Dans la foulée de Prêt d'Union, une nouvelle startup française innove pour affranchir les prêts-emprunts P2P ("de pair à pair") des obstacles réglementaires qui se dressent devant toutes les initiatives du genre. SPEAR adopte une approche originale pour ce faire, privilégiant la fibre de l'épargne "responsable" plutôt que les rendements financiers.
Ainsi, son objectif est avant tout d'apporter de la transparence dans les financements, en permettant aux prêteurs de choisir les projets qu'ils soutiendront et de les suivre au fil de leur avancement. De plus, la vocation de l'entreprise est d'aider exclusivement des projets comportant une dimension sociale, culturelle ou environnementale, et il seront effectivement évalués sur ces critères.
En termes pratiques, SPEAR n'agit que comme intermédiaire de ses banques partenaires (pour l'instant, seule une filiale du Crédit Municipal de Paris a été recrutée). Son rôle consiste essentiellement, vis-à-vis des emprunteurs, à valider la conformité des demandes à ses valeurs "éthiques" avant qu'elles ne soient transmises à la banque, pour un traitement classique. Pour les épargnants, la société est constituée en coopérative dont les parts qu'ils acquièrent sont "investies" pour alimenter les prêts qu'ils ont choisi de financer.
Ce choix implique une rémunération limitée des sociétaires, envisagée à des taux de 1 ou 2% par an, mais tout de même assortie d'avantages fiscaux (souscription au capital de PME en développement et loi TEPA). En contrepartie, les emprunteurs se voient promettre des conditions avantageuses par rapport au marché. La startup, elle, se rémunère sur les frais de souscription des épargnants (3%), les frais de dossier de prêts (1%) et les intérêts de ses dépôts auprès de la banque.
Il faut espérer que le site soit encore en construction mais sa réalisation est tout de même, pour l'instant, décevante. Là où on attendrait de la part des jeunes fondateurs de SPEAR (tous étudiants) une sensibilité "technologique" et "sociale", il faudra déchanter : envoi de dossiers par courrier, paiements par chèque et, plus important, aucune fonction communautaire ou, a minima, de dialogue et d'échanges entre membres, qui seraient pourtant parfaitement adaptées à la cible choisie...
Comme dans le cas de Prêt d'Union et malgré l'adoption de quelques "recettes" des pionniers du P2P Lending, l'approche de SPEAR est finalement assez éloignée de ces modèles. Elle me semble néanmoins intéressante et, surtout, soulève une grande question : pourquoi une telle initiative est-elle lancée par une startup et non par une banque (qui, en l'occurence, apporte une bonne partie de la valeur ajoutée, dont les taux d'emprunt réduits et la prise en charge du risque de défaut) ?