Aujourd’hui nous allons parler d’un artiste français mort en 1998, qui s’appelle César Baldaccini, mais plus simplement ses amis l’appellent César. Il a dessiné la maquette de la statuette que l’on remet aux acteurs ou aux metteurs en scène pour les récompenser, lors de la cérémonie des Césars (voilà pourquoi cette statuette a son nom).
César, Compression, 1960
Regardez bien cette photo: Arrivez-vous à reconnaître le sujet de cette sculpture?
Il s’agit d’une voiture, une vrai voiture, que César a écrasé comme de la purée en utilisant une presse. Il lui a ensuite donné une forme géometrique, mais la voiture a gardé néanmoins sa couleur originelle.
César s’est amusé à comprimer des voitures en tous genres à partir des années 1960 : voitures de rally, voitures anciennes, Ferrari… Il a appliqué cette technique à d’autres objets , tels que des livres, des tissus et même à des bijoux en or ! Les femmes riches lui offraient leur voitures pour recevoir en échange une « œuvre d’art » !
Tout comme la voiture de Damian Ortega dont je vous ai parlé dans cet article, celle de César est inutilisable. Essayez d’entrer dans ce tas de ferraille ! Il faut être vraiment un lilliputien !
César, Compressions, 1970
Pourquoi notre artiste aimait-il écraser les voitures ? Etaient-elles à mettre à la casse ?
Non, puisqu’il a aussi utilisé des voitures neuves, par exemple des FIAT qu’il a fait peindre avec des couleurs à la mode après leur compression…
Saviez-vous qu’avoir une voiture dans les années 1960-1970 n’était pas chose courante ? Demandez à vos grand-parents : avaient-ils une voiture quand ils étaient jeunes ? cela coutait-il cher ? Mes parents ont eu leur première voiture quand ils se sont mariés, elle était toute petite et bleu. Aujourd’hui, ils en ont deux !
Même si elle coûtait plus cher qu’aujourd’hui, la voiture était l’objet à la mode par excellence ! Tout le monde en voulait une, pour partir en vacances, la montrer aux copains, sortir le soir, aller travailler…
Un portrait de César dans son atelier
César a donc décidé de travailler avec un objet quotidien de son époque, un véritable objet de désir, un peu comme si aujourd’hui on pressait des Iphone ou des Ipad.
Et pourquoi donc les détruire ? Ce n’était pas un geste violent, César n’était pas fâché contre la technologie de l’époque.
Il voulait rendre inutilisable un objet utilitaire pour cibler la société de consommation. Dans les années soixante les jeunes gens commençaient à avoir plus d’argent que leurs parents (qui avaient vécu pendant la guerre) et ils pouvaient le dépenser en achetant tout un tas d’objets (éléctroménager, vêtements, déco pour la maison, produits alimentaires…). C’est cela, la société de consommation : il suffit de rentrer dans un hypermarché et la voilà. Nous avons une quantité innombrable d’objets que nous pouvons acheter avec notre carte, même si nous n’en avons pas besoin. Aujourd’hui, comme je vous le disais, ce n’est plus seulement une voiture, mais aussi un ordinateur puissant, un appareil photo à la mode, un meuble design, une tablette pour lire les journaux, un portable qui fait des photos/vidéos…
Et César, avec ses compressions, voulait justement nous provoquer en nous disant : « Regarde un peu, cet objet que tu as tellement désiré, à travers un simple geste, est transformé en un objet d’art. Je lui donne une nouvelle forme, des couleurs différentes, je le mets dans une galerie ou un musée et puis je le vends à un collectionneur. Il est encore une voiture, ou il devient quelque chose d’autre ? »
César nous enseigne qu'on peut faire de l'art avec des peintures et du marbre, oui, mais aussi avec les objets qui nous entourent. Ce qui est important dans le processus de création est la pensée que l’artiste met derrière son œuvre et le message qu’il veut nous faire passer.