Les dirigeants européens n’ont poursuivi qu’une seule politique depuis 2008: renflouement et emprunt, renflouement et emprunt.
Par Daniel Hannan, depuis Oxford, Royaume-Uni
« Il nous faudra un miracle. » C’est ce qu’a écrit le trader de la UBS Kweku Adoboli dans son dernier message sur Facebook juste avant qu’une perte de £ 1,3milliards ne le rattrape. Cette remarque pourrait bien servir de slogan officiel du dernier sommet à Bruxelles.Comme Adoboli, les dirigeants européens ont doublé la mise et cela afin de conjurer l’inévitable. Eurent-t-ils fait face à la crise de la dette grecque en 2009, le coût total en serait resté aux alentours de €60 milliards. Maintenant on a radié €100 milliards, avec vraiment peu d’espoir de voir résoudre le problème sous-jacent. Ce dernier plan de sauvetage ira dans la même direction que les plans de sauvetage précédents. On verra un sursaut des marchés boursiers à court terme, qui va disparaître aussitôt que les traders se rendront compte que rien n’a fondamentalement changé. La dette grecque s’accroît plus rapidement que l’économie grecque. L’écart de productivité entre l’Allemagne et les pays méditerranéens membres de la zone euro ne s’est pas réduit. Cet écart est aussi dangereux aujourd’hui qu’il l’était hier et surtout dans le cas de la politique monétaire unique qui s’applique à des économies largement divergentes.
Incidemment, ma prédiction du moment précis où on verrait la Grèce en défaut s’est avéré être inexact à un jour prés seulement. De quelque manière que ce soit, effacer la moitié d’une dette est un problème monumental. Ce n’est pas simplement techniquement parlant le rééchelonnement des remboursement d’intérêts, c’est une répudiation pure et simple du passif – et cela se reproduira encore et toujours jusqu’à ce que la Grèce soit autorisée à quitter l’euro.
Les dirigeants européens n’ont poursuivi qu’une seule politique depuis 2008: renflouement et emprunt, renflouement et emprunt. Il ne leur est évidemment pas venu à l’esprit que l’excès d’emprunts provoque avant tout l’effondrement. Il ne leur parait pas étrange de répondre à une crise de la dette en créant plus de dettes. Et ils ne se sentent pas plus déranger par le fait que toutes les folies passées ont, elles aussi, échoué aux vues de leurs objectifs déclarés. De leur point de vue, leur seul problème c’est qu’ils ne dépensent pas assez. Maintenant, ils nous assurent, droit dans les yeux, que l’emprunt de la somme presque inconcevable d’un trillion d’euros va enfin résoudre le problème. Comme Mark Twain l’avait fait remarquer, quand vous ne possédez qu’un marteau, tout problème ressemble à un clou.
Néanmoins, réfléchissez-y. Quelle est la garantie du trillion d’euros? Qui se tient garant d’une telle somme? La réponse théorique, c’est la Banque centrale européenne. Mais la BCE détient déjà tant de créances indésirables provenant des gouvernements de la zone euro qu’on peut déjà la considérer, eu égard aux définitions admises, comme une mauvaise banque. Qui alors soutient la BCE? Les contribuables de la zone euro – y compris les contribuables irlandais, portugais, espagnols, italiens et grecques. Les garants sont eux-mêmes débiteurs. C’est un schéma frauduleux à la Ponzi.
Qu’est-ce que l’UE devrait faire? Deux choses. Premièrement, il faut réduire les dépenses: nous nous trouvons maintenant dans la position absurde où chaque centime que les 27 États membres épargnent sur leurs budgets nationaux se trouve englouti par Bruxelles. Deuxièmement, elle doit superviser le dégroupage ordonnée de l’euro (voir ici).
Tragiquement pour leurs peuples, les dirigeants de la zone euro n’avaliseront pas cette option. C’est bien sûr leur affaire. Ce qui me dépasse complètement, c’est la détermination du gouvernement britannique pour garder la cohésion de la zone euro. Personne ne nie que notre intérêt soit lié à la prospérité de la zone euro: elle représente 40% de nos exportations, et ses membres sont nos alliés et amis. Mais il devient clair maintenant que la prospérité de la zone euro et le maintien de l’euro sont des objectifs contradictoires. Nous sommes, dans les faits, en train de payer le privilège d’appauvrir nos voisins. À quoi diable pensons-nous?
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Sur le web
Traduction: JATW pour Contrepoints.