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Thomas Sowell et les « oints du seigneur »

Publié le 01 novembre 2011 par Copeau @Contrepoints

Pour Charles Gave, les travaux de Thomas Sowell devraient être une inspiration pour analyser des problèmes contemporains. Une invitation qu’il lance à ses lecteurs, comme à ceux de Contrepoints.

Par Charles Gave

Thomas Sowell et les « oints du seigneur »

Thomas Sowell (Wikibéral)

Thomas Sowell est l’un de ces grands esprits qui honorent les États-Unis : noir, élevé dans le sud des États-Unis à une époque où la ségrégation y sévissait encore (il a plus de 80 ans), il est parvenu à la force du poignet à devenir professeur d’économie dans les plus prestigieuses universités des États-Unis sans bénéficier d’aucun passe droit.

Patriote, ancien « marine », libéral autant qu’on peut l’être, docteur en économie de l’Université de Chicago, muni d’une plume fort aiguisée, il commente l’actualité dans des chroniques régulières reprises dans de nombreux journaux aux USA, et est résident de la « Hoover Institution », le think tank libéral de la côte Ouest. Un grand, un très grand monsieur…

Pourquoi, doit se demander le lecteur, suis- je en train de mentionner Thomas Sowell ?

D’abord parce que, parmi les lecteurs qui lisent l’Anglais, certains seront sans doute ravis de faire sa connaissance (le livre de référence est le « Thomas Sowell’s reader« , disponible chez Amazon), mais ensuite et surtout parce que cet homme a mis au point des concepts qui permettent de décrypter la vie économique, sociale ou politique de façon particulièrement utile.

L’un de ces concepts est celui des 4 marches qui mènent à l’enfer.

Tout commence avec ce que Sowell appelle les « oints du Seigneur (the anointed) », ceux qui savent bien sûr mieux que le peuple ce dont le peuple a vraiment besoin.

Ces bonnes âmes découvrent, fort souvent hélas, qu’un problème qui existait peut-être (ou peut-être pas) doit être traité toutes affaires cessantes.

Étape numéro 1, donc : Découverte du problème. Immédiatement, nos hommes présentent des solutions qui, curieusement, passent toujours par l’accroissement du rôle de l’État et de leur pouvoir – à eux – tandis que ce sont eux et leurs troupes qui seront bien entendu en charge de mettre en place la dite solution.

La solution préconisée est mise en place, c’est l’étape numéro 2. De cette « solution » ils attendent une amélioration de la situation et l’arrivée inéluctable dans ce que Sowell appelle le scenario (A). Les opposants expliquent que rien de tout cela ne va marcher et que nous allons nous retrouver en face de la situation (Z). Les « oints du Seigneur » et les médias (les médias sont remplies de « oints du Seigneur ») accusent immédiatement les opposants d’ être des esprits simplistes, de manquer de la compétence nécessaire pour juger (que eux ont, bien sûr), d’égoïsme et, cerise sur le gâteau, d’être vendus aux forces du grand capital. Inéluctablement, la situation se détériore et nous nous retrouvons, comme l’avaient prévu les opposants en (Z), étape 3.

Nous retrouvons dans une situation bien pire que celle qui prévalait au départ, sauf pour nos « anointed » bien sûr qui ont vu leurs pouvoirs et leur prestige s’accroître considérablement. Comme les « oints du Seigneur » possèdent la Vérité et que leur rôle est de la dire au peuple émerveillé et reconnaissant, la contre attaque s’organise autour de trois principes (étape 4) :

1. La situation aurait été bien pire si la solution qu’ils ont recommandée n’avait pas été adoptée, et l’échec, qui n’est que temporaire, vient du fait que leur solution n’a pas été appliquée avec assez de vigueur.

2. Des facteurs nouveaux et non prévisibles sont venus déranger leurs plans qui, sans ces facteurs nouveaux, auraient fonctionné à la satisfaction générale, et quiconque en doute devrait être envoyé dans un asile psychiatrique

3. Les opposants restent de toutes façons ce qu’ils ont toujours été, des esprits simplistes et sans intérêt. Ils n’ont eu raison que par hasard, et d’ailleurs il faudrait qu’ils puissent prouver que la situation désastreuse actuelle a été créée de toutes pièces par les recommandations de nos « oints du Seigneur » et non pas par des facteurs exogènes (voir point n°2)

En lisant cet article, je riais tellement que ma chère épouse m’a demandé ce qu’il y avait de si drôles dans ce livre d’économie, tant il s’applique à mon cas personnel et à l’analyse que j’ai pu faire sur l’euro.

Ce schéma d’analyse permet de décrypter merveilleusement à peu près toutes les déclarations de nos chers (ô combien !) hommes politiques qui, en France, peuvent tous être qualifiés de « oints du Seigneur » comme notre bon Roi qui allait se faire couronner à Reims. Eux, ils demandent à Duhamel, à Minc ou à Attali de leur briser l’ampoule sacrée sur le front, et le résultat est le même.

Pensons à l’euro, par exemple, qui, d’après nos chantres mentionnés plus haut, devait rendre l’Europe plus harmonieuse, faire baisser le chômage, assurer notre indépendance envers les USA, rendre les femmes plus belles et le ciel plus bleu (et j’en oublie sûrement).

À l’arrivée, chacune des étapes décrites par Sowell ayant été parcourues, nous avons la moitié de l’Europe en faillite, nous sommes sous la coupe allemande, la dépression économique nous guette, et le chômage explose partout.

Et donc, je lance un petit concours parmi les lecteurs. Analysez les problèmes auxquels nos élites s’attaquent selon la méthode de Sowell, et envoyez nous ces analyses. (Note de Contrepoints : il s’agit d’un message de Charles Gave, joignable à [email protected])

Pas de voyage gratuit, mais les meilleurs analyses seront publiées sur le site, avec le nom du talentueux contributeur. À vos plumes !


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