial. Déjà, parce qu’il est formellement impeccable. De l’atmosphère des années 60 et à la reconstruction d’un Mississippi ségrégationniste gangréné par les attaques du Ku Klux Klan et un racisme ouvertement assumé par des pimbêches blanches et bourgeoises : Taylor maîtrise tout. Le cadre, l’esthétique, le rythme. Son film dure 2H30, il passe comme un éclair. Ensuite, parce qu’il a su tirer le meilleur du roman fleuve qu’il adapte, en lui insufflant de beaux échos contemporains : la difficulté de s’élever socialement lorsque l’on vient d’un bled paumé et que l’on ne connaît personne (le personnage de l’écrivaine qui souhaite écrire un livre sur le quotidien des domestiques noires), la pression sociale que l’on peut subir au sein d’une caste privilégiée (le personnage faussement nunuche de Celia Foote), le rejet de la différence, et l’âpre combat pour y faire face.
Enfin, et surtout, parce qu’il a su s’entourer. Avec son trio de rouquines, à la popularité et au talent grandissants (Emma Stone de Crazy Stupid Love et Easy A, Jessica Chastain de Take Shelter, Bryce Dallas Howard du Village de Shyamalan), il embarque le spectateur dans la peinture bien sentie d’une époque. Son long-métrage captive, amuse, choque, dit l’essentiel. Oui, le tout déborde de bons sentiments et sombre dans le happy end sans rougir, mais impossible de bouder son plaisir face à autant de sincérité et de talents ajoutés. Au final, si la charge se fait soft, le croisement Desperate Housewives dans les sixties + Mississippi Burning féminisé et édulcoré, lui, demeure convaincant. Du feel good movie mignonnet, mais honnête.