Dans le Paris des années 1960, Madeleine (Ludivine Sagnier) est une jeune femme pétillante, vendeuse dans un magasin de chaussures ; elle se prostitue de temps en temps pour arrondir ses fins de mois. Un jour, Madeleine s’éprend de Jaromil (Rasha Bukvic), l’un de ses clients et jeune médecin fraîchement arrivé dans la capitale française. À deux, ils vont commencer une histoire d’amour, se marier et donner naissance à une petite fille prénommée Véra (Clara Couste). Lorsqu’ils retournent à Prague, la ville dont Jaromil est originaire, les chars russes ont débarqué dans la capitale. Un événement qui sonnera le glas de leur relation amoureuse et le retour de Madeleine en France.
Dans le Paris des années 1990, Véra (Chiara Mastroianni) a grandi. À Londres, elle tombe amoureuse d’Henderson (Paul Schneider), un musicien qui se sent incapable de l’aimer en retour alors que Clément (Louis Garrel) ne peut imaginer sa vie sans elle. Au fil des années, Madeleine (Catherine Deneuve) et sa fille Véra vont chanter à tour de rôle le temps qui passe et les sentiments amoureux qui demeurent, toujours avec cette légèreté qui les caractérisent et sans laquelle elles risqueraient bien de succomber.
De Paris à Prague, de Londres à Montréal, de 1963 à 2008. Le nouveau film de Christophe Honoré traverse aussi bien le temps que l’espace, et les événements de chaque époque, ceux qui font de l’Histoire, une réalité (l’invasion de la Tchécoslovaquie en 1968, les attentats du 11 septembre aux Etats-Unis). Mais de ces épisodes historiques, le spectateur n’en verra pas plus. Honoré a eu l’intelligence et la sagesse de les esquisser, de les utiliser seulement comme un décor en toile de fond pour ne pas alourdir son long-métrage. Il laisse ainsi plus de champ à ses personnages, libres d’évoluer à leur grès, et aux histoires d’amour qui se déroulent tout au long du film.
Les premières minutes, joyeusement colorées, nous rappellent le cinéma de Truffaut (L’homme qui aimait les femmes) comme celui de Jacques Demy, de ses Parapluies de Cherbourg et de ses Demoiselles de Rochefort, à un détail près : les chaussures de Madeleine ont remplacé les chapeaux bigarrés de Solange et Delphine.
On aime ce Christophe Honoré là, lui qui nous avait déçu l’année dernière avec un Homme au bain plutôt brouillon. On retrouve ici l’ambiance qui caractérisait Les chansons d’amour ; cette atmosphère froide et mélancolique qui contraste avec l’ardeur des sentiments de chacun. Comme pour Les chansons d’amour, la bande originale est signée Alex Beaupain. Lui qui a toujours participé, de près ou de loin, aux longs-métrages d’Honoré n’a pu s’empêcher de composer une douzaine de titres pour le film. Les textes des chansons sont soignés. Ils viennent sublimer le jeu des acteurs et exprimer avec justesse les sentiments des personnages.
Neuvième long-métrage de Christophe Honoré, Les Bien-aimés est un film délicatement complexe. Une ode au sentiment amoureux, une magnifique ballade autour des sentiers torturés de l’âme humaine.
Sortie en salles le 24 août 2011