Jeanne Benameur, Notre nom est une île (extrait), éditions Bruno Doucey

Publié le 29 octobre 2011 par Xavierlaine081

 

Comment penser qu’un mot peut changer une vie ? 

Il faut imaginer. 

Il n’y a pire fou que celui qui n’imagine pas. 

Celui qui conduit à la mort des cortèges d’êtres humains parce qu’il en a reçu l’ordre. Celui qui peut ouvrir et fermer la porte d’une chambre à gaz. 

Celui qui appuie sur le bouton qui envoie le missile. 

Celui qui appuie le canon sur la tempe de l’autre. 

Tous ceux-là n’imaginent pas. 

Ils sont coupés de cette part humaine si profonde si fertile : l’imaginaire. 

Il est beaucoup plus facile d’imposer lois et décrets iniques à des êtres à qui on a retiré la faculté d’imaginer. 

C’est un temps que les humains connaissent. 

C’est ainsi que toutes les formes de pouvoir totalitaire se sont maintenues. Partout. Et de tout temps. 

Alors plus que jamais, le poème a sa place. 

Parce que nos vies, mouvantes dans le temps, éphémères et fragiles, valent leur poème. Chacune. 

Et ce n’est pas, comme la littérature aux yeux de qui cela arrange, la « cerise sur le gâteau ». Non, c’est le pain. Le seul le vrai qui nourrisse au plus profond notre être.