Ce sont des plaques commémoratives comme il en existe partout, qui rappellent au passant qu’autrefois, là, le vent de l’histoire a soufflé. Il a même parfois soufflé fort.
Sur le côté gauche de la façade du théâtre de Béziers, une plaque nous apprend qu’au tout début de la IIe Guerre mondiale, des Belges sont venus chercher refuge ici, bien loin de leur plat pays qui n’était plus vraiment le leur. Il faut dire que ces réfugiés étaient juifs, religion fort difficile à porter lors de l’occupation nazie. Ils purent rester dans cette ville à peu près en paix jusqu’en 1942, date à laquelle Béziers, comme l’ensemble du sud du pays, passa en zone occupée, mais aussi date de la mise en place du plan d’extermination systématique des juifs d’Europe par les nazis. Sans parler des ardeurs vichystes dans l’exécution de ce plan délirant …
La gare maintenant : cette fois, c’est du STO qu’il s’agit, ce service du travail obligatoire mis en place par Pétain et ses sbires à la demande du IIIe Reich, avide d’une main-d’œuvre nombreuse et servile pouvant soutenir l’effort de guerre. 3000 déportés de l’Hérault partirent de cette gare-là.
Comme les autres jeunes gens envoyés au STO, ils furent employés chez IG Farben, BASF, Siemens, … bref, les fleurons de l’industrie germanique, tout entière alors dévouée à la folie du Führer. Les gens les plus touchés par cette mesure sont ceux nés en 1922, tout juste majeurs lors de la mise en place du STO (la majorité était fixée à 21 ans à l’époque). Parmi eux se trouvaient Pierre Brault, qui a récemment témoigné dans les colonnes du Midi Libre, racontant comment il a refusé de partir (le STO a alimenté les réseaux de résistance de manière significative), mais aussi comment il n’a pas pu faire autrement que partir avec les autres, dans ce train au départ de la gare de Béziers. Refusant d’effectuer correctement son travail, voire participant à des actions de sabotage, il a connu les geôles nazies, jusqu’à Dachau. Il n’est rentré chez lui qu’en 1945, bien après la Libération de sa ville. La Libération fait l’objet de la troisième plaque, celle qui, par son vocabulaire pas si convenu que ça, m’a le plus attiré le regard sur le côté droit de la façade du théâtre. Elle fait allusion à un fait pour lequel j’ai trouvé fort peu d’infos auprès du camarade Gougueul. On y apprend néanmoins que la ville fut libérée le 22 aôut 1944. Deux jours avant, alors que la victoire semblait acquise, la foule se presse dans le centre-ville, malgré les recommandations de prudence des résistants locaux. L’armée nazie, en déroute, évacue les locaux occupés par la Kommandantur et par la Gestapo. Des soldats de la Wehrmacht, venant de Toulouse et tentant de se rendre à Montpellier, semblent pris de panique face à la foule et surtout face à la Libération en marche. Ils ouvrent le feu, tuant dix Biterrois et en blessant une quarantaine. La guerre est finie, du moins pour cette ville-ci.