Rituel du matin : se lever en grommelant, mettre la bouilloire en marche, préparer les tartines, déguster le tout en écoutant la radio, appeler Chéri qui est encore endormi, foncer s’habiller, passer 1h à se demander quels talons aiguilles accorder à la jupe du jour, se dire qu’on a rien dans le placard, se brosser les dents, préparer le bento de midi, passer à l’opération fond-de-teint-eyeliner-mascara-rouge à lèvres, mettre le bento et les dossiers dans le sac d’appoint, prendre le sac à main en plus, les clés de la maison, de la voiture, du bureau…..et le sac à dos « d’eux ».
Le sac à dos « d’eux » est invisible, ce qui évite clairement les fashion faux-pas, mais n’en est pas moins léger pour autant. Le sac à dos « d’eux » je le porte tous les jours. Voyez-vous chez les cathos, on dit parfois aux autres qu’on les « portera dans la prière ». Nous avons aussi cette croyance magnifique en la « communion des saints ». Nous croyons qu’il existe, au-delà du matériel, une vraie solidarité, une vraie communion de pensée entre les vivants d’une part, puis entre les vivants et les morts. Pour faire très bref, nous croyons que l’amour de Dieu nous connecte les uns aux autres. Se connecter c’est donc partager. Partager les joies (pas lourd !) et les peines (aïe, plus lourd !) des uns et des autres.
Porter les autres dans la prière c’est donc prendre un peu de leur charge ou de leurs bonheurs, en pensée, en prière, à défaut parfois de pouvoir aider plus. C’est un peu comme si en rando, on disait à l’autre : « passe-moi ce qui est trop lourd pour ton sac, que je le mette dans le mien ». Pourquoi prendre en charge le fardeau des autres (alors que bon, franchement, entre vous et moi, chacun d’entre nous est déjà bien lesté par sa petite vie) ? Parce que le Christ nous a dit que nous étions tous frères en humanité. Et que théoriquement, le truc, là, c’est pas un boulet, c’est mon frère.
Alors en journée, j’ai mon sac à dos « d’eux » où je mets forcément les deuils des uns et des autres, la maladie. De vrais boulets ces deux catégories ! Indécrottables de l’espèce humaine ! Il y a aussi forcément les coups-bas aux boulot des uns et des autres, les déprimes passagères ou qui s’installent etc…Ce quoi bien remplir le sac. Heureusement, je rajoute aussi souvent dans mon sac à dos « d’eux » les évènements plus sympas de leur vie : les naissances, baptêmes, premiers pas, mariages, retrouvailles, ordinations, vœux, découvertes.
Et tous les cathos font de même. Et tous les cathos ont leurs sacs à dos « d’eux ». Et nous nous portons mutuellement. Et le 1er novembre, fête de tous les saints, nous nous souvenons de ce partage. Et c’est pour cela que j’ai envie de vous dire « Merci ». Merci mes saint « à l’ancienne » (les décapités, les écartelés, les violées, les jetés aux lions, ceux qui sont morts au fond de la jungle ou dans le froid de nos montagnes), merci à mes défunts de me porter « de là-haut », et merci mes saints du quotidien, vous, oui vous, qui avez probablement dans votre sac à dos « d’eux » un peu de mes peines, de mes douleurs et de mes joies tout au long de l’année. Merci d’êtres de saints frères, et….bonne fête !