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« C’est à cela que servait l’Eglise. A consoler. Pas à prévenir le péché. » (p. 91)
L’auteur :
Né en 1945 à Ankara, Metin Arditi vit à Genève. Il préside l'Orchestre de la Suisse romande et la fondation Les Instruments de la Paix-Genève. Son œuvre est publiée chez Actes Sud : Dernière lettre à Théo (2005), La Pension Marguerite (2006 ; Babel n° 823, prix Lipp Suisse 2006), L'Imprévisible (2006, prix de la Radio suisse romande 2007 ; Babel n° 910), Victoria-Hall (Babel n° 726), La Fille des Louganis (2007 ; Babel n° 967), Loin des bras (2009 ; Babel n° 1068) et Le Turquetto (2011).
L’histoire :
Se pourrait-il qu'un tableau célèbre – dont la signature présente une discrète anomalie – soit l'unique oeuvre qui nous reste d'un des plus grands peintres de la Renaissance vénitienne ? Un égal du Titien ou du Véronèse ? Né à Constantinople en 1519, Elie Soriano a émigré très jeune à Venise, masqué son identité, troqué son nom contre celui d'Elias Troyanos, fréquenté les ateliers de Titien, et fait une carrière exceptionnelle sous le nom de Turquetto : le "Petit Turc", comme l'a surnommé Titien lui-même. (Présentation de l’éditeur, tronquée de sa fin qui en dévoile trop – à mes yeux- sur l’intrigue)
Ce que j’ai aimé :
Le Turquetto est un roman foisonnant, à l'image du grand Bazar de Constantinople dont est issu celui que l'on surnomme "Le petit rat". Un être pourtant désespérément humain, jeune passionné qui préfère apprendre les techniques liées à la peinture et à la calligraphie que de s'occuper de son vieux père malade. Un homme honteux de ses origines, qui cherche à sublimer sa destinée par l'art. Mais aussi un homme marqué au fer par cette religion judaïque qui le contraint à se cacher pour représenter le monde.
Et parce que ce roman touche à des thèmes aussi universels que l'art et la religion, il devient à son tour universel et permet aux lecteurs de transposer à son époque des sujets aussi variés que le pouvoir de l'art, son utilité, la dureté des lois de l'Eglise, les luttes de pouvoir...
« Que veut notre Eglise ? Quelle est sa mission ? Appliquer des lois ou rassembler ? Condamner ou offrir la consolation ? A quoi devons-nous servir ? Regardez les hommes ! Regardez-les ! Dans les rues ! Sur les places ! De quoi ont-ils besoin ? D’être accueillis ! Rassurés ! Entourés ! Là est le rôle de notre sainte Eglise ! Apaiser nos fidèles ! Que nous disent les chefs-d’œuvre du Turquetto ? Que l’espoir existe. Qu’il y a en l’homme une parcelle inaltérable d’immortalité telle qu’elle est incarnée dans le Résurrection de Notre-Seigneur. C’est ainsi que nous devons recevoir nos fidèles, mon cher inquisiteur. En leur offrant la beauté et l’espoir, pour les consoler de leurs péchés. Pas en les assommant avec des règles et des lois. » (p. 187)
Ce que j’ai moins aimé :
- Encore une fois la quatrième de couverture en dévoile un peu trop sur l’intrigue…
Premières phrases :
« - Elie ! Ton père s’est arrêté !
Cette manie qu’avait Arsinée de crier, alors qu’il était sous ses yeux !
Il se tourna vers son père. Le front baigné de transpiration, celui-ci pressait sur sa vessie et urinait en pleine rue, comme les portefaix et les mendiants… Depuis qu’ils avaient pris le chemin du Bazar, c’était la troisième fois. »
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D’autres avis :
Le Turquetto, Metin ARDITI, Actes Sud, août 2011, 280 p., 19.50 euros