Comment vais-je revenir dans mon unité ?
Je suis en vacances depuis près de deux semaines, ici au bout du monde, en Afrique du sud, à la rencontre d'un pays aux multiples facettes, de Cape Town en passant par les Winelands, puis les terres arides vers le Lesotho, Johannesburg, les townships, et finalement les big Five. Un jour près de la piscine, dans un lodge incroyable, avec au lever, du haut de notre cabane accrochée à un baobab, les éléphants, les fameuses springboks sautillantes, un rhinocéros discret et grincheu, le lendemain dans la nature avec les chaussures de marche, mes rangers, le sac à dos, le soleil, mais pas de maillot de bain. Enfin les soirées dans les environs de Cape Town, sur une terrasse, chez un ami, avec un verre de sublime chenin blanc, racé et savoureux, la vue sur la mer, la piscine à proximité, jour et nuit, le paysage idyllique, la vie insouciante.
Certes j'ai toujours aimé l'Afrique, durant mes missions à Djibouti, en contact avec les populations locales, pour nos livraisons humanitaires, atterir au milieu de nulle part, pour aider des personnes en détresse, donnant du réconfort moral en étant présente. Moi, pilote de mon gros bourdon, mon C160 Transall, un avion de transport pour la troupe, mais plus souvent pour du matériel et ici en Afrique pour de la nourriture, ailleurs pour livrer un hôpital de campagne. Dans ma tenue de vol, dans la poussière de la brousse, d'un endroit devenue piste d'atterissage, j'ai cet air chaud, j'aime ces responsabilités qui font de moi un commandant de bord. Je suis une femme épanouie, dans un monde masculin mais respectueux. J'ai été bizuté dans mes différents escadrons comme mes autres collègues, j'ai eu parfois des sourires un peu moqueurs, mais mes heures de vols parlent pour moi, ma carrière aussi.
"Militaire, as-tu le temps d'être une femme ?" une question posée par une amie d'enfance, revue avec le temps pour un mariage entre copains de lycée. J'ai réfléchi, car je n'avais pas l'impression d'avoir changé. Nous étions jeune avec cette propemption à suivre les modes, du jean au minijupe, je trouvais ma féminité d'alors. Certes en devenant membre de l'Armée de l'Air, je changeais aux yeux des autres, moi, je me réalisais, j'étais heureuse, je le suis toujours. Moins de temps pour faire les boutique, des vacances peu nombreuses car je fus en mission souvent, les premiers réels congés, sont ceux-là, avec la relâche partielle de mon année de grossesse et maternité. Mais je trouve maintenant des moments pour décompresser, en étant rattacher à des villes françaises, des bases aériennes, comme celle d'Orléans, dont j'ai visité avec assiduité les petites boutiques de mode, de chaussures.
Oui, j'ai un dada, mes talons hauts, ceux que je porte aussi souvent que possible, pour marquer sous ma jupe conventionnelle, ma féminité, mon confort, mes envies. Je suis le plus souvent en tenue de vol, moins seyante, mais c'est mon univers à moi, celui des cieux, un mystère pour vous, un rêve éveillé pour moi.
Je suis et je reste femme, je le vis probablement autrement que la majorité d'entre-elles, ces amies à ce mariage, ces personnes dans cet hôtel autour de moi. Ce soir, pour mon nouveau compagnon, je serai en petite robe noire, ma touche de mode, et des talons vertigineux de chez Jimmy Choo, un cadeau de mon amoureux.
Demain dans l'avion de retour, et après-demain dans mon avion, je penserai à tout cela, et à ma nouvelle mission, ici ou ailleurs.
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