Arrivée des Etats Unis au tournant du millénaire, dans la foulée de références cinématographiques (la série « Halloween », « Scream ») et rencontrant immédiatement une large adhésion par sa dimension festive et granguignolesque, la fête d’Halloween a, pourtant, fait l’effet d’un feu de paille, en France. Cinq ans après, il ne restait plus grand chose. A cela, plusieurs raisons conjuguées sans hiérarchie. D’abord, l’esprit de dérision et notre rationalisme desséché, fruit de trois siècles de mauvais esprit laïcard, qui nous rend, Français, si agaçants dans le reste du monde. Nous sommes « festifs », comme disait Murray, mais nous ne savons pas (ou plus) « faire la fête » à la manière de tous nos voisins.
Halloween et ses costumes Ensuite, l’anti-américanisme, latent dans une partie de l’opinion publique, l’amène à condamner, sans toujours grand discernement, tout ce qui vient d’Outre-Atlantique. Ajoutons l’odeur de manipulation commerciale, qui s’est très vite dégagée de ce phénomène. De quoi révulser, si on ajoute son penchant systématiquement sinistre, sanguinolent et gothique, pour ne pas dire sataniste, dénué du moindre soupçon de spiritualité ou de « sens » religieux. Enfin n’omettons, quand même pas, l’hostilité, aussi virulente qu’exagérée, du clergé catholique, présentant ces comportements, plutôt de mauvais goût mais somme toute bon enfant, comme l’offensive d’un paganisme revanchard, sorti d’on ne sait où. Dans chaque diocèse, l’évêque avait lancé son anathème contre ce nouveau Belzébut à couleur de citrouille, susceptible de concurrencer, voire d’annihiler la pauvre Toussaint, effectivement bien moins rigolote. Depuis, le marketing ecclésiastique a allumé un contre feu avec la marque « Holy wins ». Question bon goût… Paradoxalement, en Irlande, pays le plus catholique d’Europe, l’église est bien plus tolérante à l’égard de l’expression communautaire de cette fête. Sans doute, parce que Brandan ou Patrick, les pères de la nouvelle religion venue du désert, ont dû, pour la faire admettre, composer avec le celtisme et ses pratiques, en partie les assimiler. . Athboy et ses collines Correspondant à une séquence forte, dans la complexe mythologie circulaire celte (ouverture de l’espace-temps et rencontre des contraires : vie/mort), les rituels d'Halloween furent pratiqués depuis des millénaires, et avec plus d’éclat, dans les sanctuaires à ciel ouvert, comme la colline de Ward, à côté de la ville de Athboy, dans le comté Meath. Située à environ 40km de Dublin, cette colline (lieu sacré) était le centre d'un énorme « festival du feu » à l’entrée du « temps sombre ». Cette cérémonie du feu, à laquelle manque évidemment la substance spirituelle originelle, a été récemment réinstaurée. Le 31, une spectaculaire procession de flambeaux se déroule, de Athboy jusqu'à la colline de Ward; les célébrations se prolongent pendant cinq jours, avant et après le festival. De la profondeur, du mystère, du sacré dans ces ombres et ces lumières Au VIIe siècle, le christianisme a exercé son influence sur ce festival en instaurant la Toussaint, journée du 1er novembre (en anglais «All Hallows»), en l’honneur des saints et martyrs. De ce fait, la veille de la Toussaint –en anglais «All-Hallows Eve»– s’est métamorphosée en «Halloween». Si vous voulez voir et comprendre Halloween c’est donc dans la verte Erin qu’il faut vous rendre, pour quelques jours. Des festivités s’y déroulent un peu partout, comme à Cork, où se réunit la Convention Mondiale des Fantômes, dans la fameuse prison de la ville. Dublin n'échappe pas à la fête, sachant que c'est l'une des villes les plus hantées au monde. La cité natale de Bram Stoker, créateur de Dracula (sans rapport directe avec Halloween, mais en rapport avec les touristes), organise une course spéciale Vampires. La « marche fantôme », au cimetière de Clontarf, est aussi un souvenir.
Mais l'expérience urbaine du vrai Halloween irlandais, c’est à Londonderry que vous la vivrez, en participant au Carnaval Bank of the Foyle Hallow’en, le plus célèbre des carnavals d'Halloween, du 28 au 31 octobre. Cette magnifique ville médiévale d'Irlande du Nord (martyrisée pendant la récente guerre civile) aura l'honneur d'être « Ville de la culture » du Royaume-Uni en 2013 . C’est un endroit propice pour vivre l'esprit surnaturel d'Halloween : la cité se costume et les rues sont remplies de sorcières, vampires, zombies et fantômes dans une nuit musicale ponctuée de feux d'artifices.
Parade d'Halloween à Dublin : un spectacle populaire plein de mystère et de sacré D’autres manifestations sont encore à découvrir : Horror Week (au Wicklow’s Market Square, comté Wicklow) du 22 au 31 octobre, Spirits of Meath du 26 au 31 octobre, Dark stories (spectacle réservé aux plus de 18 ans), au National Leprechaun Museum de Dublin du 27 octobre au 5 novembre, Halloween Fest à Westport House (Westport, comté Mayo) du 29 octobre au 5 novembre.
Les journaux relatent les facéties des fantomes locaux Dans un pays plein de cimetières et tombes mégalithiques, de châteaux, de maisons historiques, de prisons et même de… pubs régulièrement hantés, ce ne sera pas une surprise que les mois sombres d'hiver, qui commencent avec Halloween, amènent avec eux une atmosphère mystérieuse.
Halloween à Dublin : une multitude de manifestations Mais comme à Séville, pour la Semaine Sainte, n’oubliez pas : Halloween n’est pas seulement une fête profane, donc parfois un peu vulgaire. Il y a de la profondeur, du mystère, du sacré dans ces ombres et ces lumières, dans cette agitation qui nous vient de la nuit des temps et qui brasse un message invisible, qu’un éclat illuminera fugacement pour vous. Si vous êtes prêts
http://metamag.fr/metamag-478-Aller-au-royaume-d%E2%80%99Halloween-En-Irlande-pour-suivre--comprendre-et-partager-cette-fete-religieuse-.html.
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